tag:blogger.com,1999:blog-59363974402336152542024-02-07T13:47:18.735+01:00la taverne du doge loredanedwoodhttp://www.blogger.com/profile/01713248479216797340noreply@blogger.comBlogger149125tag:blogger.com,1999:blog-5936397440233615254.post-91804510160260681632012-06-03T10:15:00.000+02:002012-06-03T10:31:08.033+02:00Le Magasin de Curiosités de Jean-Daniel Dupuy, ou le voyage immobile<i>"Jeu: </i><span style="font-family: Arial Narrow; font-size: small;"><span style="font-family: Arial Narrow; font-size: small;"><i>Série complète d'objets de même nature et d'emploi analogue."</i> (Petit Robert de 1996)</span></span><br />
<br />
<div style="font-family: Arial,Helvetica,sans-serif;">
<span style="font-size: small;">Dans le livre d'or du magasin de curiosités, un fil rouge vermillon relie chaque pièce à sa consoeur.</span></div>
<div style="font-family: Arial,Helvetica,sans-serif;">
<span style="font-size: small;">Fourmilière d'impressions, pour le découvrir dans son intégralité, il serait nécessaire d'y consacrer une année entière, nous prévient-on. Il faudra donc se contenter d'un échantillon, condensé de mémoire vive, et de rêverie instantanée. Du matériel de tricheur au bestiaire excentrique en passant par la pièce musicale pour automate, </span><span style="font-size: small;">le flacon d'O de lune, </span><span style="font-size: small;">l'exploration révèle entre les refrains tout un lot de surprises, de passages secrets et de chausse-trappes. </span><span style="font-size: small;">Pour éviter de rester en marge
de cette déambulation, ne pas hésiter à marquer la page de son
empreinte, à laisser un cadavre exquis dans la marge, </span><span style="font-size: small;">voire même à revenir en arrière,</span><span style="font-size: small;"> crimes
passibles d'une pénitence supplémentaire dans le pays des songes.</span></div>
<div style="font-family: Arial,Helvetica,sans-serif;">
<span style="font-size: small;">Nonobstant la contribution des sens, on se déplace d'autant mieux les yeux fermés afin de capter ce qui se dérobe au premier regard, les dessous et les coulisses, les miroirs sans tain et les visages masqués. Le jeu et la duplicité font partie intégrante de ce grand labyrinthe où l'on se perd volontiers. Le tirage au sort de la grande loterie nous laisse entre les mains d'un prestidigitateur qui prend un malin plaisir à multiplier les tours de passe-passe, sans que l'on puisse en prendre conscience. </span><span style="font-size: small;">Les inquisiteurs décèleront peut-être quelques clins d'oeil aux lectures marquantes de l'auteur, Gabrielle Wittkop (et son <a href="http://www.lmda.net/din/tit_lmda.php?Id=3970">Almanach</a>) en tête, Jacques Abeille, Mervyn Peake pour ne citer qu'eux.</span></div>
<div style="font-family: Arial,Helvetica,sans-serif;">
<span style="font-size: small;">Outre un remède naturel contre l'oubli, le livre en lui-même est un bien bel ouvrage dont il serait fort dommage de se priver. </span></div>
<span style="font-size: small;"><span style="font-family: Arial Narrow;"><br /></span></span><br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh4v_BRMcmO-mjoyqqw5pctHTQnPXAOU_n3skheTWUebrl7eOlJndocGRSzlhwlfPVBG43awDN_KxmJ0ewri0OIZTbbr48oDaj9LD9mB1iuL8T4d4vItT_MIvfJhaAGYLgzijWpF__XesGr/s1600/couv-magasin.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh4v_BRMcmO-mjoyqqw5pctHTQnPXAOU_n3skheTWUebrl7eOlJndocGRSzlhwlfPVBG43awDN_KxmJ0ewri0OIZTbbr48oDaj9LD9mB1iuL8T4d4vItT_MIvfJhaAGYLgzijWpF__XesGr/s320/couv-magasin.jpg" width="186" /></a></div>
<span style="font-size: small;"><span style="font-family: Arial Narrow;"><br /></span></span><br />
<ul style="font-family: Arial,Helvetica,sans-serif;">
<li><span style="font-size: small;"><a href="http://aencrages.blogspot.fr/2012/05/le-chant-de-la-contrescarpe.html">Le Magasin de Curiosités de Jean-Daniel Dupuy chez Aencrages & Co dans leur collection Récit, dont je vous recommande la visite au plus haut point</a></span></li>
</ul>edwoodhttp://www.blogger.com/profile/01713248479216797340noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5936397440233615254.post-11494787385904387482012-02-29T21:47:00.002+01:002012-02-29T21:47:39.352+01:00A suivre: Docteur Pasavento ou l'art de la disparition<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhzwOJPGLc1d_GOinWo6h62BRiwX55493a2nlcZRdTd39DfUxr28rdKW2eeT2dXAxNryVaayTux_00L4DB8ne4y-d0fKly_fQCC9l1VuauTGhR0GyWYpFjQVTEfOCq-TVxEKfJ1vj8g1nJ0/s1600/Vila+Matas.jpeg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhzwOJPGLc1d_GOinWo6h62BRiwX55493a2nlcZRdTd39DfUxr28rdKW2eeT2dXAxNryVaayTux_00L4DB8ne4y-d0fKly_fQCC9l1VuauTGhR0GyWYpFjQVTEfOCq-TVxEKfJ1vj8g1nJ0/s400/Vila+Matas.jpeg" width="299" /></a></div>
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Epuisé, le Docteur Passavento avait littéralement disparu des librairies.<br />
A force d'abnégation, après avoir écumé les cabinets de curiosités les plus loufoques, consulté les bibliothécaires les plus érudits, harcelé les collectionneurs les plus irréductibles, j'ai enfin retrouvé sa trace au milieu de nulle part. Le voile sera levé très bientôt.edwoodhttp://www.blogger.com/profile/01713248479216797340noreply@blogger.com1tag:blogger.com,1999:blog-5936397440233615254.post-72539993777226866702012-01-01T13:02:00.000+01:002012-01-01T13:13:54.855+01:00Liquide: la mémoire au fil de l'eau<br />
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<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg3PNfZ0VX1vosQPEUvAd2qrJnHL_OtgPD-jWVwlZ3nkkv810Aecd7nRTDBCUkkYuQpQF0EHDUcn7pJ6i_N9rX_Z5SuYjjrQKMg6KpOxDwTNbD5XZhOc6JhsuIb1L23mATQ0qiTgaLyCnsS/s1600/Photographie+de+Matthieu+Dupont.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="265" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg3PNfZ0VX1vosQPEUvAd2qrJnHL_OtgPD-jWVwlZ3nkkv810Aecd7nRTDBCUkkYuQpQF0EHDUcn7pJ6i_N9rX_Z5SuYjjrQKMg6KpOxDwTNbD5XZhOc6JhsuIb1L23mATQ0qiTgaLyCnsS/s400/Photographie+de+Matthieu+Dupont.jpg" width="400" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Photographie de Matthieu Dupont</td></tr>
</tbody></table>
<br />
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C'est au fil du temps, d'une nécessaire introspection que certaines scènes de l'existence - apparemment banales, a priori sans importances - peuvent révéler tout leur sens. Les détails occultés et les petits rien négligés sur le bas-côté de la vie - la couleur du papier peint, un évier jonché de vaisselles, le tintement d'un glaçon, ressurgissent parfois avec une intensité proportionnelle à la faculté de se laisser emporter par le courant des souvenirs. Pourtant, en apparence, le passé demeure, ni plus ni moins tel qu'il était à l'époque. Mais seulement voilà, le regard s'est doté d'une acuité nouvelle qui lui permet désormais de percevoir la signification cachée derrière ces instantanés qui sont devenus des révélations. Est-ce le fruit du hasard si celui-ci se porte vers la surface du fleuve qui lui fait face, s'agit-il en fin de compte d'une réflexion mûrement réfléchie amenant l'homme à se pencher sur les brindilles qui oscillent au rythme du fleuve qui les conduit? Les sens qui captent le flux incessant de la nature, sont-ils tout à fait innocents dans cette réminiscence impromptue? Après tout, quels sont les mécanismes qui orientent la mémoire vers telle ou telle direction? Qu'est-ce qui l'amène à s'attarder ici ou là, dans les failles les plus secrètes de notre passé, à dessiner telle ou telle trajectoire improbable, tandis qu'elle pourrait dériver partout ailleurs? <br />
<u><i>Liquide</i></u> de <b>Philippe Annocque</b> ressemble à une sorte de roman réflexif qui se déploie au fil de l'eau. La narration lancinante, fidèle au tempo de la mémoire du narrateur, est faite de circonvolutions, d'apartés, de variations, de contrepoints, de fugues, de va-et-vient. Dire qu'il n'y a qu'un seul et même personnage tout au long du récit - au même titre, qu'il n'y a qu'un seul et même auteur derrière chacune des oeuvres de Philippe Annocque - ne serait pas tout à fait juste. En effet, de façon presque imperceptible, éminemment progressive, celui-ci met en scène la rencontre d'un homme d'âge mûr et de celui qu'il était alors, identique et différent à tout moment. Le troisième personnage - et pas des moindres - celui sans qui ce rendez-vous serait compromis, n'est personne d'autre que l'élément liquide irriguant la mémoire. Se livrer à lui - un livre n'est-il pas une confession de notre condition, une sublimation de notre état terre à terre - offre les conditions propices à la plongée entre deux dimensions d'un individu, celle qui vit, et celle qui prend conscience.<br />
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<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjWwL8XlMwR1pSlkPdJNrKAZnf0PRBnTVgNEbC4kLrZjU08ak1YkS_pWpRUvmKngtRa0-29An168AfCggX7bczRjljkQ56A3fl37lf7aA-5DtPfo4ojzujTlLpluhtkAYeHP_DtMFtnHMTh/s1600/Couv_Liquide.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjWwL8XlMwR1pSlkPdJNrKAZnf0PRBnTVgNEbC4kLrZjU08ak1YkS_pWpRUvmKngtRa0-29An168AfCggX7bczRjljkQ56A3fl37lf7aA-5DtPfo4ojzujTlLpluhtkAYeHP_DtMFtnHMTh/s320/Couv_Liquide.jpg" width="223" /></a></div>
A parcourir: <a href="http://www.quidamediteur.com/NewFiles/livres/Liquide.html">Liquide de Philippe Annocque chez Quidam Editeur (2009)</a><br />
<ul>
<li><a href="http://la-marche-aux-pages.blogspot.com/2010/10/philippe-annocque-au-pied-de-la-langue.html">Du même auteur (enfin paraît-il), Monsieur Le Comte (à prendre ou pas d'ailleurs) au Pied de la lettre dont on parle avec majesté dans la marche aux pages</a></li>
<li>Pour découvrir, une autre facette de la personnalité de Philippe Annocque, il est aussi possible de jeter un oeil à ses <a href="http://hublots.over-blog.com/">hublots</a></li>
</ul>edwoodhttp://www.blogger.com/profile/01713248479216797340noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5936397440233615254.post-90881835746842989982011-10-07T09:48:00.000+02:002011-10-07T09:48:11.317+02:00A l'Ombre des forêts, au coeur du désespoir<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh6UUoDfQjJimgiPkM9qKOHluzD5caRjRzWBmoQZTqLwYbdTOsEMBLcFf0O8vd1NtW3iuwxjaYZ_-f7skeq3UOdsBcBS79hSzVr1TZTegSo7McAERSz_rg7xCzXwHLYtDCy9r_hiZC54Qke/s1600/goya-gravure.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="273" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh6UUoDfQjJimgiPkM9qKOHluzD5caRjRzWBmoQZTqLwYbdTOsEMBLcFf0O8vd1NtW3iuwxjaYZ_-f7skeq3UOdsBcBS79hSzVr1TZTegSo7McAERSz_rg7xCzXwHLYtDCy9r_hiZC54Qke/s400/goya-gravure.jpg" width="400" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Gravure de Francisco Goya</td></tr>
</tbody></table><br />
Errer sans fin pour trouver un sens à la vie, telle est la quête obstinée des personnages qui parcourent les oeuvres de Jean-Pierre Martinet.<br />
Dans <u><i>L'Ombre des forêts</i></u>, le dernier roman du natif de Libourne, c'est au destin croisé de Céleste, Monsieur, et de Rose Poussière auquel nous sommes confrontés. Cependant, à Rowena, ville fantôme à peine esquissée située à la frontière franco-allemande, les hommes se côtoient mais ne se voient pas. Ils aimeraient exister, mais ce droit leur est constamment refusé. <br />
Si Céleste est au service de Monsieur, elle n'a jamais le plaisir de recevoir les ordres et autres directives qui pourraient lui octroyer une certaine forme d'importance au sein de la demeure. <br />
Au triste sort qui lui est réservé, elle prendrait davantage de plaisir au rôle de martyre. Ainsi, envisage-t-elle de subir son assassinat perpétré par Monsieur:<br />
<blockquote><i>"Tout serait fini. Elle ne resterait plus là, aussi inutile qu'un objet au rebut ou un vieillard tremblotant dans un hospice, à guetter vainement, des heures durant, parfois même des journées entières, un signe de vie, une voix, rien qu'une voix humaine, intimant des ordres, même absurdes, mais des ordres comme en reçoivent tous les domestiques depuis des siècles et des siècles."</i></blockquote>Monsieur, quant à lui, se sent vivant lorsqu'il décachette le courrier des précédents locataires, désormais disparus, lui donnant ainsi l'impression d'habiter à la fois notre monde et celui des défunts. Pour ne pas voir sa domestique, il évite scrupuleusement d'emprunter l'accès principal. Chez Martinet, c'est dans la proximité avec ses congénères que la solitude s'établit. Amère palliatif de ces ténèbres sans fond, Globe Sale, éclaire sans discontinuer la chambre de Monsieur, lui donnant le sentiment d'avoir un compagnon à ses côtés, avec ses états d'âmes, ses caprices et son emprise sur sa vie intérieure.<br />
Rose Poussière a quant à elle élu domicile dans un hôtel mal famé, au nom de Saratoga. Jadis, elle s'appelait Edwina Steiner, avant d'avoir réchappé aux camps de concentrations. Enfin, elle en est persuadée, même si personne ici ne croit un traître mot à ses sornettes. A l'abri des regards et des tourmentes du ciel, elle aimerait vivre, emportant toujours son parapluie avec elle.<br />
Quand l'un des membres de ce trio met les pieds dehors, c'est à un ballet fantasmagorique auquel nous assistons, composé d'ombres chinoises qui se découpent aux fenêtres, de figures macabres fouillant au sein des poubelles pour dresser une collection de bas, de soupirants donnant des rendez-vous imaginaires, ou même de voix venant de nulle part. Thelonious Monk et son <i>Crepuscule with Nellie</i> n'est jamais très loin des oreilles de Monsieur.<br />
Les pantins qui parcourent l'Ombre des forêts, naviguant entre songe et paranoïa, ressemblent à s'y méprendre à un Peuple des miroirs, titre repris pour le <a href="http://www.finitude.fr/extraits%20pdf/Bon%20souscription%20Peuple%20des%20miroirs.pdf">recueil </a>de textes critiques de Jean-Pierre Martinet, réédité l'année passée chez France-Univers. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si ces derniers se réfugient parfois dans leur propre reflet afin de prendre conscience de leur existence. Comme la négation de la vie est pire que la moindre des péripéties, de l'acte le plus atroce, Monsieur fantasme sur une vie de tueur en série qui ferait la une des journaux, rêvant de voir apparaître son visage en première page des gazettes. Pour inaugurer sa piètre carrière, il n'hésitera pas à abattre un chien qui ne demandait pas son reste. Vivre quelque chose, peu importe quoi, mais au moins, avoir le sentiment d'être quelqu'un, de palpiter, de chavirer, d'être emporté quelque part, peu importe la destination, que ce soit ici ou là, le paradis ou l'enfer, la terre ou le ciel. "Emportez tout, mais laissez-moi l'extase" comme disait Emily Dickinson.<br />
<br />
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<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhMGbAOPSNE9JHDUaytFGaO2Oa4UJQzZnv3Dg5LIdN8Vw8kZkh6OHqM33BksKVc-p6qqObp030_DGYVG4INRZU72QYADVRa8iqIgCbasPEXDQJl21g7WXkWw0mZ_2KkOcqda7vqxSDwcnLU/s1600/Couv_L%2527ombre+des+for%25C3%25AAts.gif" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhMGbAOPSNE9JHDUaytFGaO2Oa4UJQzZnv3Dg5LIdN8Vw8kZkh6OHqM33BksKVc-p6qqObp030_DGYVG4INRZU72QYADVRa8iqIgCbasPEXDQJl21g7WXkWw0mZ_2KkOcqda7vqxSDwcnLU/s320/Couv_L%2527ombre+des+for%25C3%25AAts.gif" width="196" /></a></div><br />
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<ul><li>A découvrir: <a href="http://www.editionslatableronde.fr/ouvrage.php?id_ouv=I23086">L'Ombre des forêts de Jean-Pierre Martinet, réédité en poche en 2008, par les éditions de La Table ronde, dans sa collection La Petite vermillon</a></li>
</ul>edwoodhttp://www.blogger.com/profile/01713248479216797340noreply@blogger.com5Suisse46.818188 8.227511999999933345.8229575 5.9593819999999331 47.8134185 10.495641999999933tag:blogger.com,1999:blog-5936397440233615254.post-44172968864018818012011-06-11T14:19:00.000+02:002011-06-11T14:19:46.672+02:00Les peurs allusives de Pierre Jourde<div><br />
</div><table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiU5kyMg49hI3wrXnSr2Y9t1KweK4rrqhd6e-IN6xhaJGSvWsNk8HUwhCfQfY7pG2gwuDJ99l4VXjoeyBKch0FUvPb-borTYqXyHMJBYBusclTKoaTzepfRsGgoR1uE6RPRMfVGaXr9u-hK/s1600/Le+golem.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiU5kyMg49hI3wrXnSr2Y9t1KweK4rrqhd6e-IN6xhaJGSvWsNk8HUwhCfQfY7pG2gwuDJ99l4VXjoeyBKch0FUvPb-borTYqXyHMJBYBusclTKoaTzepfRsGgoR1uE6RPRMfVGaXr9u-hK/s400/Le+golem.jpg" width="291" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Le Golem, photographie de<a href="http://damienmassart.aminus3.com/portfolio/49.html"> Damien Massart</a></td></tr>
</tbody></table><div><br />
</div><br />
<span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">Les Allusifs inaugurent une nouvelle collection d'ouvrages de petit format abordant les peurs sous leurs formes les plus diverses. Si l'on connaît essentiellement l'écrivain français <b>Pierre Jourde</b> pour ses essais critiques, dont <i><u><a href="http://www.lmda.net/din/tit_lmda.php?Id=12929">La Littérature sans estomac</a></u></i> est l'une des pièces les plus marquantes, La Présence- ayant vu le jour en mars dernier- nous présente une facette fort intrigante de son oeuvre. </span><br />
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Un homme revient dans la maison de son enfance, nichée dans un minuscule village au fin fond de l'Auvergne. Désormais laissée à l'abandon, la bâtisse fait désormais figure de capharnaüm où les objets au rebut amassés au fil des décennies témoignent de l'absence des personnes auxquels ils sont associés. La bêche ou la casquette, prolongements des mains ou de la tête du travailleur sont les témoins discrets d'une absence habitée.<div>Ainsi, loin de rassurer, l'inertie de ces reliques perpétue un silence pesant qui, la nuit tombée, devient une oppression de tous les instants, laissant la porte ouverte à l'imagination la plus vagabondante. Les chaises désormais délaissées appellent à leur suite tout un cortège de revenants, les cloisons et les serrures suscitent la pression des spectres qui souhaitent réinvestir la demeure calfeutrée. Les placards quant à eux rappellent les apparitions clownesques de l'enfance, avec tout le lot d'imprévisibilités qu'elles éveillent et à travers l'image de défiguration de l'humanité qu'elles incarnent. Par son absence de repères, la nuit suggère une infinité de présences incapables de se matérialiser tout à fait, et qui sont pour cette raison d'autant plus redoutables. <div><blockquote><i>« Plus j'allais profond, plus la raison et la vie sociale me paraissent éloignées. Je me livrais à la sauvagerie et aux prodiges. Il ne s'agissait pas exactement de surnaturel, ni de croire que pouvaient se produire des choses impossibles dans ce monde ordinaire que je laissais derrière moi. Il s'agissait plutôt d'une sorte de suspension, comme lorsqu'on lit un roman. Au fond de la forêt, le monde se dépouillait progressivement de ce que l'on a coutume de nommer la réalité. Il se mettait entre parenthèses. L'impossibilité devenait son état ordinaire, sa substance. » </i></blockquote>En pénétrant les entrailles de la forêt qui avoisine la maison familiale, le narrateur tente d'effectuer à rebours le parcours de son enfance, d'approcher de nouveau les témoins du passé pour s'infiltrer dans les interstices du temps. Cette activité diurne lui permet aussi en quelque sorte d'exorciser les présences impalpables qui, la nuit durant, le confrontent aux peurs les plus enracinées dans son esprit. Tandis que dans l'obscurité, la présence se manifeste par son absence même, par son activité insidieuse, par l'obligation sous-jacente de lui donner vie, elle se veut ici moins terrorisante dans la mesure où elle doit subir la démarche d'un homme qui part à sa rencontre. D'espionne des ténèbres, elle devient sujet dépouillé de sa terrifiante invisibilité.<br />
<br />
La langue gracile de Pierre Jourde sonde les présences dans leur insaisissable pouvoir d'attraction. Il mène au cours de son texte une réflexion indéniablement passionnante sur le processus de réactions suscitées par des situations inquiétantes, dans le silence et la solitude les plus totales. On reste captivé d'un bout à l'autre du récit par cette faculté d'exprimer l'innommable, de faire ressurgir des impressions si étranges et qui pourtant nous sont si familières, de démontrer à quel point les objets peuvent catalyser la peur et faire participer notre inconscient. </div><div><br />
</div><div><br />
</div><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEirVOsJqPVk9LOcS2Nj68AwazX5AnfC8yCkmoDFNYIsbOkrAKqp98sYJseQXqpJ8oPQxq93coEjzGMvs7cTcnHsW-RbFwqn4RE2ndCJ6oPyjudCAaYaKSFN860EWHfbkkelTq_qBgpjUtRU/s1600/Couv_La+Pr%25C3%25A9sence.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEirVOsJqPVk9LOcS2Nj68AwazX5AnfC8yCkmoDFNYIsbOkrAKqp98sYJseQXqpJ8oPQxq93coEjzGMvs7cTcnHsW-RbFwqn4RE2ndCJ6oPyjudCAaYaKSFN860EWHfbkkelTq_qBgpjUtRU/s320/Couv_La+Pr%25C3%25A9sence.jpg" width="225" /></a></div><div><br />
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<ul><li><a href="http://www.lesallusifs.com/livres/livre.php?id=lp001">A découvrir: La Présence de Pierre Jourde aux éditions Les Allusifs </a></li>
<li><a href="http://membrane.tumblr.com/post/5729598556/pierre-jourde-la-presence-les-allusifs-2011">La chronique de Romain Verger</a></li>
</ul><br />
</div></div>edwoodhttp://www.blogger.com/profile/01713248479216797340noreply@blogger.com11tag:blogger.com,1999:blog-5936397440233615254.post-24169731567448706562011-06-04T12:49:00.004+02:002011-06-04T12:55:48.012+02:00Au fil de la marche: Moo Pak<div style="margin-bottom: 0cm;"><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg77vSzAtV3kreu8pGo3ICzljU8hgkXDnQXoHG14AaneLDVoNKo_9XNlMpAP21tqa09EekVNfYuuCfZ4eiyIOhlIht7ZUHv1eawhJpjI4VZIa43RXloZpBZR-zlPdWp6bvO4q-w96GA1PXZ/s1600/moor_park_river_original.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="226" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg77vSzAtV3kreu8pGo3ICzljU8hgkXDnQXoHG14AaneLDVoNKo_9XNlMpAP21tqa09EekVNfYuuCfZ4eiyIOhlIht7ZUHv1eawhJpjI4VZIa43RXloZpBZR-zlPdWp6bvO4q-w96GA1PXZ/s320/moor_park_river_original.jpg" width="320" /></a></div><br />
A travers la marche, certains auteurs, de <b>Jean-Jacques Rousseau</b> à <b>Robert </b><b>Walser</b>, ont accouché de la plupart des pages de leur oeuvre. Plus près de nous, l'Argentin <b>Sergio</b><b> </b><b>Chejfec</b> mène dans <a href="http://escalier-des-aveugles.blogspot.com/2011/04/les-deux-mondes-du-marcheur.html">Mes deux mondes</a> un retour à cette perspective euphorisante. Si son rythme, calqué sur celui de l'écriture, est propice à l'activation des forces motrices de la création, la proximité avec le monde qui l'entoure, semble être une source de laquelle à tout instant l'artiste peut puiser sans modération. Elle est en quelque sorte régulatrice du décalage énergétique que l'on peut trouver entre le corps et l'esprit, une manière de remédier à l'inertie d'un corps obstinément installé devant sa table de travail.</div><div style="margin-bottom: 0cm;"><br />
</div><div style="margin-bottom: 0cm;"><blockquote><i>« En conséquence l'association d'une promenade et d'un ami à qui parler n'est pas seulement précieuse, pour quelqu'un comme moi elle est essentielle, disait-il, pour toi c'est une distraction agréable mais pour moi c'est essentiel, diverses promenades avec divers amis, selon la saison et le jour, selon l'état de mon travail et mon humeur du moment. »</i></blockquote></div><div style="margin-bottom: 0cm;"><br />
</div><div style="margin-bottom: 0cm;">A la différence de la plupart de ses confrères écrivains-marcheurs, <b>Gabriel</b><b> </b><b>Josipovici</b> n'envisage pas la marche comme une activité solitaire, mais bien plutôt comme une conversation permettant de se soulager de la concentration inhérente au travail d'écriture, mais pas seulement. Moo Pak est un long témoignage de ces promenades incessantes de longues années durant, à travers les endroits préservés de l'agitation londonienne, sobrement rapportées à la troisième personne par Damien Anderson, l'ami de Jack Toledano, immigré juif egyptien. Ce n'est pas un hasard si le récit débute par un questionnement quant à l'outil approprié pour mettre en forme le fruit de son travail, celui qui permet de retrouver la pulsation interne de l'écriture, son évolution, avec ses doutes, ses ratures et rectifications. Le degré d'efficacité de l'outil serait plus ou moins proportionnel à son niveau d'effacement.<br />
Insensiblement, au gré de la déambulation, du décor qui se déploie, la réflexion se modifie, non sans graviter de façon continue autour du thème de la création et les conditions qui permettent à l'auteur de s'épanouir. Si l'enjeu du dialogue semble être de nature philosophique, son expression est dénuée de lourdeur ou d'ostentation, le lecteur étant toujours très libre de naviguer d'un point de vue à l'autre, de s'écarter ou bien de se rapprocher de telle ou telle opinion. Cette façon de procéder permet en somme au lecteur de s'immerger au plus près de ce vagabond qu'est Jack Toledano, dans la mesure où celui-ci retrouve, par sa légèreté, son absence d'entraves, les sensations et l'état d'esprit du marcheur. <br />
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<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi97b70h-oUaYX8wNirAnXzQXr79tuy8SSZkXMu1VgliK-Zp6ghaAkGejzcQFQaEXwrEkMbknOs5NG0pRqfAiQIkak2SUSGdOJDilIfLTibbOhAzxygvsC3jMidW_SOHnyPN9GPcABDnPtE/s1600/Moor+Park.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi97b70h-oUaYX8wNirAnXzQXr79tuy8SSZkXMu1VgliK-Zp6ghaAkGejzcQFQaEXwrEkMbknOs5NG0pRqfAiQIkak2SUSGdOJDilIfLTibbOhAzxygvsC3jMidW_SOHnyPN9GPcABDnPtE/s320/Moor+Park.jpg" width="320" /></a></div><br />
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</div><div style="margin-bottom: 0cm;">Petit à petit, apparaît le motif originel de ces vagabondages, l'oeuvre en gestation de Jack Toledano, Moo Pak, en référence au vieux manoir( Moor Park) qui abrita jadis <b>Jonathan</b><b> </b><b>Swift</b> ( où il écrira son <i><u><a href="http://books.google.com/books?id=H7gFAAAAQAAJ&printsec=frontcover&hl=fr&source=gbs_ge_summary_r&cad=0#v=onepage&q&f=false">Conte du tonneau</a></u></i>) une partie de sa vie, et qui servit aussi d'asile d'aliénés, de centre de décodage durant le seconde guerre mondiale ou d'institut dédié à l'étude du langage chez les primates, et enfin une école où un jeune illétré s'efforce d'écrire "l'istoir de Moo Pak".</div><div style="margin-bottom: 0cm;">Cette thématique du langage prend peu à peu le pas au fil des marches. Peut-on décemment envisager la parole comme une amélioration majeure dans notre mode de communication, ou bien plutôt comme une redoutable dégradation, mettant en lumière la pernicieuse complexité de l'être humain, compte-tenu de sa laborieuse quête du bonheur qui est à mettre en parallèle avec la facilité d'auto-satisfaction que peut obtenir un primate ou un animal d'une autre espèce? Tandis que Jack Toledano clame haut et fort son amour et son besoin d'être accompagné en permanence par un certain nombre d'auteurs qui lui sont chers-<b> Jonathan Swift, Thomas Bernhard, Kafka</b> en tête- il va finir par nous déconcerter en prenant une attitude délibérément sceptique. En remettant en cause la sacro-sainte écriture, ou l'expression artistique en générale, qui a pourtant tendance à être considérée comme l'excellence, le nec plus ultra de ce dont est capable l'homme, Jack Toledano met en lumière le besoin d'art qui découle d'une manière ou d'une autre d'une incapacité fondamentale à se satisfaire, à la manière des animaux, de ce que la nature et le quotidien nous apportent, de se contenter d'un fruit accessible, au lieu de tenter de braver l'impossible et de rechercher ce qui est hors de portée.<br />
A quoi bon passer tant d'années à s'efforcer d'écrire un livre insignifiant, qui n'aura de toute façon jamais sa place ici-bas? Le récit de ces innombrables promenades racontées par son ami n'est-elle pas après tout l'oeuvre la plus pertinente qu'il pouvait offrir? Telle sont des questions, parmi d'autres, que l'on peut se poser à la lecture de ce livre profond.</div><div style="margin-bottom: 0cm;"><br />
</div><div style="margin-bottom: 0cm;"><blockquote><i>« Une phrase par an, dit-il, nous devrions rationner les écrivains à une phrase par an, et peut-être </i><i>qu'ainsi</i><i> nous obtiendrions quelques phrases intéressantes, et le public des lecteurs pourrait lire ces phrases avec toute l'attention qu'elles demanderaient sans doute. »</i></blockquote></div><div style="margin-bottom: 0cm;"><br />
</div><div style="margin-bottom: 0cm;">Selon Jack Toledano, les livres ne doivent pas imposer un point de vue mais doivent nécessairement faire douter le lecteur, le remettre en question. C'est ainsi que celui de Moo Pak flâne au fil des pages, qu'il chemine entre les terres sauvages( suscitées par le mot Moor signifiant « lande ») de son imagination et les espaces cloisonnés ( en référence à la notion de « parc ») aménagés par l'humanité, avec une jubilation certaine.<br />
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<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEihL_5cl_f0K9tFje-0JoApedB5BcsXFWOgHPZMzuVKTsNYzOBpLFAh0qOVvxnELcX_PHtDrT1dHfQNs0MbJk8D3rTe1beZGJPYWzZaKVdOU8oX74F8q4763B4ToMYOTmSB8WQwmodbXlfn/s1600/Couv_Moo+Pak.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEihL_5cl_f0K9tFje-0JoApedB5BcsXFWOgHPZMzuVKTsNYzOBpLFAh0qOVvxnELcX_PHtDrT1dHfQNs0MbJk8D3rTe1beZGJPYWzZaKVdOU8oX74F8q4763B4ToMYOTmSB8WQwmodbXlfn/s1600/Couv_Moo+Pak.jpg" /></a></div><br />
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<ul><li>A lire: <a href="http://www.quidamediteur.com/NewFiles/livres/MooPak.html">Moo Pak de Gabriel Josipovici, traduit de l'anglais par Bernard Hoepffner, disponible depuis quelques mois aux remarquables éditions Quidam</a></li>
<li><a href="http://escalier-des-aveugles.blogspot.com/2011/04/implacable-exageration-implacable.html">La chronique avisée de Guillaume Contré</a></li>
<li><a href="http://blog.paludes.fr/public/Radio9/Josipovici-MooPak-Critique.mp3">La chronique audio de Nikola</a></li>
</ul></div>edwoodhttp://www.blogger.com/profile/01713248479216797340noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5936397440233615254.post-13891367467990144802011-06-02T19:06:00.001+02:002011-06-02T19:14:20.380+02:00Jean-Pierre Martinet, de l'utopie à la bérézina<div><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New',Courier,monospace;"><br />
</span></div><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhy8dSUjOkTtLLh4fO0gDgS9IsLMTWiC-sas5XkID7U4GboAAx2pvTIKuOACOnRMzWzb-J2GrabtflD9IRM2WAYsIiuiKvplf6-POqQZ44BBDzsbROJ42O7Nft9RuOqbVywT9uDBMD6jqvP/s1600/eibel.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhy8dSUjOkTtLLh4fO0gDgS9IsLMTWiC-sas5XkID7U4GboAAx2pvTIKuOACOnRMzWzb-J2GrabtflD9IRM2WAYsIiuiKvplf6-POqQZ44BBDzsbROJ42O7Nft9RuOqbVywT9uDBMD6jqvP/s320/eibel.jpg" width="267" /></a></div><div><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New',Courier,monospace;"><br />
</span></div><div><div class="MsoNormal" style="text-align: justify;"><blockquote>« D’être fatigué, déprimé après la rédaction d’un roman, rien de plus normal : c’est chiant d’écrire, je me rends de plus en plus compte que rien n’est plus pénible et déplaisant. Encore plus quand on a des délais contraignants (mais cela force aussi à travailler, car autrement on a plutôt tendance à ne rien foutre !). C’est vraiment un piège à cons, la littérature : moi, par moments, ça me flanque la nausée, je t’assure (et ce n’est pas de la littérature !). »</blockquote></div><div class="MsoNormal" style="text-align: justify;"> <i style="mso-bidi-font-style: normal;">Lettre de Jean-Pierre Martinet à Alfred Eibel, 15 juin 1987</i>.<br />
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</div><div class="MsoNormal" style="text-align: justify;"><div style="text-align: auto;">Ce constat désabusé, désespéré, est celui de l’auteur de <b style="mso-bidi-font-weight: normal;"><i style="mso-bidi-font-style: normal;">Jérôme</i></b>, roman magistral et stupéfiant qui, dix ans plus tôt, n’a connu qu’un très maigre succès. Jean-Pierre Martinet, depuis quelques années et bien après sa mort, est devenu un auteur culte, révéré par un cercle de lecteurs trop réduit mais enflammé. Son œuvre a été rééditée par les éditions Finitude qui sont également à l’origine de la revue <b style="mso-bidi-font-weight: normal;"><i style="mso-bidi-font-style: normal;">Capharnaüm</i></b> dont le numéro deux( sous-titré <b><i>Sans illusions…)</i></b> paru le 19 mai dernier regroupe une série de lettres envoyé par Jean-Pierre Martinet à son ami <b>Alfred Eibel</b>.</div></div><div class="MsoNormal" style="text-align: justify;">En 1979, date du début de cette correspondance, l’auteur de <b style="mso-bidi-font-weight: normal;"><i style="mso-bidi-font-style: normal;">Jérôme</i></b> et de <b style="mso-bidi-font-weight: normal;"><i style="mso-bidi-font-style: normal;">La Somnolence</i></b>, qui n’a pas pu accomplir une carrière dans le cinéma comme il le souhaitait, est retourné chez sa mère, à Libourne, où il vivote, attendant d’ouvrir à Tours une modeste librairie. Cet exil est volontaire, mais douloureux. Loin de tout, du microcosme littéraire qu’il exècre mais qui continue à l’intéresser prodigieusement, Jean-Pierre Martinet semble cultiver une solitude à la fois désirée et subie. Ces lettres à son ami, témoignage univoque mettant en lumière la cohérence d’un auteur pour qui écrire est une souffrance vitale, révèlent le désenchantement de cet écrivain extraordinaire dont le talent est méconnu – y compris de lui-même. Pourtant, ses colères laissent place parfois à l’enthousiasme. Plutôt que de parler de lui, il se préoccupe des dernières parutions, des revues littéraires dirigées par des amis et relations, il se passionne pour le polar américain – pour <b>Jim Thompson</b> en particulier -, décrit ses expériences de libraire qui vend plus d’exemplaires de Paris-Turf que de romans, y compris médiocres… et cultive cette amitié de manière touchante. Cette correspondance livrée par Alfred Eibel trace le portrait d’un homme pessimiste mais fougueux, à l’humour ravageur, en apparence réactionnaire mais, dans le fond, simplement lucide. Souhaitons que ce numéro 2 de <b style="mso-bidi-font-weight: normal;"><i style="mso-bidi-font-style: normal;">Capharnaüm</i></b> non seulement permette aux admirateurs de l’œuvre de Martinet de découvrir dans ces lettres la sensibilité et l’intelligence d’un homme en révolte permanente, mais encore attire l’attention sur <i><u>Jérôme</u></i>, <i><u>La Somnolence</u></i>, <i><u>Nuits Bleues, calmes bières</u></i>, et sur les autres textes de Jean-Pierre Martinet, aussi génial dans ses romans monumentaux que dans ses œuvres courtes. </div><div class="MsoNormal" style="text-align: justify;"><a href="http://www.finitude.fr/auteurs/eibel.htm">Alfred Eibel</a> a eu la générosité de répondre à nos questions sur son ami disparu mais dont l’œuvre - qui n'a rien perdu de sa fougue, bien au contraire - devrait trouver bien d’autres admirateurs…<br />
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<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhrjN1FkHOBCytspRFIJMxKf93LygwdnijOoIwmtvI0OQoUFyu9RwC6VJPZN62qOZ05RDU-cLLr7t4qvXjd1g5G-ctS7xjJzVGbAr6OMlrN7jo3gkFPmnjx9pEEtfKm1uGiFI66RhKaxsYA/s1600/Rodolphe+Bresdin+Groupe+d%2527arbres+sur+les+rochers.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhrjN1FkHOBCytspRFIJMxKf93LygwdnijOoIwmtvI0OQoUFyu9RwC6VJPZN62qOZ05RDU-cLLr7t4qvXjd1g5G-ctS7xjJzVGbAr6OMlrN7jo3gkFPmnjx9pEEtfKm1uGiFI66RhKaxsYA/s400/Rodolphe+Bresdin+Groupe+d%2527arbres+sur+les+rochers.jpg" width="280" /></a></div><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><br />
</div></div></div><ul><li><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New',Courier,monospace;">Alfred Eibel, tout d'abord, j'aimerais savoir comment avez-vous fait la connaissance de Jean-Pierre Martinet?</span></li>
</ul><div>A.E.: Jean-Pierre Martinet habitait alors rue Scheffer à Paris. Il cherchait à louer un studio moins cher. Le studio en face du mien venait de se libérer. C'est ainsi que nous fûmes voisins de palier. Et c'est ainsi qu'il devint un collaborateur assidu du journal <i><a href="http://fr.wikipedia.org/wiki/Matulu">Matulu</a></i>.</div><div><ul><li><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New',Courier,monospace;">Quel est le premier texte auquel vous avez été confronté? Avez-vous immédiatement repéré en lui un auteur d'exception?</span></li>
</ul><div>A.E.: Ce sont ses articles publiés dans <i>Matulu</i> qui m'ont fait prendre conscience du critique hors pair qu'il était - un passeur, un homme proche de <b>Georges Anex</b> que j'ai bien connu et qui a consacré un article d'une grande pertinence à <a href="http://stalker.hautetfort.com/archive/2009/01/18/l-ombre-des-forets-de-jean-pierre-martinet.html"><i>L'Ombre des forêts</i></a> publié par La Table ronde, article repris dans le volume intitulé<i><u> Le lecteur complice </u></i>de Georges Anex aux éditions Zoé.</div></div><div><ul><li><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New',Courier,monospace;">Comment expliquez-vous la relative méconnaissance de son oeuvre?</span></li>
</ul><div>A.E.: Je persiste à penser que la critique lit certes avec intelligence mais n'éprouve pas ce que l'on devrait éprouver devant une prose forte, une secousse sismique si l'on peut dire. Jean-Pierre Martinet fut un des premiers à avoir saisi la mélancolie de <b>Henri</b><b> </b><b>Calet</b>. Combien sont sensibles à l'oeuvre de <b>Louis </b><b>Calaferte</b>; combien de critiques perdent pied en lisant le poète <b>Jean-Daniel </b><b>Fabre</b> si proche par maints côtés de Jean-Pierre Martinet.<br />
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</div></div><div><div><br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgd-3ZrqBK2WjtM9YgkMbIfkK1k5DqhtGMQS2TGtPQDGCxsKZXKFSMht6sTCq8D1HMsui1kX6ZnB_7j4m59Ed-rWgUkLkhkxQQ6N3JFeY2TyYOqupkry1jSzuSdY2jQQjgrTQKyjfkdWhsd/s1600/paris-souterrain3.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="393" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgd-3ZrqBK2WjtM9YgkMbIfkK1k5DqhtGMQS2TGtPQDGCxsKZXKFSMht6sTCq8D1HMsui1kX6ZnB_7j4m59Ed-rWgUkLkhkxQQ6N3JFeY2TyYOqupkry1jSzuSdY2jQQjgrTQKyjfkdWhsd/s400/paris-souterrain3.jpg" width="400" /></a></div><br />
</div></div><div><ul><li><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New',Courier,monospace;">Dans ses livres, nous sommes confrontés de plein fouet à l'humanité mise à nu, débarrassée de ses faux-semblants coutumiers; un dépouillement qui donne lieu à une vision cauchemardesque suscitant une impression de claustration au sein d'un univers quasi-fantastique, voire fantasmagorique. Comment expliquez-vous ce besoin irrépressible de se convaincre de l'irréalité de notre condition?</span></li>
</ul><div>A.E.: Jean-Pierre Martinet a toujours voulu traverser les apparences( <i><u>La Traversée des apparences</u></i> de <b>Virginia</b><b> </b><b>Woolf</b>). Voir Paris par-delà les apparences. Martinet a éprouvé le délabrement d'une ville, les fissures. La ville imaginée de Jérôme est un mélange de souterrains dostoievskiens, du <i><u>Petersbourg</u></i> de <b>Biely</b> et des fantasmes que peut susciter la station de métro du Châtelet. Il est essentiel de lire <i><u>Les disciples à Saïs</u></i>, <i><u>Hymnes à la nuit</u></i>, <i><u>Journal</u></i> de <b>Novalis</b> dans la version de <a href="http://www.gustave-roud.ch/Vie_de_Gustave_Roud.html"><b>Gustave Roud</b></a> aux éditions Mermod. Mais Martinet s'était également attaché à l'oeuvre du poète autrichien <a href="http://www.espritsnomades.com/sitelitterature/trakl/traklgeorg.html" style="color: blue;"><b>Georg</b><b> </b><b>Trakl</b></a>. Dans un monde où rien ne correspond à ce qu'il rêvait, il n'est pas étonnant qu'à chaque levée du jour il ressentait l'inanité de ce qui l'entourait, la frivolité des gens, leurs misérables ambitions, leur résignation. Soulignons l'intérêt que Jean-Pierre Martinet manifestait pour <i><u>Minuit</u></i> de <b>Julien Green</b>.</div></div><div><ul><li><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New',Courier,monospace;">L'écriture de JPM semble être placée sous le sceau de la malédiction. En effet, dans les lettres qu'il vous a adressées entre 1979 et 1988 (rassemblées dans le n°2 de la revue <i>Capharnaüm</i>) on entrevoit un écrivain impulsif, qui se refuse à manier la langue de bois, s'obstinant à pointer du doigt les fioritures de bon nombre de ses confrères, leurs histoires insipides. Il tire d'ailleurs un constat pour le moins amer: <i>"il n'y a plus aucun combat à mener"</i>. Dans <i><u><a href="http://www.ledilettante.com/fiche-livre.asp?Clef=1052">Ceux qui n'en mènent pas large</a></u></i>, il donne vie à un écrivain raté contraint de jouer les étalons dans un film porno. JPM était-il intimement convaincu que la littérature n'avait absolument plus aucun avenir devant elle? Est-ce pour cela qu'il souhaitait initialement plutôt s'orienter vers le cinéma, qu'il finira par ouvrir un kiosque à Tours, expérience qui lui confirmera que la mise en valeur de la littérature de qualité est peine perdue?</span></li>
</ul><div>A.E.: Il n'y a plus de combats à mener disait-il, de combats en faveur d'une idéologie. Lire ma préface pour comprendre à quel point Jean-Pierre Martinet était proche de <b>Thomas Bernhardt</b>. Il n'aimait guère les écrivains chics, parfumés de vanité, qui ont leur enseigne suspendue au-dessus de leur échoppe; ceux qui avancent déjà un pied dans la postérité; ceux qui ne semblent exister que s'ils se retrouvent entre confrères; ceux qui voudraient qu'on dise d'eux qu'ils sont des stylistes. Martinet voyait la littérature de son temps comme autant de boîtes de corned-beef sortant d'une usine. L'avenir de la littérature? Pour quels lecteurs? S'il avait connu l'oeuvre de<b> Jean-Marc </b><b>Lovay</b> il serait venu lui serrer la main, une main amie. Il aurait fait de même avec le poète <b>Christian </b><b>Bachelin</b>. Ces écrivains ouvrent une brèche dans les habitudes.</div><div>Seule initiative touchant le cinéma. Il a co-écrit avec le poète <b>Yves Martin</b> et l'homme de cinéma<b> Pierre </b><b>Rissient</b> un scénario tiré de <i><u>Ceux qui n'en mènent pas large</u></i> resté à ce jour inédit.</div></div><div><ul><li><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New',Courier,monospace;">Selon vous, comment considérerait-il la littérature d'aujourd'hui? L'abnégation de certains éditeurs confidentiels( citons Finitude qui a eu l'audace de tenter de remettre JPM d'actualité) lui permettrait-il d'envisager une lueur d'espoir, ou bien plutôt persisterait-il dans sa conviction que la littérature est vouée à sa perte?</span></li>
</ul><div>A.E.: Il faut lire<i><u><a href="http://www.lekti-ecriture.com/blogs/alamblog/index.php/post/2009/12/30/Le-Peuple-des-miroirs,-textes-critiques-de-Jean-Pierre-Martinet"> Le peuple des miroirs</a></u></i> de Jean-Pierre Martinet, recueil d'articles publiés par les éditions France-Univers. Il s'est intéressé entre autres à<b> </b><b>Gustave</b><b> </b><b>Roud</b>, à <b>Philippe</b><b> </b><b>Jaccottet</b>, à <b>Rilke</b>, à <b>Caillois</b>, <b>Ernst</b><b> </b><b>Jünger</b> et quelques autres si l'on excepte la brochure consacrée à <b>Albert</b><b> </b><b>t'Serstevens</b>(<span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New',Courier,monospace;"> Note de la taverne: intitulée </span><i><u><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New',Courier,monospace;">Un apostolat d'A. t'Serstevens, misère de l'Utopie</span></u></i><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New',Courier,monospace;">, publié en 1975 par Alfred Eibel</span>). Il a préfacé le théâtre de <b>Jean </b><b>Anouilh</b><b> </b>pour un club livres de Genève, sauf erreur de ma part. Il n'était pas un lecteur de <b>Céline</b>. Il sentait que la galaxie Gutenberg allait connaître des mutations et peut-être même se fissurer.</div></div><div><ul><li><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New',Courier,monospace;">Pourriez-vous nous révéler si les tiroirs de JP Martinet contiennent encore quelques inédits oubliés? </span></li>
</ul><div>A.E.: Il existe encore un gros inédit de Martinet. Mais où peut-il bien se cacher?<br />
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<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjrwcAoljBhT4R40mvePHhpj77sUVsOO8Rnmf7NflB-rNCw7czmFbCLtLDbAuEBCmgWzHtpJ9mAiIdmMaq2av8llNnRvzDBvqJPgzUh9yf98c0fukzvK5uqwes_QWmykHhrOb8aMFBCKFIj/s1600/capha-2.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjrwcAoljBhT4R40mvePHhpj77sUVsOO8Rnmf7NflB-rNCw7czmFbCLtLDbAuEBCmgWzHtpJ9mAiIdmMaq2av8llNnRvzDBvqJPgzUh9yf98c0fukzvK5uqwes_QWmykHhrOb8aMFBCKFIj/s1600/capha-2.jpg" /></a></div><br />
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<ul><li><a href="http://www.finitude.fr/titres/capha2.htm">A découvrir: Numéro 2 de la revue Capharnaüm, éditée par Finitude</a></li>
<li><a href="http://lmda.net/lmda/din2/n_egar.php?Eg=MAT03693">Le monde désaccordé de Jean-Pierre Martinet, article signé Alfred Eibel paru dans le Matricule des anges</a></li>
<li><a href="http://memoirememoires.wordpress.com/">Les chroniques d'Alfred Eibel</a></li>
</ul></div></div><div><br />
</div><div><br />
</div><div>Chronique publiée conjointement ici, dans La Taverne, et <a href="http://annefrancoisekavauvea.blogspot.com/2011/06/jean-pierre-martinet-de-lutopie-la.html">De Seuil en Seuil</a>.</div><div><br />
</div>edwoodhttp://www.blogger.com/profile/01713248479216797340noreply@blogger.com4tag:blogger.com,1999:blog-5936397440233615254.post-59144774627644409772011-05-14T23:45:00.000+02:002011-05-14T23:45:37.282+02:00Un paquebot magnifique au gré des courants<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiARfDZZMOKKPOcchJnJBiIRx5UaP6P4b4u1zPcvEs4MulY0Pqz2C4RUZvdqUeKO5FjHCx2nbhbI7uBGdX7hOFF5WNUBtz_-ljvxF_woXMp_gmqJNK1RGlRFE-bQqrsIGJvCBpHtGn-w6-E/s1600/Entre+ciel+et+mer%252C+Jean-Michel+Kolko.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="262" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiARfDZZMOKKPOcchJnJBiIRx5UaP6P4b4u1zPcvEs4MulY0Pqz2C4RUZvdqUeKO5FjHCx2nbhbI7uBGdX7hOFF5WNUBtz_-ljvxF_woXMp_gmqJNK1RGlRFE-bQqrsIGJvCBpHtGn-w6-E/s400/Entre+ciel+et+mer%252C+Jean-Michel+Kolko.jpg" width="400" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Photographie de <a href="http://photojimk.wordpress.com/">Jean-Michel Kolko</a></td></tr>
</tbody></table><div><br />
</div><div>Il n'y pas d'histoire à proprement parler, il n'y a que des bribes de souvenirs qui remontent à la surface de façon aléatoire dans le ciel tourmenté des grands espaces de la mémoire. Indomptable est l'océan, imprévisibles sont les pensées. Entre le ciel et la mer, deux abîmes qui nous attirent, les points de mire de notre destin, un paquebot magnifique se laisse ballotter par la houle, et porter par l'humeur de ses passagers. Dépourvu de capitaine, de maître d'équipage, de repères tout simplement,</div><blockquote>« On navigue sans but mais peut-être suit-on des chemins qui nous aspirent. »</blockquote><div>Immuable le décor, infinies ses variations. On se surprend à plonger au fond des éléments, à déceler leurs nuances et fluctuations, à dessiner du regard leur cheminement capricieux, à trouver sa voie au milieu de tout cela. On reste médusé par le pouvoir d'attraction de ces choses qui nous dépassent et qui inspirent le respect. Parfois, l'appel du large est trop puissant et on se laisse alors- jouissive soumission- entraîner au sein de cette béance matricielle, engloutir au cœur de l'abysse, pour y rejoindre les créatures qui y habitent depuis la nuit des temps. Un instant durant, l'écho d'une complainte se fait entendre, un mythe ressurgit et des émotions primitives déferlent sur les uns et les autres.<br />
<br />
Il n'y a pas d'histoire à proprement parler, il n'y a que des passés à explorer, des torrents d'images à apprivoiser, des routes à serpenter. Notre vie est une mer déchaînée à laquelle nous sommes confrontés dès le plus jeune âge. A sa merci, sans bouée de sauvetage, nous devons nous débattre contre vents et marées. Accepter d'être ici sans pourtant avoir la certitude de ne pas simultanément être là, vivre incessamment le flux et reflux des instantanés de notre existence, de réminiscences ancestrales, sans pour autant être capable d'en maîtriser l'intensité.</div><div><b>Joël Roussiez</b>, peintre minutieux du monde marin, conteur hors pair, passant insensiblement d'un registre à l'autre, parvient avec une redoutable efficacité à marier les mots afin de leur insuffler un mouvement de balancier qui transporte le lecteur à bord d'<i><u>Un Paquebot magnifique</u></i>.</div><div><br />
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</div><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"></div><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj0RPKjX4-j7mw2ooCG80ulBjb0JCYzo28sj88pc8-guL-YAtVSQ3djIPrTegogHmGLlLq_NdBPksnCvbQpskN9K6BELttwYkfWm9Q8ymx3oCZM402Cc8-dwMGKy9KtXRESbdRHxbfC-KzM/s1600/Couv_+Un+paquebot+magn..jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj0RPKjX4-j7mw2ooCG80ulBjb0JCYzo28sj88pc8-guL-YAtVSQ3djIPrTegogHmGLlLq_NdBPksnCvbQpskN9K6BELttwYkfWm9Q8ymx3oCZM402Cc8-dwMGKy9KtXRESbdRHxbfC-KzM/s200/Couv_+Un+paquebot+magn..jpg" width="150" /></a></div><div><br />
</div><ul><li>A lire: <a href="http://www.larumeurlibre.fr/fr/livres/collections/la_bibliotheque/un_paquebot_magnifique">Un Paquebot Magnifique de Joël Roussiez chez La Rumeur Libre, paru en mars dernier.</a></li>
<li><a href="http://membrane.tumblr.com/post/5140002686/joel-roussiez-un-paquebot-magnifique-la-rumeur">Romain Verger en parle sur membrane</a></li>
<li><a href="http://roussiez.pagesperso-orange.fr/">Le site de l'auteur</a></li>
</ul></div>edwoodhttp://www.blogger.com/profile/01713248479216797340noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5936397440233615254.post-80762205837081375052011-05-05T13:37:00.001+02:002011-05-14T13:36:00.273+02:00Thierry Aué détraque l'horloge interne de notre vie quotidienne<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"></div><table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi4fomgwiFP-K56H0cvJ9TGHKRHeBZsQ1MExWIiZQbHMrbWEeQrRp4RV3ROJpSZBESAZX-kx2Rrquzbs4XrWhwkKgiKvbHjIOwYpUJ9EhgmQkVGOgY-tQsOiri9oELiEF1NKMk_xHAq-EaQ/s1600/Magritte%252C+La+dur%25C3%25A9e+poignard%25C3%25A9e.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi4fomgwiFP-K56H0cvJ9TGHKRHeBZsQ1MExWIiZQbHMrbWEeQrRp4RV3ROJpSZBESAZX-kx2Rrquzbs4XrWhwkKgiKvbHjIOwYpUJ9EhgmQkVGOgY-tQsOiri9oELiEF1NKMk_xHAq-EaQ/s400/Magritte%252C+La+dur%25C3%25A9e+poignard%25C3%25A9e.jpg" width="265" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;"><i>La durée poignardée</i>, huile sur toile de <b>René Magritte</b>( 1938)</td></tr>
</tbody></table><span class="Apple-style-span" style="color: #666666; font-family: Arial, Helvetica, 'sans serif'; font-size: small;"><span class="Apple-style-span" style="font-size: 12px;"><br />
</span></span><br />
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<span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">Cela fait presque un an jour pour jour que <i><u>L'Homme de trop</u></i>, la première publication de <b>Thierry Aué</b> à <i>La Dernière goutte</i> pointait le bout de son nez, à croire que le bonhomme est doté d'une précision d'horloger.</span><br />
<span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;"><br />
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<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"></div><blockquote>"C'est alors qu'une idée en apparence absurde occupa mon esprit. Plutôt qu'une idée, un sentiment louche, une intuition. Un de ces sentiments anonymes qui frappent d'abord timidement à la porte de la conscience puis menacent de la faire sauter si vous ne la leur ouvrez pas dans les cinq secondes. Quelque chose a changé, me dis-je oui, rien n'est plus comme avant. Bien que tout me parût à sa place, le sentiment d'étrangeté persistait, j'avais le sentiment qu'il suffisait de gratter un peu la surface, de souffler sur la couche de poussière pour voir apparaître quelque chose."( extrait de Disparition)</blockquote><br />
Si par hasard, le quotidien vous interpelle par ses faux-semblants de monotonie, qu'il vous subjugue par son silence qui en dit infiniment plus long que la réplique la plus éloquente de la planète, alors le dernier recueil de Thierry Aué est peut-être fait pour vous.<br />
Dans la mesure où l'on y prête un tant soit peu attention, où l'on fait preuve d'un minimum d'acuité dans l'observation de la routine, il devient alors possible de déceler le grain de poussière qui s'est immiscé dans notre environnement familier, celui qui est susceptible de faire dérailler le train-train quotidien de ses rails bien lustrés. Démonter les rouages de notre vie de tous les jours afin d'en court-circuiter l'implacable engrenage. Ainsi se présente, sinon la mission, du moins l'intention de ces quelques textes courts de tailles aléatoires, sans prétention, égrenés dans le sens inverse des aiguilles d'une montre par <i>L'Horloge au pays du Levant.</i> La nouvelle éponyme ouvrant le recueil, allusion à la question que se pose le narrateur, pendant sa lecture d'une nouvelle de Abé Kôbô, au sujet de l'équivalent éventuel de l'onomatopée tic-tac que font les horloges au Japon, donne déjà le ton de ce qui se présentera au cours du recueil.<br />
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<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhuEyB2TM7RqTMb_DDKIqdifFmV0tjl0hBzC7nGihzvU0IJyBPMJ4HeA4UyFVnYShNxfxAvqjKj74A0voNIlmnsgYMULRkCC_ESor0ptMzYeVpsIfYSSJkH0sD2-9LejYuikBID3MHxLjYA/s1600/Magritte+le+fils+de+l%2527homme.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhuEyB2TM7RqTMb_DDKIqdifFmV0tjl0hBzC7nGihzvU0IJyBPMJ4HeA4UyFVnYShNxfxAvqjKj74A0voNIlmnsgYMULRkCC_ESor0ptMzYeVpsIfYSSJkH0sD2-9LejYuikBID3MHxLjYA/s320/Magritte+le+fils+de+l%2527homme.jpg" width="240" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;"><i>Le fils de l'homme</i>, huile sur toile de <b>René Magritte</b>( 1964)</td></tr>
</tbody></table><br />
Une pomme qui disparaît au sein d'un compotier, un panonceau indiquant la SORTIE, la descente d'une cage d'escalier, un chat à caser pendant les vacances, le prétexte à ces histoires est bien souvent anodin, un pur détail auquel on ne prête, à première vue tout du moins, pas vraiment attention. Et puis, le narrateur se met justement à cogiter sur ces détails, à se focaliser sur les signaux de leur présence, dévoilant en définitive des trappes sur une autre dimension invisible au premier coup d'oeil, une porte ouverte à un univers dont on ne soupçonnait guère l'existence de prime abord. Avec lui, on prend, sans s'en rendre compte, un malin plaisir à se faufiler dans les brèches d'un espace-temps soumis à des fluctuations quasi-imperceptibles, à déjouer les déclarations indicibles de ces objets qui ont tant à révéler si l'on prend la peine de les sonder. S'abîmer dans l'observation aiguë des parcelles les plus discrètes de notre milieu n'est pas une expérience tout à fait innocente et reflète la démarche introspective de celui qui l'entreprend. Elle est en mesure de lui dévoiler au grand jour la face cachée de la réalité, de le transformer en funambule suspendu au-dessus de l'incohérence de sa vie, condamné à vivre en décalage avec son entourage.<br />
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<blockquote>"Insidieusement, une drôle d'idée se fraya un chemin dans ma tête. J'étais en train de rêver. Cette sensation puissante ne dura qu'un bref instant, mais suffisamment long pour me donner l'illusion que cela pouvait être vrai. Avant que ma raison n'intervienne, l'impression de vivre dans un espace-temps décalé de la réalité donna un sens profond à mon rapport au monde, aux objets qui m'entouraient, avec lesquels je n'arrivais pas à m'associer. Évidemment, je savais cela impossible, si j'avais été en plein rêve, je n'aurais pas pu en prendre conscience. Même si ce rêve avait lui-même eu lieu dans un rêve. Il n'empêche, cette mise en abîme m'impressionna tellement que j'éprouvai un réel malaise."( extrait de Disparition)</blockquote><br />
Dans sa manière de façonner un monde à la frontière du super-réalisme et du surnaturel en pénétrant les arcanes de situations familières, Thierry Aué me fait songer quelque peu à <b>Haruki Murakami</b>( je pense à son recueil <i><u>L'Eléphant s'évapore</u></i> dont on peut lire <a href="http://pagesapages.wordpress.com/2009/04/24/l%E2%80%99elephant-s%E2%80%99evapore-d%E2%80%99haruki-murakami/">la chronique pertinente de Christine Jeanney</a>), et dans son sens de la phrase déroutante et de la fin déconcertante, il se rapproche de <b>Jacques Sternberg</b>, dont il s'est probablement inspiré pour forger certains de ses textes( en particulier de ses <i><u>Contes Glacés</u></i>). Son écriture possède la caractéristique d'hypnotiser, de retenir l'attention de celui qui s'y perd, sans que ce dernier soit bien sûr au juste de savoir pourquoi il poursuit sa lecture, et encore moins à vrai dire, comment a-t-il pu d'une traite la finir sans s'en rendre compte.<br />
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<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhCl5Q1WMbqveTLS42cK2AxYVbFF5-zhbhCCvvSydz-w_ojpVanW_5ysu5xQnMPbVDbzRsKcb1J9STUi-ri0lWTa7h6bGWq-41FU-xtQL9Tb6vNF4TC6FwqlCHe4qswOCJkJTetF1EvvxeX/s1600/Couv_L%2527Horloge+au+pays+du+levant.png" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhCl5Q1WMbqveTLS42cK2AxYVbFF5-zhbhCCvvSydz-w_ojpVanW_5ysu5xQnMPbVDbzRsKcb1J9STUi-ri0lWTa7h6bGWq-41FU-xtQL9Tb6vNF4TC6FwqlCHe4qswOCJkJTetF1EvvxeX/s320/Couv_L%2527Horloge+au+pays+du+levant.png" width="235" /></a></div><br />
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<ul><li><a href="http://www.ladernieregoutte.fr/livres/lhorloge-au-pays-du-levant/">L'Horloge au pays du Levant, un ensemble de textes courts écrits par Thierry Aué, disponible dès aujourd'hui chez La Dernière goutte</a></li>
<li>A noter: <a href="http://la-marche-aux-pages.blogspot.com/2011/02/lhomme-de-trop-thierry-aue.html">l'excellente chronique de Fiolof</a> au sujet de <a href="http://www.ladernieregoutte.fr/livres/lhomme-de-trop/">L'Homme de Trop du même Thierry Aué, sortie chez La Dernière goutte en 2010.</a></li>
</ul>edwoodhttp://www.blogger.com/profile/01713248479216797340noreply@blogger.com0France46.227638 2.213749000000007141.328188 -5.3970509999999932 51.127088 9.8245490000000082tag:blogger.com,1999:blog-5936397440233615254.post-63099718715051618332011-05-03T14:55:00.003+02:002011-05-03T17:47:37.195+02:00En guise d'hommage à Jacques Sternberg, Il n'y a plus de saisons<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi3n4SZRg8rRldp4zJh-Bf9F-bd468O-_iL-e8qNIAXM-EiXDkpLwgEiTnHTW-0TrwzkaiOXHV2DtVt42zY67RsWGnEiZ0mGHENp5NBKNK5-SRLmCKpxiXvgpQr_8AlzLNjTSUdBT3TEfKs/s1600/cajoline.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEi3n4SZRg8rRldp4zJh-Bf9F-bd468O-_iL-e8qNIAXM-EiXDkpLwgEiTnHTW-0TrwzkaiOXHV2DtVt42zY67RsWGnEiZ0mGHENp5NBKNK5-SRLmCKpxiXvgpQr_8AlzLNjTSUdBT3TEfKs/s320/cajoline.jpg" width="320" /></a></div><br />
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<span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">En guise d'hommage à <b>Jacques Sternberg</b> et à ses Contes glacés- dont je n'ai cependant pas la prétention d'égaler la qualité, loin s'en faut- voici une petite histoire que je viens de concocter.</span><br />
<span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;"><br />
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<div style="margin-bottom: 0cm;">J'étais en train de déguster un succulent plat de spaghettis carbonara lorsque l'armoire à glace présentant avec fidélité les prévisions météorologiques dévoila son faciès à un parterre de téléspectateurs ahuris et déversa sur eux le flot d'intempéries qui resterait désespérément en marge de notre pays. Hercule Godefroy( c'est son nom, ne m'en voulez point !) annonça que les températures allaient le lendemain culminer à 33° Celsius, un record pour un début mars. A cette époque, je ne ratais pas une miette de ces quelques minutes habituellement insipides, intercalées entre le non moins consternant journal du soir et l'affligeante émission de télé-réalité qui clôturait en beauté le programme. Depuis le début de l'hiver, quotidiennement, c'est avec un plaisir sournois que je dégustais les exploits du thermomètre, battant de jour en jour les performances de la veille, que tous les spécialistes s'accordaient déjà à considérer comme extraordinaires. Cela s'apparentait à une sorte de jouissance avoisinant celle que prend le spectateur d'un cent mètres en voyant tomber un record du monde, comme si je participais moi aussi à la marche de l'univers. Depuis le mois de décembre, même en plein cœur de la nuit, nous n'avions pas encore connu de baisse significative du mercure sous la barre des 20°, pas le moindre flocon de neige n'avait voltigé ni même ne s'était déposé sur les cimes les plus élevées de la région. Rien, pas le moindre frisson. Tout le monde s'accordait à dire qu'il n'y avait plus de saison et que le réchauffement climatique était plus que jamais d'actualité.</div><div style="margin-bottom: 0cm;">Force est de constater qu'à l'heure où j'écris ces lignes, ces commentaires me font doucement rigoler. Emmitouflé sous une dense fourrure de laine de mouflon, mes oreilles protégées par un bonnet tricoté par mon arrière grand-mère( paix à son âme), mes mains enveloppées par des moufles en cachemire, je peine à coucher mon récit sur le papier. En toute sincérité, j'en viens à douter que mes descendants puissent un jour accorder crédit à mon étonnant récit, qui s'avère pourtant je le confesse, absolument véridique.</div><div style="margin-bottom: 0cm;"><br />
</div><div style="margin-bottom: 0cm;">Je dois dire que j'ai ma petite idée sur ce qui est à l'origine de cet hiver d'une douceur inégalée. En effet, ma voisine, Elisabeth Chandail, avait pris les habitudes d'une marmotte, cloîtrée qu'elle était durant les mois de l'année les plus rigoureux, recroquevillée près de son poêle allumé sans répit. Un jour de grand froid comme nous n'en connaissions plus guère, dans ma boîte aux lettres, avait été déposé ce que j'avais tout d'abord pris pour une mauvaise plaisanterie, un petit mot anonyme griffonné à la hâte:</div><blockquote><i>« Vous n'avez pas l'air d'être au courant, mais ces portes qui s'ouvrent et qui se ferment à longueur de journée m'insupportent au plus haut point. »</i></blockquote><div style="margin-bottom: 0cm;">Dans un premier temps, j'avais été interloqué, passant en revue tout l'immeuble pour essayer de désigner la personne responsable de cette missive on ne peut plus laconique, et qui me reprochait quelque chose à laquelle je n'avais pas songé jusqu'à présent. A force de faire défiler un à un dans mon esprit les locataires susceptibles de ces remontrances quelque peu mystérieuses, mon crâne s'était retrouvé sens dessus dessous, dans l'incapacité de distinguer les innocents du seul coupable potentiel. Au bout d'un certain temps, je me suis rappelé d'Elisabeth, bien que je doive reconnaître ne l'avoir jamais croisée. Je fis le rapprochement avec elle dès lors que j'entendis un beau jour, par hasard, au pied de ma fenêtre, jacter les deux commères du troisième au sujet de Madame Chandail et de sa vie casanière. </div><div style="margin-bottom: 0cm;">Allez savoir pourquoi, j'ai tout de suite été confirmé dans mes élucubrations lorsque j'ai vu défiler sur mon écran dix-sept pouces une ménagère appétissante vantant les mérites de la lessive Caroline. Le petit ours brun, avec son sourire béat, apparaissant à la fin de l'encart publicitaire, m'a fait un clin d'œil me révélant qu'Elisabeth était responsable de cet hiver particulièrement clément. Je l'ai cru sur parole. Il faut dire qu'on lui donnerait le bon dieu sans confession à ce petit ours. Il était impensable qu'il mente, tant son regard semblait habité par la candeur. </div><div style="margin-bottom: 0cm;"><br />
</div><div style="margin-bottom: 0cm;">Quelques jours plus tard, j'eus la preuve irréfutable de l'accusation du petit ours brun. En effet, attendant patiemment mon tour chez le médecin- j'avais attrapé un rhume à cause de la chute brutale des températures sous les 20° Celsius le 21 mars- je me suis emparé de l'un de ces magazines de mode féminin qui abondent dans ce genre de lieux, à se demander parfois si l'on ne s'est pas trompé d'adresse et que ce n'est pas plutôt au cabinet de l'esthéticienne que l'on a atterri. En feuilletant ses pages toutes plus futiles les unes que les autres, mon regard s'est soudainement arrêté sur une grille de mots croisés qui constituaient à l'époque l'un de mes passe-temps de prédilection. Et alors, ce fut la consternation de voir le mot « hiver » rayé verticalement entre les cases C3 et G3. J'ai alors imaginé Elisabeth Chandail à la place que j'occupais, sur le fauteuil en sky noir, commettre impunément ce crime avec un sang-froid qui m'a littéralement pétrifié. </div><div style="margin-bottom: 0cm;"><br />
</div><div style="margin-bottom: 0cm;"><br />
</div><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"></div><div style="margin-bottom: 0cm;"></div><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjV5OPiTkXBRrSUeEC5UQn3CpBUfQVvaH-9gpzgDnUktfdtC1A7H5q0KT7WPk7qL3VMqcrMzvVxwm2c8cB35s9dUaL_CEy9PxFpb30UNa0fFq4IbCWbcX-QHZ-zyyzN8Jo8ay75Rc1Cybvr/s1600/Couv_contes+glac%25C3%25A9s+bis.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjV5OPiTkXBRrSUeEC5UQn3CpBUfQVvaH-9gpzgDnUktfdtC1A7H5q0KT7WPk7qL3VMqcrMzvVxwm2c8cB35s9dUaL_CEy9PxFpb30UNa0fFq4IbCWbcX-QHZ-zyyzN8Jo8ay75Rc1Cybvr/s200/Couv_contes+glac%25C3%25A9s+bis.jpg" width="136" /></a></div><ul><li>A lire: <a href="http://www.mijade.be/jeunesse/images/pg_telechargements/Fiche%20contes%20glaces.pdf">Contes glacés de Jacques Sternberg, réédité chez Mijade</a></li>
</ul><br />
<div style="margin-bottom: 0cm;"></div>edwoodhttp://www.blogger.com/profile/01713248479216797340noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5936397440233615254.post-87584740628407510752011-04-30T22:08:00.003+02:002011-04-30T22:14:12.063+02:00Frederick Exley: Hors-jeu à jamais<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><br />
</div><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhS_p-uDaSqUQgHEr1hz6uVb7dPEhBD7GD-LfcPcAd8Fb9Oc6hsc3dZ6bMaNpvHlyf-78gpLys15w_fzJMPax1SU_xXP5-POe961Kgz8jWzghyphenhyphenSvTaf1zxskM3n5vJQXJ1TYEYkdIrriSWF/s1600/Fred+Exley.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhS_p-uDaSqUQgHEr1hz6uVb7dPEhBD7GD-LfcPcAd8Fb9Oc6hsc3dZ6bMaNpvHlyf-78gpLys15w_fzJMPax1SU_xXP5-POe961Kgz8jWzghyphenhyphenSvTaf1zxskM3n5vJQXJ1TYEYkdIrriSWF/s1600/Fred+Exley.jpg" /></a></div><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><br />
</div><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"></div><blockquote><i>"Ce qui explique son succès, ce sont ses échecs."</i> (Christopher Lehmann-Haupt dans le New-York Times à propos de <u><i>A Fan's notes</i></u>)</blockquote><br />
Raconter sa vie est un exercice de style plus que jamais à la mode. Il n'y a qu'à jeter un oeil sur les devantures des librairies pour s'en rendre compte. Si beaucoup se sont laissés tenter par l'appât du gain, peu d'entre eux ont réussi à séduire. Suite à la lecture du dernier ouvrage lancé par les atypiques éditions <i>Monsieur Toussaint Louverture</i>, j'ai été amené à me poser la question fatidique, à savoir, qu'est-ce qui a bien pu retenir mon attention tout au long de ces presque 450 pages? A première vue, rien de bien original, le personnage multiplie les caractéristiques éculées de l'auteur cédant à l'appel des sirènes de l'autobiographie: rebelle, alcoolique, dépressif, obsédé par le sexe. Et pourtant, petit à petit on se laisse entraîner par le récit de <b>Frederick</b><b> </b><b>Exley</b>, comme si ses ingrédients étaient dotés de la vertu de rendre le lecteur dépendant. Mais bon sang, cela ne répond toujours pas à la question initiale. Quelle est la cause de cette addiction?<br />
Si on apprécie tant les aventures-mésaventures devrions-nous dire- de cet homme, c'est peut-être pour le charisme des congénères qu'il croise tout au long de sa vie, en tête desquels figurent Mister Blue, le représentant de commerce qui fait preuve d'une imagination débordante non seulement pour aguicher le chaland, mais aussi, sa spécialité, pour évoquer l'importance du cunilingus. Galerie de paumés qui ont su refaire surface dans ce cauchermard américain, ils sont le contrepoids et la bouée de sauvetage d'Exley qui, en pleine perdition, se raccrochera à eux.<br />
Mais je pense qu'il ne s'agit pas de l'essence de la réussite de l'oeuvre. Exley est un looser, en exil perpétuel, et ce genre de rôle a déjà maintes fois été campé dans la littérature du XXème siècle. Ce n'est pas par là précisément que se distingue <i><u>Le Dernier stade de la soif</u></i>, mais bien plutôt à mon avis dans la mise en valeur de cette constatation. Les situations décrites avec une minutie assez frappante permettent de pénétrer le malaise latent que ressent le personnage avec une intensité rarement atteinte. Exley, bien qu'éprouvant de l'intérieur les différentes péripéties qui jalonnent son existence, dévoile un regard d'une lucidité et d'une acuité absolument diaboliques. Son reniement de la société américaine le pousse à se compromettre auprès de ses semblables et, contrairement à la majorité de ses concitoyens, sans jamais trahir celui qu'il incarne en profondeur. Si, à intervalles réguliers, afin de recouvrer la liberté fondamentale d'être celui qu'il souhaite, il sera contraint de jouer le rôle que la société attend de lui- notamment lors de ses nombreux internements ou pour décrocher un poste- Exley prend un malin plaisir à le faire et cela s'avère au final davantage jouissif que castrateur. Le livre demeure fascinant car il refuse les compromis. Là où d'autres auraient préféré se complaire dans la confession pour solliciter la rédemption, Exley clame haut et fort son passé, affirmant ses choix, ses défaites, et son absence de conquêtes car pour lui, aucune alternative n'était envisageable. Garder son identité est la seule solution, quelque soit les possibilités que cela suscite. Consterné par la soumission de ceux qui l'entourent, il refuse de se prosterner devant le système.<br />
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<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEilcxxStaEjI9CPW338jNlOe3KGS2vTL4rYH2NE_WBWott3XA9cW-KCjEZKQvP7hPncenM6ReOVHLjW8iNp25LvhavrHnoIxYsb-FqLaXjI2mSWPYdHT2M-eMFWUcc08SdEbtReCDZ4mKg4/s1600/Frank+Gifford+sorti+en+civi%25C3%25A8re.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEilcxxStaEjI9CPW338jNlOe3KGS2vTL4rYH2NE_WBWott3XA9cW-KCjEZKQvP7hPncenM6ReOVHLjW8iNp25LvhavrHnoIxYsb-FqLaXjI2mSWPYdHT2M-eMFWUcc08SdEbtReCDZ4mKg4/s1600/Frank+Gifford+sorti+en+civi%25C3%25A8re.jpg" /></a></div><br />
Si l'opium du peuple est la télévision, celui d'Exley est sans aucun doute Frank Gifford, le half-back des New-York Giants, à tel point que le match hebdomadaire constitue une cérémonie qu'il ne peut se permettre de manquer sous aucun prétexte. Par l'intermédiaire de la gloire obtenue au fil des années, son ex-camarade de lycée lui apporte l'ersatz de bonheur dont il a besoin, la faculté d'oublier les cuisants échecs qui n'ont jamais cessé depuis qu'il est gosse. Cette passion est le fil conducteur de l'oeuvre, et, riche en significations, elle déterminera le sens caché et profond du parcours d'Exley, sous-entendu dans le titre français du livre( en anglais, cela s'appelait A Fan's notes).<br />
En lisant cette oeuvre, on en oublierait presque qu'il s'agit d'une autobiographie, tant Exley a su la rendre déconcertante à tout point de vue. D'ailleurs, ce dernier tenait absolument à mettre en avant la nature romanesque de son récit- sous-titrant le livre soit dit en passant <i>Mémoires fictifs</i>- ce qu'il est parvenu à faire avec un maestria certaine. Culte aux Etats-Unis( sa première publication date de 1968), Monsieur Toussaint Louverture nous donne enfin l'occasion de découvrir ce livre remarquable dans la lignée de ses compatriotes <b>John </b><b>Fante</b>, <b>Charles </b><b>Bukowski</b> ou du déjanté <b><a href="http://latavernedudogeloredan.blogspot.com/search/label/Hilsenrath%20Edgar">Edgar Hilsenrath</a></b>, qu'<i>Attila</i> s'est attaché à faire redécouvrir depuis peu.<br />
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<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhjRS9ry9H8cPGecy46P8FqGfkc2Ppi5C1ZWPMDjO3z_Yb1BWad1-fAyQP5J_6s5erd875gzYcV72x8UqFJcZEKeUTey0rkcB-wv_7piimLd6pYLaQBXJnXaTqqzZjrV-hYjIdsx3FKcygG/s1600/Couv_Le+dernier+stade.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhjRS9ry9H8cPGecy46P8FqGfkc2Ppi5C1ZWPMDjO3z_Yb1BWad1-fAyQP5J_6s5erd875gzYcV72x8UqFJcZEKeUTey0rkcB-wv_7piimLd6pYLaQBXJnXaTqqzZjrV-hYjIdsx3FKcygG/s1600/Couv_Le+dernier+stade.jpg" /></a></div><br />
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<ul><li><a href="http://www.monsieurtoussaintlouverture.net/Livres/Frederick_Exley/Frederick_Exley_A_fans_notes.html">Enfin traduit en français par Philippe Aronson et Jérôme Schmidt, Le Dernier stade de la soif de Frederick Exley, une parution Monsieur Toussaint Louverture</a></li>
</ul>edwoodhttp://www.blogger.com/profile/01713248479216797340noreply@blogger.com2tag:blogger.com,1999:blog-5936397440233615254.post-51788283019814959282011-04-23T12:05:00.007+02:002011-04-27T09:29:40.504+02:00Du tombeau au verre, Nuits bleues, calmes bières<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiI1wCb-W-x69o1Phhtlk0IiIfY2bdovv_fE9yUfi0oKYez-4nXUkQKpc7z_869YLehzEjeqNCYMAVzNFkwMO-R9ZCp3cTutBlDxqrxWVJ7RO-XrBc0LD0FaYeXvbSZrp7zR3iBRiDGWvDR/s1600/Nature+morte+au+verre+de+bi%25C3%25A8re%252C+peinture+de+Pieter+Claesz%252C.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="281" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiI1wCb-W-x69o1Phhtlk0IiIfY2bdovv_fE9yUfi0oKYez-4nXUkQKpc7z_869YLehzEjeqNCYMAVzNFkwMO-R9ZCp3cTutBlDxqrxWVJ7RO-XrBc0LD0FaYeXvbSZrp7zR3iBRiDGWvDR/s400/Nature+morte+au+verre+de+bi%25C3%25A8re%252C+peinture+de+Pieter+Claesz%252C.jpg" width="400" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;"><i><u>Nature morte au verre de bière</u></i>, peinture de <b>Pieter</b><b> </b><b>Claesz</b></td></tr>
</tbody></table><br />
<blockquote><i>"Il aimait ces airs sans importance, lorsque machin-machine active les saisons, en avant en arrière, en arrière en avant, fleurs feuilles, feuilles fleurs. Fleuilles. Feurs. De chemisettes à carreaux en manteaux épais, de sous-vêtements perce-neige en culottes nerce-peige: tous ces corps jamais effleurés, quel charnier. Cet Auschwitz des corps manqués. De trop aimer, on n'aime plus. Alors on tire sur soi le couvercle de son cercueil, comme le dormeur sa couverture, lorsqu'il fait froid. Et l'on commande un autre demi. On se gave de propos imbéciles, de trahisons dérisoires. S'il vous plaît, monsieur."</i></blockquote><br />
<span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">Paru en mai 1978 dans la revue </span><i><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">Subjectif</span></i><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">, </span><i><u><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">Nuits bleues, calmes bières</span></u></i><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;"> est un texte court de </span><b><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">Jean-Pierre Martinet</span></b><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">, que les éditions </span><i><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">Finitude</span></i><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;"> nous donnent la chance de redécouvrir plus de trente après.</span><br />
<br />
Ne nous méprenons cependant pas sur la teneur de l'oeuvre. C'est noir, infiniment, sans demi-mesure, bien que le personnage principal, une sorte de vagabond titubant, soit un macchabée qui revient d'entre les morts. C'est tambours battant que le récit débute tandis qu'un aveugle saoul le confond avec Marilyn Monroe. Si notre revenant est emporté dans le tourbillon de ses virées parisiennes, le quartier sordide qu'il embrasse, avec ses buffets de gare mal famés, et ses ruelles sordides, est loin d'être un long fleuve tranquille. En étant passé de vie à trépas, il n'a pas perdu l'acuité de ses sensations, porté qu'il est par une vitalité confondante. Chez Martinet, la frontière entre la vie et la mort est particulièrement légère, puisque l'on est, à chaque instant, amené à basculer de l'une à l'autre, à bousculer les barrières sans tambour ni trompette. Pas étonnant dans ces conditions que le trépassé veuille s'assurer de son propre décès en passant un coup de fil à son domicile, on ne sait jamais. Pas surprenant non plus de croiser le fantôme de <b>Henri</b><b> </b><b>Calet</b>, dont le valeureux Martinet contribua à la rédécouverte dans les années 80. Les objets eux-mêmes sont parfois plus promptes à réagir que les êtres humains. Rappelez-vous cette fourrure qui a défiguré à jamais la mère de Marilyn, voyez comme la moquette ronronne de plaisir dès lors qu'on la caresse, ou cette pantoufle solitaire qui n'a jamais digéré la disparition de sa soeur jumelle. Et la bière, cette boisson aimantée au zinc, que l'on peut boire sans modération car elle insuffle la vie qui nous est refusée sans elle. Blonde, brune ou rousse, succédanée de la femme rêvée, on peut la boire jusqu'à la dernière goutte, jusqu'à sentir couler en soi le fluide vivifiant:<br />
<br />
<blockquote><i>"D'autres bières achèveraient de tuer l'angoisse. Le </i><i>cliqueti</i><i>-</i><i>clac</i><i> de la capsule décapsulée par un tendre décapsuleur. Alors. Toute cette mousse, ce jaillissement jaillissant, et cette blancheur de baleine blanche, spermatique. Il enfouit la liqueur d'or dans les profondeurs rouges et noires. Les palpitantes muqueuses: il pensa à des femmes. Il n'avait sous la main que de la bière ordinaire."</i></blockquote><br />
Aussi consternant qu'il est, le présent est à fuir coûte que coûte, vaille que vaille, emporté par le flot des souvenirs qui surgissent sens dessus dessous, néanmoins impuissants à contenir le désespoir d'une vie insignifiante, et dont le sort est joué d'avance.<br />
<i><u>Nuits bleues, calmes bières</u></i> représente un concentré de la prose de Martinet, qui se frotte déjà aux thèmes forts de son oeuvre-phare, <i><u><a href="http://latavernedudogeloredan.blogspot.com/2011/03/jerome-le-poids-des-maux.html">Jérôme</a></u></i>.<br />
<br />
Quant à <i><u>L'Orage</u></i> qui nous est proposé ensuite, initialement publié dans le <i>Matulu</i> de Noël 1972( revue dont Jean-Pierre Martinet était le rédacteur en chef), il s'agit d'une sorte d'esquisse de <i><u><a href="http://latavernedudogeloredan.blogspot.com/2010/07/la-somdolence-de-martha.html">La Somnolence</a></u></i>, parue en 1975 chez <i>Jean-Jacques </i><i>Pauvert</i>( et réédité en 2010 par Finitude). On y voit déjà apparaître les obsessions de Martha, ses hantises, la solitude, l'orage menaçant qui refuse d'éclater, ces jeunes filles rousses, le Père-révérend, et la satanée bouteille de whisky, compagnon d'infortune de la pauvre dame de soixante-seize années.<br />
<br />
<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEixTzKzYKCVdR13Ux9abOSQpCrGXK2gmbM0mtHZUT-DR-dlOzLyb3SMnuXb5SAjZ4kb8nOXgi5RbY7xx-_Ql5ixRhTLqJI8AK89SWmguA9jl62L4o0vcY269nbntL_qSVmL5YxrJU4BjiEm/s1600/Couv_Nuits+bleues.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEixTzKzYKCVdR13Ux9abOSQpCrGXK2gmbM0mtHZUT-DR-dlOzLyb3SMnuXb5SAjZ4kb8nOXgi5RbY7xx-_Ql5ixRhTLqJI8AK89SWmguA9jl62L4o0vcY269nbntL_qSVmL5YxrJU4BjiEm/s1600/Couv_Nuits+bleues.jpg" /></a></div><br />
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<ul><li><a href="http://www.finitude.fr/titres/nuitsbleues.htm">A découvrir: Nuits bleues, calmes bières de Jean-Pierre Martinet, avec une postface d'Alfred Eibel, chez Finitude depuis 2009.</a></li>
<li><a href="http://remue.net/spip.php?article2019">La chronique enthousiasmante de Jacques Josse dans remue-net</a></li>
<li><a href="http://issuu.com/media.pop/docs/novo_11?mode=embed&layout=skin.issuu.com%2Fv%2Flight%2Flayout.xml">La chronique d'un certain C.S. dans Novo( page 94)</a></li>
</ul>edwoodhttp://www.blogger.com/profile/01713248479216797340noreply@blogger.com1tag:blogger.com,1999:blog-5936397440233615254.post-53820046286051065462011-04-22T13:31:00.003+02:002011-04-22T18:39:40.236+02:00Jean-Pierre Martinet à bout portant<span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;"><br />
</span><br />
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhwOSD1M6s9ZN1L06xbIewl-BQ6WTktacX-OxzP5YYdA5pwLJgvnh2AbMG50bKZCej3OlOPC5j1kE8d5ingA-Q9tdEi8cNLpeMC0eHLBnUhHb9Bwv4ciTaVcgBfxKH9efa0FUW1OBo6xFC8/s1600/bloody_mama.JPG" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhwOSD1M6s9ZN1L06xbIewl-BQ6WTktacX-OxzP5YYdA5pwLJgvnh2AbMG50bKZCej3OlOPC5j1kE8d5ingA-Q9tdEi8cNLpeMC0eHLBnUhHb9Bwv4ciTaVcgBfxKH9efa0FUW1OBo6xFC8/s400/bloody_mama.JPG" width="297" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Affiche du film Bloody Mama de Roger Corman sorti en 1970</td></tr>
</tbody></table><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;"><br />
</span><br />
<span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">Si certains d'entre vous ne connaissent pas encore </span><b><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">Jean-Pierre Martinet</span></b><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">, qu'ils se jettent illico presto sur l'un de ses textes pour se rendre compte de la puissance de sa prose. J'espère avoir bientôt de leurs nouvelles, si toutefois, ils parviennent à s'en remettre.</span><br />
<span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">La revue </span><i><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">Subjectif</span></i><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">, créée en 1978 par </span><b><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">Gérard Guégan</span></b><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">, dont le slogan "Ça va schlinguer, les créateurs reviennent" témoigne de l'intention sans compromis, a publié par quatre fois l'auteur de <i><u>Jérôme</u></i>. En attendant la parution du <a href="http://www.finitude.fr/titres/capha2.htm">numéro 2 de Capharnaüm chez Finitude</a>, intégralement consacré à la correspondance entre le natif de Libourne et son ami de longue date, <b>Alfred </b><b>Eibel</b>, sur lequel nous reviendrons très certainement au moment de sa sortie, votre serviteur trouvait bon d'évoquer ces oeuvres qui ne sont nullement mineures et encore moins à prendre à la légère.</span><br />
<span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;"><br />
</span><br />
<blockquote><i>"Qui le pleurerait, Maman, puisqu'il ne serait plus là pour s'apitoyer sur lui-même?"</i></blockquote><br />
Jean-Pierre Martinet s'est toujours reconnu dans le sort des ratés, des désespérés, des laissés-pour-compte, des rebuts de la société. C'est peut-être pour leur permettre d'avoir l'illusion d'exister qu'il s'est attaché à les laisser s'exprimer librement dans ses oeuvres. Porte-parole de leur insignifiance, leur déchéance, leur errance sans fin, ses textes représentent des cris de rage exutoires leur offrant en quelque sorte une dernière chance d'échapper à la totale indifférence, puisqu'être un moins que rien se révèle tout compte fait moins humiliant que de n'être absolument rien du tout. En lisant Martinet, on a comme l'impression qu'une force malveillante vous contraint à garder la tête sous l'eau, les lueurs d'espoir n'étant là que pour vous aveugler et vous plonger plus profondément au coeur d'un puits sans fonds.<br />
Ici, jusqu'aux moindres détails, tout conspire au malaise ambiant, à l'impression de sables mouvants: les bières servies sont infectes, les toilettes désespérément occupées, l'ascenseur en panne.<br />
Georges Maman qui tient la vedette de <i><u>Ceux qui n'en mènent pas large</u></i>, rêvait, oui un jour il rêvait, il y a bien longtemps concédons le, à une glorieuse carrière dans le cinéma, genre Walsh, Godard ou Ozu, et ne pensait pas une seule seconde devoir accepter un maigre cachet pour jouer l'étalon dans un film porno, au sein duquel d'ailleurs il ne serait même pas capable d'avoir la moindre érection. Désormais, c'est un crève-la-faim qui se contente d'une boîte de pâtés pour chien, de Canigou, qu'il ne trouve pas si dégoûtant que cela en fin de compte. Quand il voit surgir le bon vieux Dagonard derrière les vitres de la cabine téléphonique depuis laquelle il est en train d'appeler en vain Marie Beretta, la fille qui vient de le quitter, il voit apparaître une opportunité de lui soutirer quelques biffetons et de profiter d'un repas aux frais de la princesse. Hélas, Maman a de quoi se mettre Martel en tête: son altesse Dagonard a un bagout d'enfer, à tel point que son baratin s'apparente à des rafales de mitraillette et autres armes automatiques, que le bougre se plaît à singer, déferlant d'autant plus violemment sur le pauvre Bloody Mama, qui a reçu ce sobriquet en hommage au film de Roger Corman. L'assistant à la télévision a quelques lubies qui reviennent inlassablement dans leur conversation, les séries B américaines en tête, Dagonard étant un admirateur de Jacques Tourneur, le virus qui le ronge de l'intérieur, le dénommé Yasujiro( un clin d'oeil à Ozu sans aucun doute), et les lapins, allez savoir pourquoi. A l'instar de Paulina Semilionova dans Jérôme, un personnage féminin brille par son absence et permet de jouir encore d'un poil de courage pour résister aux assauts répétés de son interlocuteur, le bien-nommé Boxer, censé être là pour lui remonter le moral, mais qui en définitive, l'accule dans les cordes, lui assénant tous les propos qui l'enfoncent plus bas que terre. Cette fois-ci, le rôle est joué par Lauren Bacall dont la photo trône dans la pièce, complice active de cette guerre froide et sans merci. Par le biais de clins d'oeil, de suggestions et de transmissions de pensée, elle semble être en mesure de fournir à son souffre-douleur les analgésiques qui lui permettront de tenir le coup, de supporter tant bien que mal la paire de tenailles qui se referme sur lui à intervalles réguliers.<br />
<span id="goog_672222817"></span><span id="goog_672222818"></span><br />
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<i><u>Ceux qui n'en mènent pas large</u></i> est une pièce de choix dans l'oeuvre de Jean-Pierre Martinet, celle qui reflète peut-être le mieux son insatisfaction de n'avoir jamais pu pénétrer le monde du cinéma. D'ailleurs, pour l'anecdote, ce petit récit sorti en 1986 avait été envisagé un temps par ses compères <b>Yves Martin</b> et <b>Pierre Rissient</b> pour servir d'adaptation dans les salles obscures, sous le nom <i><u>Jacques Tourneur est mort</u></i>. Malheureusement, le projet tomba à l'eau.<br />
Le texte qui le suit, <i><u>Au fond de la cour à droite</u></i> est une sorte d'hommage à <b>Henri Calet</b> sous forme de pamphlet. En quelques pages, en quelques mots hallucinés, toute la noirceur de Martinet y est distillée.<br />
Martinet est plus que jamais d'actualité, il est grand temps de s'y replonger.<br />
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<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgiH6Uzuqd8dq5wiKuVvK5ZqTmhQL3th1bCCLYV7s-Dogp6Uba_6eO8geBtlmZ3oKx6owjaiUbhdBo1cRRsS3UuiylM_5zye72DkHLJzPZTQJ98a2yfAXcRYLr98W24nvNLnHfsAxJ_Qd6x/s1600/Couv_Ceux+qui+n%2527en+m%25C3%25A8nent+pas+large.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgiH6Uzuqd8dq5wiKuVvK5ZqTmhQL3th1bCCLYV7s-Dogp6Uba_6eO8geBtlmZ3oKx6owjaiUbhdBo1cRRsS3UuiylM_5zye72DkHLJzPZTQJ98a2yfAXcRYLr98W24nvNLnHfsAxJ_Qd6x/s320/Couv_Ceux+qui+n%2527en+m%25C3%25A8nent+pas+large.jpg" width="208" /></a></div><br />
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<ul><li>A redécouvrir: <a href="http://www.ledilettante.com/fiche-livre.asp?Clef=1052">Ceux qui n'en mènent pas large, suivi de Au fond de la cour à droite, signés Jean-Pierre Martinet, disponible au Dilettante depuis 2008.</a></li>
<li><a href="http://www.lmda.net/din/tit_lmda.php?Id=59984">La chronique de Richard Blin dans Le Matricule des anges qui revient sur Jérôme, le roman monstre de Martinet</a></li>
</ul>edwoodhttp://www.blogger.com/profile/01713248479216797340noreply@blogger.com2tag:blogger.com,1999:blog-5936397440233615254.post-77084846137628829092011-03-29T21:51:00.003+02:002011-05-14T23:24:13.821+02:00Jérôme, le poids des maux<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiEtmiabsciBkZSb48EBnL4UVn1PHbkiYuq4uzkAIkZsANOFHYIX8YCn7LfBzgkkS9PKkmy3wioW_xiaHn8Ds2C-lR3Gqjpuyhgbvi4JDPP-G7TGCn1Igk4AhtQm4LvR1fyClkCFbeZVoPR/s1600/Martinet+bis.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="301" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiEtmiabsciBkZSb48EBnL4UVn1PHbkiYuq4uzkAIkZsANOFHYIX8YCn7LfBzgkkS9PKkmy3wioW_xiaHn8Ds2C-lR3Gqjpuyhgbvi4JDPP-G7TGCn1Igk4AhtQm4LvR1fyClkCFbeZVoPR/s400/Martinet+bis.jpg" width="400" /></a></div><br />
<blockquote><i>« J'avais l'impression bizarre que ce n'était pas moi qui parlais, mais une voix très lointaine, oubliée depuis des années, et qui remontait d'un passé enfoui, vaguement immonde, comme si mon corps n'était plus qu'un placard vide où viennent se cacher des enfants monstrueux. »</i></blockquote><div style="margin-bottom: 0cm;">A l'approche du mois d'avril, à la vue des cerisiers en fleur avec un mois d'avance, de ces bourgeons pullulant aux quatre coins des forêts, j'étais persuadé qu'il était plus que jamais temps de me replonger dans les entrailles du roman monstrueux de <b>Jean-Pierre Martinet</b>. C'est ainsi que pendant cinq jours et cinq nuits, j'ai dévoré Jérôme et ses quatre cents quarante pages, senti sur moi le poids de ses cent cinquante kilos et de ses mots comme jaillis de nulle part. J'ai bu jusqu'à la lie le calice de son désespoir, senti la rage parcourir mon corps. Du matin jusqu'au soir, j'ai vécu avec lui, subissant un à un ses caprices les plus sordides, les pensées les plus ineffables, celles qu'il n'aurait peut-être même- qui sait- jamais confiées à Solange, celle qui pourtant lui répétait si souvent qu'il fallait se méfier de la douceur de l'air qui s'insinue au début du printemps à travers les rideaux, sous les troènes, celui qui ramène des odeurs nauséabondes de cadavres fraîchement mis en bière et de gaufrettes chaudes. Nécessairement, ce genre de climat déboussole, contamine le flot des pensées, fait sortir de ses gonds les penchants malsains tapis au fond de soi. Quand on est pointé du doigt comme un attardé obèse, un rejeton désavoué qui vit encore à plus de quarante balais aux crochets de sa mère qui tricote à longueur de journée pour joindre les deux bouts, l'amour est une notion qui vous échappe, qui écoeure et qui émerveille dans le même temps, comme ces fraises tagada, scoubidous et autres marshmallow qu'on ingurgitait sans modération lorsque l'on était môme et qui, au bout d'un moment, vous retournait l'estomac jusqu'à vous filer la nausée. Dès les premières lignes-et il n'y aura pas de trêve, pas de répit possible- Jérôme étreint son lecteur comme plus tard, il étranglera Monsieur Cloret, cet homme qui est la fourberie incarnée et qui ne cessera de hanter la galerie de personnages que Jérôme rencontrera tout au long de sa saison en enfer. Malgré les différents interlocuteurs qui se présentent sur sa route, Jérôme demeure seul, infiniment isolé face à ses tourments, devant l'insignifiance de la vie qui lui martèle sans discontinuer ses leçons implacables. Les différents visages qui se présentent à lui ne semblent être en fin de compte qu'une collection de masques issus d'un carnaval d'outre-tombe au cours duquel gesticule une armée de pantins conçus pour jouer une mascarade à laquelle on doit, en dépit du dégoût qu'elle inspire, jusqu'à son terme demeuré spectateur.</div><blockquote>« Au fond, comme Solange, je n'aimais que l'ombre, la clandestinité, la liberté inhumaine que procure cet état intermédiaire entre la mort et la vie, cet espace vide, indéfini, appelé par certains les limbes, et où je me suis toujours plu à voir le prolongement miraculeux de l'enfance. »</blockquote><div style="margin-bottom: 0cm;">Seule Paulina Semilionova, la fillette du collège Semivolsky paraît encore capable de laisser entrevoir une lueur d'espoir. Et encore, même elle, tripotée, dépiautée, emportée par le vice ambiant, n'est plus que l'ombre d'elle-même, vers laquelle Jérôme court sans bien savoir toutefois à quoi elle ressemble. Pour espérer retrouver l'ange déchue, le décor lui aussi doit se transformer, prendre des allures de Saint-Petersbourg. La neige, susceptible d'ensevelir toute la pourriture de la terre, doit se mettre à tomber, à voltiger sur les vers et les fleurs, sur les morts-vivants et les fantôme de la ville. Hélas, Paris n'est qu'un faux-bourg de la cité russe avec ses ruelles mal famées, ses avenues désertes où la terreur semble avoir contaminé l'atmosphère, ses passages qui étaient jadis des refuges et qui ressemblent désormais bien plus à des chausse-trappes. Monsieur Cloret a fait perdre à Falkner, le maître spirituel de Martinet, la lettre qui l'a falsifié à jamais, qui le condamne à n'être plus qu'une parodie d'écrivain. A chaque fois que l'un d'entre eux est cité par l'entremise de son vis-à-vis, c'est pour faire exploser à la face de Jérôme son absence de culture. Oui, il fut en effet un temps où on le considérait comme un élève brillant, capable de rester des heures durant, au coeur des oeuvres les plus éprouvantes. Cette époque est révolue. Il n'est maintenant plus qu'un épouvantail, le rebut de la société, un être que l'on exècre volontiers et qui ne fait finalement plus peur à personne. Les éclaircies qui se dessinent dans ce paysage funèbre ne sont jamais que très éphémères et d'autant plus cruelles qu'elles font parfois songer à l'accalmie provisoire, au silence insoupçonnable qui précède les orages les plus violents. Dans ces conditions oppressantes, la syntaxe croule tantôt sous les répétitions, les non-sens, tantôt se retrouve court-circuitée, dénaturée, tronquée, suivant à la lettre le sort tragique de ses personnages. </div><div style="margin-bottom: 0cm;"><br />
</div><div style="margin-bottom: 0cm;">Jean-Pierre Martinet ignorait qu'il était, en quelque sorte, en train d'écrire avec une géniale prémonition, sa propre biographie puisqu'il devra à quarante ans passés retourner vivre auprès de sa mère, après avoir fait à jamais une croix sur sa carrière de réalisateur.</div><div style="margin-bottom: 0cm;"><br />
</div><div style="margin-bottom: 0cm;"><br />
</div><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhZWbXMJyVFknsaacR6ovI3IQ4ELWj2WcELMH__B9-cuepUgHF7Ywk7MWR-mBkbg2ldY172QGsNA-5Z4azRHBCH_KDetW0MjfZPkwnAKP9wuk8q-64EnDgnQbhq9QZfwzqVl4iPoPhCLLNu/s1600/Couv_J%25C3%25A9r%25C3%25B4me.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhZWbXMJyVFknsaacR6ovI3IQ4ELWj2WcELMH__B9-cuepUgHF7Ywk7MWR-mBkbg2ldY172QGsNA-5Z4azRHBCH_KDetW0MjfZPkwnAKP9wuk8q-64EnDgnQbhq9QZfwzqVl4iPoPhCLLNu/s320/Couv_J%25C3%25A9r%25C3%25B4me.jpg" width="224" /></a></div><div style="margin-bottom: 0cm;"><br />
</div><div style="margin-bottom: 0cm;"></div><ul><li>A (re)découvrir: <a href="http://www.finitude.fr/titres/jerome.htm">Jérôme de Jean-Pierre Martinet chez Finitude</a>( 2008)</li>
<li>A noter:<a href="http://www.finitude.fr/titres/capha2.htm"> la parution le 19 mai prochain du numéro deux de La Revue Capharnaüm qui sera entièrement consacré à la publication de la correspondance entre Jean-Pierre Martinet et Alfreid Eibel</a></li>
<li><a href="http://www.oike.com/lmda/din2/n_egar.php?Eg=MAT03693">Le monde désaccordé de Jean-Pierre Martinet par Alfred Eibel dans le Matricule des anges</a> </li>
<li><a href="http://pointn.free.fr/doc/museenoir/museenoir_martinet.html">Nicole Caligaris présente Jérôme dans Point N</a></li>
</ul><br />
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</div>edwoodhttp://www.blogger.com/profile/01713248479216797340noreply@blogger.com10tag:blogger.com,1999:blog-5936397440233615254.post-22130655430848927602011-03-12T20:17:00.005+01:002011-03-14T20:42:09.513+01:00Avatar, un autre visage de Théophile Gautier<div><br />
</div><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjsbtQokRRr_xAaX-hD5LZ1A6ylO_9mZ4gTfskEr_tVUK-C8z17YguLBsf6mTV3Otar6FUUcM4qMjZ-ht5qDX19sV7eQM-bZYru30rOyC0tD2IFuIWNrH0iuliin9rwJpETr0GLg5Q4Lxcy/s1600/Faust.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="372" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjsbtQokRRr_xAaX-hD5LZ1A6ylO_9mZ4gTfskEr_tVUK-C8z17YguLBsf6mTV3Otar6FUUcM4qMjZ-ht5qDX19sV7eQM-bZYru30rOyC0tD2IFuIWNrH0iuliin9rwJpETr0GLg5Q4Lxcy/s400/Faust.jpg" width="400" /></a></div><div><br />
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<span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">Si l'on cite volontiers les nouvelles et autres contes fantastiques, ainsi que <i><u>Le Roman de la momie</u></i> et <i><u>Capitaine Fracasse</u></i>, afin d'illustrer la bibliographie de </span><b><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">Théophile Gautier</span></b><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">, celle-ci recèle tout de même des pièces méconnues qui méritent que l'on s'y attarde tout autant que ses oeuvres les plus fameuses.</span><br />
<span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">En fin d'année 2010, nous avons eu la chance que de jeunes maison d'édition entreprennent de faire redécouvrir deux d'entre elles, </span><i><u><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;"><a href="http://www.lechatrouge.net/ouvragesChatRougeCOMEDIEDELAMORT.htm">La comédie de la mort</a></span></u></i><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">( Le Chat rouge), initialement parue en 1838, étrange roman en vers, et </span><u><i><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">Avatar</span></i></u><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">( qui n'a absolument rien à voir avec le film homonyme) qui elle a vu le jour en 1856, et dont je vais maintenant parler.</span><br />
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Avatar évoque une sorte d'alchimie entre la passion typiquement romantique qui prédomine dans les pages de bon nombres d'oeuvres qu'on trouve au XIXème siècle en France avec ses descriptions flamboyantes et abondantes, la tentation de céder aux mains du diable qui renvoie explicitement au mythe de Faust ou au <i><u>Diable amoureux</u></i> de <b>Cazotte</b>, et une fascination pour les expériences inspirées des pratiques venant de contrées exotiques, incarnée par le thaumaturge Balthazar Cherbonneau, dont le contraste frappant entre le patronyme et le prénom pût plaire à un certain <b>Jean-Pierre Martinet</b>. Le savant a non seulement ramené de l'Inde qu'il a fréquenté assidûment son penchant pour les expériences aux frontières de la vie et de la mort, mais aussi son insatiable besoin de touffeur dont il s'efforce d'envelopper son appartement parisien afin d'y créer le climat propice à l'invitation des divinités indiennes. Tout comme Octave de Saville représente l'archétype de l'amant éconduit, la comtesse Labinska symbolise la beauté idéale, inaccessible et mystérieuse, le docteur Cherbonneau, lui, représente une sorte de parodie du scientifique ivre d'expériences défiant les limites de la science, et dont les passes dissimulent mal une sorte de charlatanisme. Si cet air de déjà vu aurait pu ailleurs sembler quelque peu horripilant, ici Théophile Gautier s'ingénie à glisser une pléthore de références afin de démystifier le récit qui n'est d'ailleurs pas sans rappeler le ton plus ouvertement caricatural de <b>Bellin</b><b> de La </b><b>Liborlière</b><b> </b>dans <i><u><a href="http://www.lekti-ecriture.com/editeurs/LA-NUIT-ANGLAISE.html">La nuit anglaise</a></u></i> (<b><span class="Apple-style-span" style="font-weight: normal;"> proposé chez </span><span class="Apple-style-span" style="font-weight: normal;">Anacharsis</span><span class="Apple-style-span" style="font-weight: normal;">) </span></b>qui s'éteignit quelques dix années avant la naissance d'Avatar.<br />
Dans <i><u>Smarra ou Les démons de la nuit</u></i> de <b>Charles Nodier</b> paru en 1821, nous assistions déjà à une situation rappelant la métempsychose, puisque Lorenzo, le héros du récit, croit soudainement s'immerger dans la peau de Lucius en Thessalie.<br />
Loin de se prendre au sérieux, le natif de Tarbes multiplie les clins d'oeil et les interventions incongrues dès lors qu'il s'agit d'identifier les deux protagonistes rivaux qui se sont échangés leur enveloppe corporelle. Peu à peu, l'enjeu mystico-gothique se transmue au fil des pages en jeu de rôles burlesque. Ainsi, les diverses réactions des proches, le diagnostic du docteur devant l'incompréhension du comte, l'oubli d'une langue maternelle, ou la réception de lettres à soit-même adressées participent au pastiche concocté avec un art redoutable de l'auto-dérision:<br />
<div><blockquote><i>« Ah çà, il paraît, se dit le comte, que l'Octave de Saville dont j'occupe la peau bien contre mon gré existe réellement; ce n'est point un être fantastique, un personnage d'Achim Arnim ou de Clément Brentano: il a un appartement, des amis, un notaire, des rentes à émarger, tout ce qui constitue l'état civil d'un gentleman. Il me semble bien cependant que je suis le comte Olaf Labinski. » </i></blockquote></div><div>S'instaure parallèlement une réflexion sur ce qui caractérise chacun d'entre nous puisque la majorité des proches du comte et d'Octave ne se rendent pas compte des particularités étranges de l'âme qui demeure au sein de celui qu'ils côtoient au quotidien. Le corps éclipse les qualités constituant l'essence de l'être allant jusqu'à contraindre son possesseur à reproduire les penchants et les inclinations de l'ancien locataire de leur nouvelle enveloppe corporelle.<br />
Hélas, l'unique personne qui importe pour Octave sera aussi la seule à se douter de la supercherie élaborée conjointement par le docteur et lui. </div><div><blockquote><i>"Le concours des deux âmes a déposé ce germe mixte dans un corps qui lui-même offre à la vue deux portions similaires reproduites dans tous les organes de sa structure. Les Orientaux ont vu là deux ennemis: le bon et le mauvais génie. Suis-je le bon? Suis-je le mauvais? me disais-je. En tout cas, l’autre m’est hostile… […] Attachés au même corps tous les deux par une affinité matérielle, peut-être l’un est-il promis à la gloire et au bonheur, l’autre à l’anéantissement ou à la souffrance éternelle?"( <u>Aurélia</u>, Gérard De Nerval) </i></blockquote><br />
</div><table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg-DP7_Z2taZ7syj0VgiUogoC21yc3uX-ajbOm2AkemcpZ513Hk8sPTMwS09koSnFB5YaJ4BEte2aXCBwnaWR9mbX4mXSWQK1L45ruwL5Mk9J0KgwFiA7oXWMWN5TvPszfDHug4O8BvmzaM/s1600/antonio-canova-psyche-lamour-1793-louvreje-sa-L-1.jpeg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="373" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg-DP7_Z2taZ7syj0VgiUogoC21yc3uX-ajbOm2AkemcpZ513Hk8sPTMwS09koSnFB5YaJ4BEte2aXCBwnaWR9mbX4mXSWQK1L45ruwL5Mk9J0KgwFiA7oXWMWN5TvPszfDHug4O8BvmzaM/s400/antonio-canova-psyche-lamour-1793-louvreje-sa-L-1.jpeg" width="400" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;"><span class="Apple-style-span" style="font-family: Arial, Helvetica, sans-serif; font-size: 14px; line-height: 20px;"><i>Psyché et l'amour</i>, sculpture d'</span><span class="Apple-style-span" style="font-family: Arial, Helvetica, sans-serif; font-size: 14px; line-height: 20px;"><b>Antonio Canova</b>(</span><span class="Apple-style-span" style="font-family: Arial, Helvetica, sans-serif; font-size: 14px; line-height: 20px;">1793)</span></td></tr>
</tbody></table><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><br />
</div><div>Un an avant la parution d'Avatar, <b>Gérard de Nerval </b>écrivait <u><i>Aurélia</i></u> qui ne manque pas de frapper par la similitude des thématiques abordées. On ne manquera pas non plus de noter que les deux oeuvres se déroulent pareillement à Paris, même si la situation spatio-temporelle du récit semble au fur et à mesure se déliter. Il y a également chez l'un et l'autre une confusion mise en perspective entre l'état maladif du personnage principal et l'environnement insaisissable dans lequel il se retrouve plongé. Dès lors, comme le suggère le docteur Charbonneau au comte, on peut décemment s'interroger sur la raison d'un homme confronté à des situations aussi abracadabrantes. Gérard de Nerval déclarait qu'il voulait par l'intermédiaire d'Aurélia <span class="Apple-style-span" style="font-family: Georgia; font-size: 14px; line-height: 24px;"><i>«transcrire les impressions d’une longue maladie qui s’est passée tout entière dans les mystères de [son] esprit»</i>.</span><br />
Cependant, malgré les accusations de plagiat que l'on peut formuler à l'encontre d'Avatar, comme le souligne si bien avec une malice absolument délectable Théophile Gautier, le destin d'Octave est unique puisque:<br />
<blockquote><i>"Les historiens fantastiques de Pierre Schlemihl et de la Nuit de Saint-Sylvestre lui revinrent en mémoire; mais les personnages de La Motte-Fouqué et d'Hoffmann n'avaient perdu, l'un que son ombre, l'autre que son reflet; et si cette privation bizarre d'une projection que tout le monde possède inspirait des soupçons inquiétants, personne du moins ne leur niait qu'ils ne fussent eux-mêmes. » </i></blockquote><br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjO0Xv_KZveWVz9rnjPG6SSWV9xjb59kJuChoOwbVDk7LDgqYQ6nkrBbSO1nGAtlYwAwtzRbgYxjvXuKDIUAfmRjxrIBz5xGXygiE7Y3H0WYYLFEnVgYOlUQyjh62qLDoG-RFNNl0XCgdBl/s1600/couv_Avatar.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjO0Xv_KZveWVz9rnjPG6SSWV9xjb59kJuChoOwbVDk7LDgqYQ6nkrBbSO1nGAtlYwAwtzRbgYxjvXuKDIUAfmRjxrIBz5xGXygiE7Y3H0WYYLFEnVgYOlUQyjh62qLDoG-RFNNl0XCgdBl/s320/couv_Avatar.jpg" width="201" /></a></div><br />
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<ul><li>A redécouvrir: <a href="http://www.blogger.com/goog_1031394206">Avatar de </a><a href="http://www.blogger.com/goog_1031394206">Théophile</a><a href="http://www.blogger.com/goog_1031394206"> </a><a href="http://www.blogger.com/goog_1031394206">Gautier</a><a href="http://www.editionsdusonneur.com/produit.php?ref=Avatar&id_rubrique=7"> initialement publié en 1856 et de nouveau disponible aux éditions du Sonneur( 2010)</a></li>
</ul><br />
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</div>edwoodhttp://www.blogger.com/profile/01713248479216797340noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5936397440233615254.post-18803741014017899832011-03-03T22:44:00.017+01:002011-03-04T00:15:07.300+01:00Emile Dajan ou Jean-Daniel Dupuy, voyage en Zoneapolis dans les interstices de la réinvention<span class="Apple-style-span" style="color: #cccccc; font-size: small;"><span class="Apple-style-span" style="font-size: 13px; line-height: 20px;"><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;"><br />
</span></span></span><br />
<span class="Apple-style-span" style="font-weight: bold;"><b><span class="Apple-style-span" style="font-weight: normal;"><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">Il y a des histoires qui se content, et d'autres qui se construisent au fil des pages, au sein desquelles la rencontre du lecteur et des protagonistes est susceptible de bouleverser les repères narratifs balisant les récits traditionnels. Jean-Daniel </span><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">Dupuy</span><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;"> fait partie de ces hérauts qui envisagent la lecture comme un espace récréatif, comme une aventure à part entière, où les personnages n'hésitent pas à se bousculer, à se travestir, à se dissimuler, à chevaucher les territoires en marge, au coeur d'une épopée carnavalesque. Si les masques tardent à tomber, si les langues rechignent à se dénouer, si les indices sont distillés avec parcimonie, si les dissonances et les harmonies qui se font entendre déjouent les habitudes du lecteur </span><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">mélimélomane</span><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">, le plaisir découlant d'une telle approche n'en est que plus jouissif.</span></span></b></span><br />
<span class="Apple-style-span" style="font-weight: bold;"><b><span class="Apple-style-span" style="font-weight: normal;"><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">Le quotidien de Dupuy se transmue en exotisme et se traduit par un voyage permanent. Chaque coin de rue, impasse ou ruelle pouvant déboucher sur un rêve, sur une ribambelle de trouvailles.<br />
Après <a href="http://latavernedudogeloredan.blogspot.com/2010/10/photographie-issue-du-blog-de-marie.html">Ministère de la pitié</a>, <a href="http://latavernedudogeloredan.blogspot.com/2010/10/photographie-issue-du-blog-de-marie.html">Les Noces de carton</a>( tous deux parus aux éditions de La Mauvaise graine) et les mémorables <a href="http://latavernedudogeloredan.blogspot.com/2009/06/invention-des-autres-jours-puzzle.html">Inventions des autres jours</a> ayant jadis vu le jour chez les entreprenantes Éditions </span><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;"><a href="http://www.editions-attila.net/">Attila</a></span><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">, la taverne ne pouvait résister au plaisir de faire découvrir en avant-première aux plus curieux d'entre vous quelques extraits des "<i>errances anachroniques du chevalier anagramme : </i></span><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;"><i>Okar</i></span><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;"><i> de Fourchant</i>" tirés de son livre inclassable à paraître très prochainement, </span><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">intitulé <u><i>Zoneapolis</i></u></span><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;">. Ils sont ici accompagnés de trois dessins à l'encre, réalisés par son compère <b>Georges </b></span><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;"><b>Boulard</b></span><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;"> qui feront partie des huit illustrations jalonnant le livre en question.</span></span></b></span><br />
<span class="Apple-style-span" style="font-weight: bold;"><b><span class="Apple-style-span" style="font-weight: normal;"><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;"><br />
</span></span></b></span><br />
<span class="Apple-style-span" style="font-weight: bold;"><b><span class="Apple-style-span" style="font-weight: normal;"><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Courier New', Courier, monospace;"><br />
</span></span></b></span><br />
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjTeYTMhXIh5-bujldAF7rrel7a0iLOUhj82heZ1TCG6sCpU77BdbTWgbdWNznFy1nexPZ1qijDLo99mQ9dHuPgakTXqF-aplswnWNnb9KQP8gK0-mjNIViBAmdGiHq2TR9P9033gvEhXqi/s1600/Zoneapolis+illustr%25C3%25A9+par+Georges+Boulard.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjTeYTMhXIh5-bujldAF7rrel7a0iLOUhj82heZ1TCG6sCpU77BdbTWgbdWNznFy1nexPZ1qijDLo99mQ9dHuPgakTXqF-aplswnWNnb9KQP8gK0-mjNIViBAmdGiHq2TR9P9033gvEhXqi/s400/Zoneapolis+illustr%25C3%25A9+par+Georges+Boulard.jpg" width="303" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;"><span class="Apple-style-span" style="font-family: Times, 'Times New Roman', serif;">Dessin à l'encre de Georges Boulard illustrant Zoneapolis</span></td></tr>
</tbody></table><br />
<b><span class="Apple-style-span" style="font-size: large;"><span class="Apple-style-span" style="color: #999999;">I / </span></span></b><b><span class="Apple-style-span" style="font-size: large;"><span class="Apple-style-span" style="color: #999999;">Avertissement au lecteur qui croit à la réalité du XXIème siècle</span></span></b><br />
<div><b><br />
</b><br />
<div align="JUSTIFY"><span class="Apple-style-span" style="font-family: Times, 'Times New Roman', serif;">Nos villes sont des lieux de mémoire. Les œuvres d’art, les architectures, les rues, les cours, les marchés, ce qui relève du patrimoine de l’humanité comme ce qui est infiniment modeste ; tout cela participe – sans hiérarchie – à la constitution d’un paysage de la mémoire collective et individuelle. La forme de nos villes est un miroir de notre histoire. Depuis que le monde est monde, la ville raconte des histoires, parfois millénaires, à celui qui arpente ses rues. Et les grandes villes occidentales se différenciaient les unes des autres. Celle-ci avait une grande cathédrale, celle-là de très belles places ombragées bardées de fontaines, telle autre était réputée pour son marché des quatre saisons, telle autre se vantait de posséder de somptueuses façades ouvragées ou des bars et des cafés qui restaient ouverts toute la nuit… certes, on relevait une batterie d’éléments communs mais chacune parvenait (par son génie, sa généalogie, sa culture) à apprivoiser les formes de manière à créer son propre décor. Paris n’est pas Marseille, Barcelone se défend de Madrid, Naples emmerde Milan et Stuttgart ne ressemblera jamais à Lisbonne. Il ne s’agit pas de souligner les particularismes locaux ni de se faire l’apôtre d’une nouvelle forme de chauvinisme international mais plutôt de démontrer qu’au fil des âges, des hommes et des femmes ont laissé une empreinte dans le paysage : cela, pour interpréter le monde et s’approprier un espace. Et puisque notre monde est multiple, il est bien normal d’observer une multiplication des tentatives de personnaliser ces territoires. Peut-on imaginer une alternative contraire ? Peut-on envisager une homogénéisation des cultures et des territoires ? L’uniformisation des espaces sur un modèle unique n’est pas concevable. Ou bien il s’agirait d’une tentative désespérée, d’un épisode historique circonscrit (le joug d’un régime totalitaire ou les conséquences d’une catastrophe naturelle).</span></div><div align="JUSTIFY"><span style="font-size: small;"><span class="Apple-style-span" style="font-family: Times, 'Times New Roman', serif;">Pourtant, l’inconcevable a eu lieu. Désormais, dans les villes de la social-démocratie, il existe des lieux privés de mémoire. Ce sont des espaces standardisés, rationalisés, créés de toutes pièces – et à toute vitesse – par et pour le commerce. Dans les Zones d’Activités Commerciales, la circulation des corps et des biens est optimisée pour répondre à une seule loi : consommer, consommer à outrance, consommer en toute sécurité. Dans ces « zones » le paysage disparaît au profit du passage. On traverse des espaces de la manière la plus efficace qui soit et la notion de territoire est vidée de son sens. Dans ces zones, on est à Toulouse comme on est à Strasbourg, on est à Lille alors qu’on croit être à Montpellier. On croit être à Paris, à Moscou, à Berlin… alors qu’on est nulle part !</span></span></div><div align="JUSTIFY"><span class="Apple-style-span" style="font-family: Times, 'Times New Roman', serif;"><br />
</span></div><table cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: left;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjvLDb_2bntwzizfarydVTr_9GPREnG_VdGZmhqmTUhyphenhyphenulmyXEYdzwStc9xkCEzsVaynySBaLzJO1V6hCPlLXSVV_Y3s48hu4YRCOe57EvJ0GWqD6JpW61JCXxttoFKTPiuLxL5X4ENSS9O/s1600/Zoneapolis+illustr%25C3%25A9+par+Georges+Boulard+%25282%2529.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><span class="Apple-style-span" style="font-family: Times, 'Times New Roman', serif;"><img border="0" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjvLDb_2bntwzizfarydVTr_9GPREnG_VdGZmhqmTUhyphenhyphenulmyXEYdzwStc9xkCEzsVaynySBaLzJO1V6hCPlLXSVV_Y3s48hu4YRCOe57EvJ0GWqD6JpW61JCXxttoFKTPiuLxL5X4ENSS9O/s400/Zoneapolis+illustr%25C3%25A9+par+Georges+Boulard+%25282%2529.jpg" width="321" /></span></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;"><span class="Apple-style-span" style="font-family: Times, 'Times New Roman', serif;">Dessin à l'encre de Georges Boulard illustrant Zoneapolis<br />
<span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Times New Roman';"><span class="Apple-style-span" style="font-size: small;"><span class="Apple-style-span" style="font-family: Times, 'Times New Roman', serif;"><span class="Apple-style-span" style="font-weight: 800;"><br />
</span></span></span></span></span></td></tr>
</tbody></table><span style="font-family: 'Times New Roman';"><span style="font-size: small;"><span class="Apple-style-span" style="font-size: large;"><span class="Apple-style-span" style="color: #999999;"><br />
</span></span></span></span><br />
<span style="font-family: 'Times New Roman';"><span style="font-size: small;"><span class="Apple-style-span" style="font-size: large;"><span class="Apple-style-span" style="color: #999999;"> III / </span></span><b><span class="Apple-style-span" style="font-size: large;"><span class="Apple-style-span" style="color: #999999;">Où l’on dit comment est né le valeureux chevalier qui va défier la réalité</span></span></b><br />
<br />
Dans cette guerre, je l’ai dit, le combat est inégal. Mais je relève le défi. Le véritable pari de ce texte est de montrer qu’un seul homme peut braver le système, battre en brèche cette logique de conditionnement. Dans cette « zone » où la surveillance des corps est la règle, j’imagine une présence subversive, une présence qui traverserait ces lieux à la manière d’un spectre. Puisque la « zone » brille par sa rationalité, sa transparence, qu’elle permet à ceux qui contrôlent de lire les pensées, les faits et gestes de chaque individu, que les messages et les informations diffusés limitent le pouvoir de décision des visiteurs, je leur oppose mon héros : un être fantastique, une sorte de croisement entre le Don Quichotte de Cervantès et le Stalker de Tarkovski. Il s’agit d’un personnage de fiction car la faculté d’imagination est la première arme qui peut contrer la faiblesse et la sécheresse d’esprit de mon adversaire. Bien entendu, c’est un personnage anachronique, porteur d’une histoire, garant d’une mémoire. Ce personnage est doué de sentiments et cherche l’aventure. Et mon adversaire sera impuissant car il ne pourra jamais saisir ou interpréter les émotions de mon héros. Je le dote aussi d’un pouvoir magique qui lui permettra de se déplacer sans encombre pour déjouer les pièges de son ennemi : mon ingénieux personnage est doté d’un pouvoir d’invisibilité renforcé. Ultime insolence à l’égard des puissants commerçants, le nom de mon chevalier est un double anagramme qui fait exploser les noms de deux grandes enseignes de la distribution, et les apparie pour mieux les confondre. Insaisissable et fantasque, capable des plus grands exploits, voici le chevalier anagramme, j’ai nommé OKAR de FOURCHANT.</span></span><br />
<span style="font-family: 'Times New Roman';"><span style="font-size: small;"><br />
</span></span><br />
<span style="font-family: 'Times New Roman';"><span style="font-size: small;"></span></span><br />
<span style="font-family: 'Times New Roman';"><span style="font-size: small;"></span></span><br />
<span style="font-family: 'Times New Roman';"><span style="font-size: small;"><table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjn0sW5h-bjvYvNkMjALb0Ty2zPBa7gYSawFSQDkw4ZUW0pkUDLJOt_rv-ijG4OqurnS_lQpaPkUWOUt1Io4fkaWZIjPpQogN7nz96Ug8Dpeki309Psi2o15yPzQUbiW9xRvhj_eaefTnie/s1600/Zoneapolis+illustr%25C3%25A9+par+Georges+Boulard+%25283%2529.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><span class="Apple-style-span" style="font-family: Times, 'Times New Roman', serif;"><img border="0" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjn0sW5h-bjvYvNkMjALb0Ty2zPBa7gYSawFSQDkw4ZUW0pkUDLJOt_rv-ijG4OqurnS_lQpaPkUWOUt1Io4fkaWZIjPpQogN7nz96Ug8Dpeki309Psi2o15yPzQUbiW9xRvhj_eaefTnie/s400/Zoneapolis+illustr%25C3%25A9+par+Georges+Boulard+%25283%2529.jpg" width="375" /></span></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;"><span class="Apple-style-span" style="font-family: Times, 'Times New Roman', serif;">Dessin à l'encre de Georges Boulard illustrant Zoneapolis<br />
</span></td></tr>
</tbody></table></span></span><br />
<span style="font-family: 'Times New Roman';"><span style="font-size: small;"></span></span><br />
<span style="font-family: 'Times New Roman';"><span style="font-size: small;"><div align="JUSTIFY"><span class="Apple-style-span" style="font-family: Times, 'Times New Roman', serif;"><br />
</span></div><div align="JUSTIFY"><span style="font-family: 'Times New Roman';"><span style="font-size: small;"></span></span></div><span style="font-family: 'Times New Roman';"><b><span class="Apple-style-span" style="color: #999999;"><span class="Apple-style-span" style="font-size: large;">VI / Qui traite du premier combat que notre chevalier dut mener contre une armée immobile</span></span></b></span></span></span></div><div><span class="Apple-style-span" style="font-family: Times, 'Times New Roman', serif;"><span class="Apple-style-span" style="font-family: 'Times New Roman';"><br />
I</span>l est relativement aisé de parquer son véhicule dans la « zone ». Okar remarque néanmoins qu’il est plus facile d’entrer sur le parc de stationnement d’un hypermarché que d’en sortir. Le marquage au sol, les panneaux de signalisation indiquent très clairement à l’automobiliste l’itinéraire le plus rapide pour pénétrer dans un grand magasin. Il hésite seulement entre parking souterrain et parking aérien. Quitter le lieu est une autre affaire. Tours et détours. Sens interdit, sens obligatoire, giratoires obligent l’ex-client à traverser toute l’aire de stationnement, de passer devant la station service – on ne sait jamais, à déboucher en face d’autres magasins, à redevenir client. La sortie n’est pas loin. Merci.</span><br />
<span style="font-family: 'Times New Roman';"><span style="font-size: small;"><span style="font-family: 'Times New Roman';"><span style="font-size: small;"><div align="JUSTIFY"><span style="font-size: small;"><span class="Apple-style-span" style="font-family: Times, 'Times New Roman', serif;">Si l’on observe les cohortes de véhicules garés sur les parcs de stationnement, immobiles, obéissantes et puissantes, presque au contact les unes des autres. Si l’on observe la perfection des lignes, la rigueur d’une organisation militaire saute aux yeux. Si l’on cherche la verticale, on voit flotter des drapeaux. Okar ne s’y trompe pas : des étendards au-dessus d’une armée immobile. Okar de Fourchant sait que le château-hangar est en état de siège. </span></span><span class="Apple-style-span" style="font-family: Times, 'Times New Roman', serif;"> </span></div><div align="JUSTIFY"><span style="font-size: small;"><span class="Apple-style-span" style="font-family: Times, 'Times New Roman', serif;">Que faire lorsqu’on est chevalier anagramme à la recherche d’aventure ? Que faire face à des phalanges armées, parfaitement carrossées, prêtes à vrombir et à vous écraser. Fuir. Se réfugier à l’intérieur de l’hyper-château-fort au plus vite. Okar n’est pas un lâche. Il fait front. Il ordonne aux véhicules de se rendre immédiatement. Dans le cas contraire il fracassera cette Porsche Cayenne, ce monstre de métal boursouflé d’arrogance qui lui fait face. Mais aucun véhicule ne bouge. La reddition est immédiate. Ils connaissent la fureur d’Okar, ils ont du entendre parler de lui, de sa valeur et de son courage. Okar pourrait détruire les deux trois Peugeot qui clignotent en hurlant sur sa gauche, mais Okar de Fourchant ne se bat pas contre un ennemi quand celui-ci n’offre pas la moindre résistance. Okar n’est pas un lâche. Invisiblement, Okar de Fourchant franchit les portes du grand magasin. BIENVENUE.</span></span><span class="Apple-style-span" style="font-family: Times, 'Times New Roman', serif;"> </span></div></span></span><br />
</span></span></div>edwoodhttp://www.blogger.com/profile/01713248479216797340noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5936397440233615254.post-35668021419472287182011-02-17T22:57:00.002+01:002011-02-17T22:59:04.509+01:00L'humanité en péril et le réveil du hasard<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiWcwJa3HDG7aCmci-A32RswRcXXbgVdA8ZN7-CDgaFobZFlGYxdbEwSa8a-Im4C0CViqTssSNsI-lA3lRYNCyGld_IeG1u2C8-sE7-bxkub1XFmZpGZqD6G-X1t-Xir9Q02cTzLdAxBv89/s1600/Centaure+et+Lapithe%252C+sculpture+de+Antoine+Louis+Barye.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiWcwJa3HDG7aCmci-A32RswRcXXbgVdA8ZN7-CDgaFobZFlGYxdbEwSa8a-Im4C0CViqTssSNsI-lA3lRYNCyGld_IeG1u2C8-sE7-bxkub1XFmZpGZqD6G-X1t-Xir9Q02cTzLdAxBv89/s400/Centaure+et+Lapithe%252C+sculpture+de+Antoine+Louis+Barye.jpg" width="356" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Centaure et Lapithe, sculpture de Antoine Louis Barye</td></tr>
</tbody></table><br />
<blockquote><i><span style="font-family: Times,"Times New Roman",serif;">-Romulo, entre donc!</span></i><br />
<i><span style="font-family: Times,"Times New Roman",serif;">La camériste s'avança:</span></i><br />
<i><span style="font-family: Times,"Times New Roman",serif;">-Mais Madame, c'est un homme !</span></i><br />
<i><span style="font-family: Times,"Times New Roman",serif;">La duchesse leva les sourcils:</span></i><br />
<i><span style="font-family: Times,"Times New Roman",serif;">-Romulo, un homme?</span></i><br />
<i><span style="font-family: Times,"Times New Roman",serif;">"Et elle rit avec une brève roulade d'oiseau."</span></i></blockquote><br />
Cet extrait provient du <u>Roi et la Reine</u> de <b>Ramon Sender</b> mais reflète avant tout une thématique traversant l'oeuvre de l'Aragonais, l'impossibilité humaine de s'affirmer en tant que tel aux yeux de ses congénères. Si la part humaine des personnages de Sender semble être mise en péril à tout moment, c'est en premier lieu par les rapports qu'ils entretiennent avec leurs prochains. Loin d'enraciner leur caractère distinctif, les autres membres de la communauté, par leur soif de puissance, mettent en lumière la part animale tapie en chacun d'eux.<br />
<blockquote><i><span style="font-family: Times,"Times New Roman",serif;">-Plus jamais de la vie nous ne serons des hommes.</span></i> </blockquote>Les premières lignes de <u>L'Empire d'un homme</u>, tiré d'un fait divers couvert par Sender à l'époque où il était encore journaliste, nous mettent d'emblée la puce à l'oreille puisque se fait entendre le pépiement d'oiseaux à la gorge chatoyante et aux ailes noires et blanches, appelées puputs.<br />
Le roman débute par une traque dans le seso, un désert balayé par des vents violents et au sein duquel sévit des contrastes de températures absolument saisissants. La proie semble être un individu hirsute qui ressemble bien plus à un orang-outang ou un ours qu'à un être humain. Il s'agit en fait de Sabino, compté disparu dans son village depuis plus de quinze ans déjà, suite à la véhémence de ses concitoyens à son égard. <br />
<br />
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh21Zj2wCErkeHsx6LyJ9rIn2F0ppdwNW1RdJtj_wqqzKUr60oHdAHr7Cw56RruBqhANI8koiCL8jUwxnUX9sVKSogAteoPDPHdxk4LlktcQD96tAVK5B_MloltQetdmsZKJEhh2zWUDUUf/s1600/T%25C3%25AAte+d%2527homme+avec+peau+de+lion+de+Leonard+de+Vinci.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh21Zj2wCErkeHsx6LyJ9rIn2F0ppdwNW1RdJtj_wqqzKUr60oHdAHr7Cw56RruBqhANI8koiCL8jUwxnUX9sVKSogAteoPDPHdxk4LlktcQD96tAVK5B_MloltQetdmsZKJEhh2zWUDUUf/s400/T%25C3%25AAte+d%2527homme+avec+peau+de+lion+de+Leonard+de+Vinci.jpg" width="322" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Tête d'homme avec peau de lion, dessin de <b>Leonard de Vinci</b></td></tr>
</tbody></table><br />
<blockquote><i><span style="font-family: Times,"Times New Roman",serif;">-Un crime que personne n'avait commis en a entraîné d'autres, mais des vrais. </span></i></blockquote>Méconnaissable, de retour au bercail, la populace, ne pouvant accepter la réalité, le conspue et ne le considère plus guère que comme un fantôme, un revenant, le spectre incarnant le crime imaginaire dont ont été accusé à tort et à travers Juan et Vicente. Les deux compères, brutalisés, martyrisés, subissant les pires affronts que l'on puisse imaginer, ont fini, au terme d'un supplice qui n'en finissait plus, par avouer des actes qu'ils n'ont jamais perpétrés, allant jusqu'à suspecter l'ami d'autrefois. Au même titre que la peste ou un autre fléau de la même ampleur, la férocité, la cruauté, la bestialité se propagent à vitesse grand V au rythme des sarabandes, romances et autres couplets ponctuant la liesse populaire. La foule se révèle prompte à diaboliser l'épouvantail montré du doigt, à cracher son venin et sa rancoeur sur le premier bouc-émissaire qui vient. Les contes s'alimentent des racontars et des superstitions des uns et des autres, orientés qu'ils sont par les sournois intérêts politiques qui émaillent la vie primitive de ces contrées féodales. Ricardo et Manuel, ennemis de longue date, guidés par un altruisme de façade, sont prêts aux pires vilenies pour parvenir à leur fin. Pour eux, les individus n'ont pas de visage, ne représentant rien en dehors du bulletin de vote qu'ils déposeront dans l'urne lors des élections. La rivalité ancestrale entre libéraux et conservateurs ne pourra se régler sans s'abandonner au préalable à leurs pulsions animales, à leurs penchants prédateurs et indomptables. <br />
Comme souvent chez Sender, le passé prend le pas sur le temps présent, les réminiscences établissant petit à petit la suprématie des souvenirs sur la vie de tous les jours, abolissant de la sorte toute éventualité de rédemption. Qu'il s'agisse du clergé ou de la défense, tous, afin d'éviter le pire, prônent la résignation, l' assujettissement à des attaques fondés sur de simples rumeurs. Même libérés des accusations qui les accablaient, les stigmates du passé compromettent la volonté des innocents à construire une existence vierge de toute flétrissure.<br />
Les maux ne peuvent se guérir qu'à l'écart des hommes car ses derniers par leur présence tendent à raviver les blessures contractées dans leur entourage. <br />
Une fois de plus, Attila nous offre une édition précieuse avec un habillage des plus séduisants.<br />
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<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiFH9AZI5pTBFI1Et11Vmx9qWwPdf-i4kkHwCSRkP89dWMgXQ4dDswpMWh6Y0j9P0UUZkR08-i15dLv2NFhIIUH1dbmNvZ36OEcUmXXqqe33lgwzB-BaaAbBinjhRa_nOkB5hSK_RQOX8ez/s1600/Couv_L%2527Empire+d%2527un+homme.gif" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiFH9AZI5pTBFI1Et11Vmx9qWwPdf-i4kkHwCSRkP89dWMgXQ4dDswpMWh6Y0j9P0UUZkR08-i15dLv2NFhIIUH1dbmNvZ36OEcUmXXqqe33lgwzB-BaaAbBinjhRa_nOkB5hSK_RQOX8ez/s320/Couv_L%2527Empire+d%2527un+homme.gif" width="225" /></a></div><br />
<ul><li>A (re)découvrir: <a href="http://www.editions-attila.net/empire_d_un_homme/livre.html">L'Empire d'un homme, suivi du Crime de Cuenca</a> et d'une postface de Claro, dans une traduction de Claude Bleton, et agrémenté d'illustrations de Anne Careil. </li>
<li><a href="http://rhinoceros.eu/2011/02/l-empire-d-un-homme-de-ramon-sender/">Les vivants et les morts, chronique de Vincent Jolit </a></li>
<li><a href="http://www.blogger.com/%20http://blog.paludes.fr/public/Radio9/Sender-L_EmpireD_UnHomme-Critique.mp3">La précieuse chronique audio de Nikola</a></li>
</ul>edwoodhttp://www.blogger.com/profile/01713248479216797340noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5936397440233615254.post-36925151452869608222011-01-29T10:25:00.001+01:002011-10-01T09:12:15.430+02:00Face à face au pays de la traduction<div style="font-family: "Courier New",Courier,monospace;"><br />
</div><table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjZPsCxEZ6S2Vk6_UbSw8t8Xwdlxj4u8hLwoUjXSgZSx657YbUjBsSgSI-LRx_FrqZkxadqIFuJvmqMweWnkT9amRRobc4flZvq6GRR4sRS-f40TYhX1XngJ2QN_QdWHt2N3q0mtCRAGWeE/s1600/Brice-Matthieussent.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjZPsCxEZ6S2Vk6_UbSw8t8Xwdlxj4u8hLwoUjXSgZSx657YbUjBsSgSI-LRx_FrqZkxadqIFuJvmqMweWnkT9amRRobc4flZvq6GRR4sRS-f40TYhX1XngJ2QN_QdWHt2N3q0mtCRAGWeE/s400/Brice-Matthieussent.jpg" width="298" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;"><i>© Vanessa Santullo pour Marseille Face B. librairie histoire de l'oeil</i></td></tr>
</tbody></table><div style="font-family: "Courier New",Courier,monospace;"><br />
</div><div style="font-family: "Courier New",Courier,monospace;"><br />
</div><div style="font-family: "Courier New",Courier,monospace;"><b>Brice Matthieussent</b> est le traducteur confirmé de plus de deux cents fictions américaines signées par des auteurs prestigieux tels que <b>Jack Kerouac, John Fante, Thomas Pynchon, Bret Easton Ellis, Charles Bukowski</b>. Avec <u>Vengeance du traducteur</u>, il signe un premier roman qui est tout à la fois un essai, une fiction et un exercice de style particulièrement ludique, qui s'inscrivent dans le prolongement de son activité première.</div><br />
Si bien souvent l'image du traducteur se noie dans celle de l'auteur du texte original, si la prose du premier est assimilée à une retranscription de la voix de son maître, le traducteur n'en demeure pas moins un auteur à part entière, capable d'insuffler une nouvelle vie à un texte ancré dans une langue. Tiraillé d'un côté par le devoir de fidélité vis-à-vis du géniteur de l'oeuvre, et de l'autre par le désir de créativité, le traducteur s'évertue à trouver le juste milieu qui lui convient. Le roman de Brice Matthieussent quant à lui s'engouffre dans la brèche de l'esprit d'un traducteur rebelle qui, agacé de se retrouver acculé en bas de page, obligé de suivre à la trace les astérisques qui se cachent derrière une pléiade de mots, d'éclairer certaines phrases sous le nom peu flatteur de N.D.T., décide de mettre son grain de sel dans l'oeuvre dont il a la responsabilité. Déboussolé par la qualité douteuse du texte auquel il est confronté, ce dernier prend de plus en plus de libertés vis-à-vis de l'auteur, allant jusqu'à faire disparaître une quantité astronomique d'adjectifs et une myriade d'adverbes, tous jugés superflus par l'apprenti sorcier. Viennent ensuite les indications scéniques intercalées entre les dialogues, aussi inutiles que les précédentes, et qui connaîtront donc le même sort. Pour contrebalancer le sensible allègement, le traducteur procède aux ajouts de son cru et qui, à ses yeux, enrichissent considérablement le propos. David Grey est capricieux, insolent, irrévérencieux, se permettant de copieusement critiquer l'oeuvre qu'il va devoir traduire, détraquant l'intrigue pour les beaux yeux d'une nymphe radieuse tout droit sortie du Lolita de <b>Nabokov</b>, dont il semble être un lecteur invétéré, prenant un plaisir machiavelique à concocter sur mesure des perfidies à l'encontre d'Abel Prote. Pour s'esquiver tout en répondant présent à l'appel de ses sempiternelles initiales, le vengeur masqué, le zorro littéraire change sa signature comme de chemise, s'immisçant tour à tour dans la Nique en tapinois, de Nymphettes du traqueur, dans la Nausée du traquenard ou la Nique de Tarzan. Le traducteur prend ses aises sous la ligne d'horizon confinant ses excentricités, ses notes en bas de page devenant de plus en plus envahissantes, prennant des proportions inquiétantes pour l'intégrité de l'auteur, allant jusqu'à soulever la fine barre noire qui pèse de tout son poids sur elles. Le centre de gravité de l'oeuvre se déplace insensiblement, sans que la symétrie essentielle reliant les différents acteurs du texte en gestation s'en trouve pour autant ébranlée. <br />
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<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiRxMAyGTRTu2EHuXKASZwI0Hv-UehK4W9lfYM2XculJ6jrlndhvu2gvLz0ZoElrYFXRWmL3O79b3TVgxiXdIqPWKYzGWEpgcY5fmmVwrgijZCYTCwpefnUoB-EHv2BxZcqfmNE-spT58Sl/s1600/Goya_Pantin.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiRxMAyGTRTu2EHuXKASZwI0Hv-UehK4W9lfYM2XculJ6jrlndhvu2gvLz0ZoElrYFXRWmL3O79b3TVgxiXdIqPWKYzGWEpgcY5fmmVwrgijZCYTCwpefnUoB-EHv2BxZcqfmNE-spT58Sl/s400/Goya_Pantin.jpg" width="228" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Le Pantin de Goya</td></tr>
</tbody></table><br />
Seulement voilà, l'omniscience élémentaire de l'écrivain Abel Prote met en danger la pérénité des initiatives entreprises par le traducteur. Ce dernier qui avait l'illusion de pouvoir impunément se jouer du père du texte s'aperçoit, bien malgré lui, qu'il est tributaire du jeu d'échec ordonné par l'auteur. Ainsi, le traducteur américain et l'auteur français s'échangeront provisoirement leurs propres appartements, situés de part et d'autre de l'Atlantique, pour fourvoyer son alter-ego qui se retrouve, tel le pantin du tableau de Goya, balotté entre ciel et terre. Le traquenard va plus loin puisque les deux hommes ne sont en définitive que des personnages d'un roman qui incorpore celui dans lequel les deux rivaux figurent, La Vengeance du Traducteur, telles des poupées russes emprisonnées elles-même dans d'autres figurines.<br />
<br />
Au-delà de l'intrigue complexe à souhait, le texte est truffé d'allusions aux pulsions du traducteur qui souhaite s'affranchir de l'oeuvre originale. Le texte découvert n'est en fin de compte que le reflet du texte invisible et dont l'espace vacant sur la page renforce le poids fictif, signifiant ainsi l'impossibilité de la totale disparition du texte dont le traducteur s'efforce de supprimer les traces sur les lieux de son crime presque parfait. <br />
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<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEisOnPQ_TxVUffGuf23LFEK00ygpQ6NwSeK8KOAO5EYqd48kv1kAZXM-j091rvq-Bc2azNa6FUNAxTMwNF3GhMMy6I_VFIyzcNWSW3e53b_q7v4P8GCXpuzbHVXtQuL_2AbTb81xgqYLImB/s1600/Couv_vengeance_du_traducteur.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEisOnPQ_TxVUffGuf23LFEK00ygpQ6NwSeK8KOAO5EYqd48kv1kAZXM-j091rvq-Bc2azNa6FUNAxTMwNF3GhMMy6I_VFIyzcNWSW3e53b_q7v4P8GCXpuzbHVXtQuL_2AbTb81xgqYLImB/s320/Couv_vengeance_du_traducteur.jpg" width="213" /></a></div><br />
<ul><li>A lire:<a href="http://www.pol-editeur.com/index.php?spec=livre&ISBN=978-2-84682-334-0"> De Brice Matthieussent, Vengeance du traducteur au P.O.L.( 2009) traduit du français par lui-même</a></li>
</ul><ul><li><a href="http://www.fabula.org/revue/document6025.php">Quand le traducteur se rebiffe par Anne Bourse</a></li>
<li><a href="http://www.article11.info/spip/Brice-Matthieussent-Un-bon">Un entretien du traducteur Brice Matthieussent par Lémi </a></li>
</ul>edwoodhttp://www.blogger.com/profile/01713248479216797340noreply@blogger.com5tag:blogger.com,1999:blog-5936397440233615254.post-59499497695227936802011-01-16T20:35:00.005+01:002011-01-19T07:45:05.784+01:00Un roman à 69 tiroirs signé Goran Petrovic<div style="font-family: "Courier New",Courier,monospace; margin-bottom: 0cm;"><br />
</div><table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjMaUSxhzUrmdB6ELbQyzO2MQEVMW_YjY1rc91swovrjYCx1IQflqmRuWpxNYiNdw3KCNjsuO4n9rYttmMJ8Z5NmO83nh6fkzoTRKuG6JoEM-G_LE4dUVYUZg00ftoiQgXRE5hDuFMBR1uQ/s1600/Claude+Monet+Le+Jardin+d%2527eau.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="296" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjMaUSxhzUrmdB6ELbQyzO2MQEVMW_YjY1rc91swovrjYCx1IQflqmRuWpxNYiNdw3KCNjsuO4n9rYttmMJ8Z5NmO83nh6fkzoTRKuG6JoEM-G_LE4dUVYUZg00ftoiQgXRE5hDuFMBR1uQ/s400/Claude+Monet+Le+Jardin+d%2527eau.jpg" width="400" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Jardin d'eau, peinture de Claude Monet</td></tr>
</tbody></table><div style="font-family: "Courier New",Courier,monospace; margin-bottom: 0cm;"> </div><div style="font-family: "Courier New",Courier,monospace; margin-bottom: 0cm;">Nous avions évoqué l'auteur serbe <b>Goran Petrovic</b> à l'occasion de la parution de <a href="http://latavernedudogeloredan.blogspot.com/2010/11/cinema-paradiso.html"><u>Sous un ciel qui s'écaille</u></a> aux éditions <i>Les Allusifs</i>. La tentation était trop forte pour ne pas plonger ensuite dans la première traduction française de l'une de ses oeuvres, où il est question de couples de lecteurs qui se perdent sans bouger, d'histoires racommodées au goût du jour et au parfum du citron, renfermant un récit qui foisonne et n'en finit pas de se dérober à la huitième lecture.</div><div style="font-family: "Courier New",Courier,monospace; margin-bottom: 0cm;"><br />
</div><div style="margin-bottom: 0cm;"><u>Soixante-neuf tiroirs</u>, autant de chapitres au sein desquels il faudra au préalable se glisser pour connaître tous les mystères qu'ils recèlent. Comme son nom l'indique, il s'agit d'un roman à tiroirs, qui sont autant de portes coulissantes s'ouvrant sur différentes lectures d'un livre, dont la luxueuse reliure en maroquin d'un rouge profond tranche avec les ouvrages que l'on a l'habitude de trouver à l'époque dans cette partie de l'Europe. Adam Lozanitch, correcteur provisoire de la modeste revue <i>Beautés de notre pays</i>, se voit un jour confier le manuscrit en question qui ressemble à « Un récit sans histoire, des pages et des pages de descriptions faites pour une femme qu'il n'avait jamais connue en dehors de ces pages. Un jardin et une villa construits de telle sorte qu'on y voit même ce qui n'est pas décrit, qu'on y entend des sons et qu'on y sent des odeurs. » Ignorant la fonction précise qu'il doit exercer dans cette entreprise, Adam qui tente de défricher les racines de l'oeuvre, parcourt, dans l'attente d'un élément de réponse, les allées d'une bibliothèque et fait la rencontre apparemment fortuite d'une jeune fille hypnotisante au chapeau cloche et au parfum câlin, avec laquelle il vivra plus tard des lectures simultanées, pris au piège du charme partagé par les pages du livre et de la jeune employée.</div><div style="margin-bottom: 0cm;"><br />
</div><div style="margin-bottom: 0cm;"><br />
</div><table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEib0OKcw6Da7l8fjADQ6XM9wve7bE7IsUkAKn52S2Hor-OPVfmC30F3mJMCTeL5duN4hny227PXJMDj2VNpCjY9OjpMOfPP2jd5sodIpmBjQwXA_OJMv_-_XOpEm-acTEyt3Yzy511eHdUi/s1600/Sous+la+pergola.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEib0OKcw6Da7l8fjADQ6XM9wve7bE7IsUkAKn52S2Hor-OPVfmC30F3mJMCTeL5duN4hny227PXJMDj2VNpCjY9OjpMOfPP2jd5sodIpmBjQwXA_OJMv_-_XOpEm-acTEyt3Yzy511eHdUi/s400/Sous+la+pergola.jpg" width="292" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Sous la pergola, peinture de Oscar Bluhm </td></tr>
</tbody></table><div style="margin-bottom: 0cm;"><br />
</div><div style="margin-bottom: 0cm;"></div><div style="margin-bottom: 0cm;">C'est par le jeu des hasards et des rencontres livresques que se tissent les relations et autres ramifications de la narration que Goran Petrovic dévoile, insensiblement, au gré de réminiscences et anecdotes distillées avec une science du conte remarquable, et qui se développent comme une plante grimpante, indomptable dans son essor, redoutable par son emprise. L'introduction à chacune des lectures parsemant le texte sont autant de motifs de réjouissance, parodiant quelque peu les titres du <u>Don Quichotte</u> de <b>Cervantes</b> par l'intermédiaire de phrases à peine esquissées et qui se répondent les unes les autres dans un ballet mélodieux du plus bel effet. Que ce soit l'écriture, la correction, la lecture, tout ce qui gravite autour du livre est assimilé à une activité organique qui permet de remodeler à volonté. La bibliothèque s'apparente ainsi à un jardin des plantes, où chaque parcelle doit faire l'objet d'une attention de tous les instants, nécessitant ici d'élaguer, ou là de planter un terme en voie de disparition, ou une tournure richement élaborée. De simples spectateurs de mots gravés sur la page, les lecteurs se métamorphosent en auteurs à part entière, rivalisant d'invention pour créer leurs propres parcours, décidant de leurs moindres détours à travers les différents passages secrets du livre. Celui-ci devient tributaire des caprices du lecteur, représentant désormais le ferment de ses élucubrations, le terreau commun aux excroissances de l'imagination des lecteurs égarés. Le bouleversement intérieur des pages se fait en parallèle de l'épanouissement des lecteurs, ainsi tout ce qui les entoure doit servir leur propension à s'évader. Dans cet univers infiniment ouvert, le caractère martial du beau-père d'Anastase, les bruits inopinés qui traversent les cloisons fragiles de l'appartement d'Adam sont au contraire des attaches qui l'enracinent à la vie de tous les jours, qui insidieusement perturbent le développement personnel du lecteur.</div><div style="margin-bottom: 0cm;">En marge du récit, nous assistons à une partie de l'histoire de la Serbie, dont les éléments authentiques se mêlent aux fantaisies les plus notoires, accentuant ainsi la confusion immanente des pages. On se demande parfois si ce n'est pas le passé du pays qui est au service des personnages, bien plutôt que l'inverse, comme lors de ce discours officiel entrecoupé de façon intempestif par l'irruption de l'imaginaire au coeur même de la réalité. Le télescopage des deux mondes ne peut se réaliser sans danger, car la stricte conception de cette dernière n'est guère capable de donner le change à l'inépuisable potentiel inhérent à la fiction. Pour préserver sa faculté d'émerveillement, le lecteur devra ainsi toujours plus avant s'enfoncer dans les pages de sa destinée. L'auteur réalise le tour de force prodigieux de rendre tout à fait intangible la frontière qui sépare les deux univers.</div><div style="margin-bottom: 0cm;"><br />
</div><div style="margin-bottom: 0cm;">A travers le chiffre 69, on peut, parmi bon nombre d'hypothèses, songer à l'imbrication des points de vue, la réciprocité des émotions suscitées par une oeuvre, ou le renversement essentiel que peut susciter sa découverte dans la vie d'un lecteur. Assurément, nous avons affaire à un livre hautement recommandable.</div><div style="margin-bottom: 0cm;"><br />
</div><div style="margin-bottom: 0cm;"><br />
</div><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"></div><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgry_JZVQNNhV9PmG3o4b8n5ejh_mnpVFlFT1734roXGag95LMArx_IBthWuDkwvG_NvVL-VxGaHLRsXXjtNt_Z6Mml58Dq9AbvO6wlgsw9gAjAyKlXmm-Px9vhMb1MzzX5qKRgLD7h4Q4u/s1600/Couv_69+tiroirs.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgry_JZVQNNhV9PmG3o4b8n5ejh_mnpVFlFT1734roXGag95LMArx_IBthWuDkwvG_NvVL-VxGaHLRsXXjtNt_Z6Mml58Dq9AbvO6wlgsw9gAjAyKlXmm-Px9vhMb1MzzX5qKRgLD7h4Q4u/s1600/Couv_69+tiroirs.jpg" /></a></div><div style="margin-bottom: 0cm;"><br />
</div><div style="margin-bottom: 0cm;"></div><ul><li><div style="margin-bottom: 0cm;">A lire: Soixante-neuf tiroirs de <b>Goran Petrovic</b>, traduits par Gozko Lukic et Gabriel Iaculli, initialement aux éditions du Rocher( 2003) et édité ensuite en poche dans la collection <i>Motifs</i> Serpent à plumes( 2006)</div></li>
</ul><ul><li><div style="margin-bottom: 0cm;"><a href="http://www.lexpress.fr/culture/livre/soixante-neuf-tiroirs_807736.html">Un extrait de soixante-neuf tiroirs</a></div></li>
</ul><div style="margin-bottom: 0cm;"><br />
</div>edwoodhttp://www.blogger.com/profile/01713248479216797340noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5936397440233615254.post-2213614084065471402011-01-09T09:01:00.001+01:002011-01-09T18:51:50.772+01:00La taverne part à l'abordage du Bathyscaphe<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj5qe1W8N4cJZcY-2Z2myWtJgjM3Km1uDNI6evi_YPkhaErpD-apf4bD3ZQ57eekjTrBN7WBSStfA0sQqbB87qg1pZEiPr7u91jvrzu-LhtM42LYuKiBqvORp4QNKNpeboxRCT_lJpDD6OA/s1600/bathyscaphe.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="300" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj5qe1W8N4cJZcY-2Z2myWtJgjM3Km1uDNI6evi_YPkhaErpD-apf4bD3ZQ57eekjTrBN7WBSStfA0sQqbB87qg1pZEiPr7u91jvrzu-LhtM42LYuKiBqvORp4QNKNpeboxRCT_lJpDD6OA/s400/bathyscaphe.jpg" width="400" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Bathyscaphe conçu en l'honneur de la sortie du numéro 2 de la revue homonyme</td></tr>
</tbody></table><div style="text-align: center;"><blockquote><div style="font-family: Times,"Times New Roman",serif;"><br />
</div><i><span style="font-family: Times,"Times New Roman",serif;">"Enfin un journal cher et luxueux pour les gens qui ne s'intéressent pas à l'actualité!" </span></i></blockquote></div><br />
<span style="font-family: "Courier New",Courier,monospace;">Ainsi s'autoproclame <i>Le Bathyscaphe</i>, revue hétéroclite, cosmopolite et anachronique qui a battu des records de vente aux quatre coins de la planète. </span><span style="font-family: "Courier New",Courier,monospace;">Nous présentions dans la taverne il y a peu </span><a href="http://latavernedudogeloredan.blogspot.com/2010/11/des-aventures-sous-marines-qui-nous.html" style="font-family: "Courier New",Courier,monospace;">les réalisations</a><span style="font-family: "Courier New",Courier,monospace;"> de quelques membres d'équipage et électrons libres gravitant autour. Cet automne, la revue québécoise a lancé, contre vents et marées littéraires, son sixième numéro qui a été salué par <i>L'Ancien Observateur</i> comme étant la plus indispensable des réalisations de ces dix dernières années pour les amateurs de curiosité. Je me garde de reproduire ici les manchettes diffamatoires du <i>Canard déchainé</i>, dont le ton est sûrement dû à la jalousie de découvrir dans un journal rival une double page consacré à son cousin de l'ordre des ansériformes.</span> <span style="font-family: "Courier New",Courier,monospace;">La taverne a mené l'enquête auprès du principal intéressé, <b>Benoît Chaput</b>, pour tenter d'en savoir plus.</span><br />
<br />
<br />
B.C.: Avant de répondre il me faut préciser que Le Bathyscaphe est animé par un collectif de quatre personnes, les éditions <i>Seuls maîtres à bord</i>, soit <b>Hermine Ortega</b>,<b> Antoine Peuchmaurd</b>, <b>Alexandre Sanchez</b> et moi-même. Je ne puis répondre aux questions qu'en mon propre nom : chaque instigateur aurait probablement sa propre version des choses, de petits contes variant sensiblement au gré des perspectives.<br />
<ul style="font-family: inherit;"><li><i>Ed: En choisissant un tel nom pour une revue, aviez-vous l'intention de conjurer le sort, en partant du principe qu'il fallait absolument couler pour exister?</i></li>
</ul>Je ne le dirais pas comme ça. En fait, il me semble que trouver un nom -- que ce soit pour une revue, une association de malfaiteurs ou un objet familier -- est l'occasion d'un possible jeu collectif plein de charme où le hasard et les libres associations d'idées ont leur mot à dire. Dans ce cas, Hermine Ortega nous est très rapidement arrivée avec ce nom accompagné de sa définition du dictionnaire qui nous ont tout de suite séduits. Cette définition, que l'on trouve en sous-titre à chaque numéro est la suivante : <i>"Appareil habitable destiné à conduire des observateurs dans les grandes profondeurs sous-marines"</i>. Nous aimions cette idée d'exploration sous la surface de la culture. Et que notre esquif ne craignait pas d'être coulé dans l'affrontement puisque c'était par le fond qu'il était le plus à son aise. Il est vrai que notre approche de la culture se fait plutôt du côté des soi-disant "perdants". Comme tout un chacun, nous ne sommes pas grand choses et surtout pas des "spécialistes". C'est en qualité d'êtres sans qualités, de "docteurs en rien" que nous aimons observer et dériver au gré des courants sous-marins.<br />
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<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhUWA9Z5KSWuLirhWLQKbrc9LgvT0tvrcaDIQkZrNh3SPOwHSfUR5PMO8ltvj16FOdSkKwtlF63IMHoVb1Gb3LkBY0zg6QB4rOMUfrrjCBFdVr39fEBM7yBzpBLs-6Q5YTczBu475ZAQTAJ/s1600/Sous-marin+%25C3%25A0+ressort.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="268" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhUWA9Z5KSWuLirhWLQKbrc9LgvT0tvrcaDIQkZrNh3SPOwHSfUR5PMO8ltvj16FOdSkKwtlF63IMHoVb1Gb3LkBY0zg6QB4rOMUfrrjCBFdVr39fEBM7yBzpBLs-6Q5YTczBu475ZAQTAJ/s320/Sous-marin+%25C3%25A0+ressort.jpg" width="320" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Composition de la boisson appelée Submarino</td></tr>
</tbody></table><br />
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<ul><li><i>En vous lisant, on a régulièrement la troublante l'impression d'avoir affaire à une bande d'enquêteurs profanes qui portent un regard presque naïf sur une question mineure, et qui s'évertuent de la considérer de la plus haute importance, comme ces aventures du sujet abordant les sources des oies de cravan.</i></li>
</ul>Ce jeu n'en vaut la chandelle que si la question "mineure" révèle en bout d'enquête des enjeux étonnants : comme pour tout bon jeu, avec un minimum d'application et de sérieux enfantins, il est possible d'en venir à ébranler bien des certitudes du monde des questions "majeures". Ainsi de cette histoire des sources de <i>L'Oie de Cravan</i> : j'avais d'abord été quelque peu intimidé par le fait que <b>Jean-Yves Bériou</b>, l'auteur de la chronique "Les aventures du sujet", propose comme enjeu de son enquête le nom même de la maison d'édition que j'anime. Mais en découvrant où cela le mène, je suis resté bouche bée : à partir d'une dérive sur les mots "Oie de Cravan", il arrive vraiment à toucher aux axes essentiels de la poésie : les principes d'analogie, le génie des métamorphoses, le rapport secret des mots et du monde. Un regard presque naïf voit parfois clair à travers les eaux les plus troubles.<br />
<ul><li><i>Comment Le Bathyscaphe a-t-il vu le jour?</i></li>
</ul>J'ai toujours aimé les petites revues. Fasciné par celles des avant-gardes historiques mais aussi par des revues contemporaines comme <i>Gnou</i> et <i>Mandrill</i> autour de <b>Thierry Horguelin </b>ou<i> l'Hôtel Ouistiti</i> de <b>Jimmy Gladiator</b>. J'ai eu beaucoup de plaisir à découvrir que<b> Christian Dotremont</b> en avait créé plusieurs, souvent pour un seul numéro, avec des numérotations parfaitement farfelues. Mais c'est à l'occasion d'une conversation avec Antoine Peuchmaurd et Valerie Webber, sa copine, que l'idée du Bathyscaphe est née. La conversation tournait autour du sexe. Valerie, beaucoup plus jeune et expérimentée que moi, avait des opinions sur le sujet qui me choquaient quelque peu. C'était à la fois son domaine de travail et d'études universitaires. Comme elle est anglophone, nous nous sommes dit qu'il serait intéressant de faire une publication avec une "sex column" où elle pourrait étaler son expertise dans sa langue. J'envisageais alors d'avoir une chronique naïve en réponse à la sienne et de mettre ainsi nos différences de perspectives au grand jour. J'avais lu dans un ouvrage sur son histoire que la <i>Revue Blanche</i> publiait ainsi des chroniques contradictoires et l'idée m'avait beaucoup plu. Cette conversation a vraiment été l'étincelle de départ. Au fil des discussions la revue a pris une forme particulière : nous avons gardé l'idée d'une revue bilingue, où chacun pouvait s'exprimer dans sa langue sans que son texte ne soit traduit. Ceci est particulièrement important parce que Montréal est une ville où nous sommes, par les deux langues qui y dominent, à la croisée des chemins entre l'Europe et l'Amérique. Naturellement est venue s'ajouter l'idée d'avoir sur ces continents des correspondants un peu partout (New-york, Toronto, Montréal, Liège, Paris, Brive, Marseille, Genève).<br />
<ul><li><i>Quel en est le fil conducteur?</i></li>
</ul>Question difficile entre toutes! Le Bathyscaphe est d'abord un journal de culture inactuelle. C'est à dire que nous nous intéressons à la culture en tant que richesse dans nos vies comme totalités, certainement pas en tant que produit tout frais dont il faudrait assurer la mise en marché. Nous parlons des livres, musiques, architectures, poésies, ambiances, films etc... qui nous aident à vivre ou qui, au contraire, nous étouffent. Chacun le fait à sa façon, par la chronique. Le Bathyscaphe n'est pas un journal de création littéraire mais il est vrai que parfois la frontière est mince. Et, paradoxalement sans doute, nous encourageons la création visuelle de nos dessinateurs et photographes. En fait, Le Bathyscaphe se forme au gré des courants. Il nous est souvent difficile de le définir mais chaque numéro ressemble au Bathyscaphe et ne ressemble à rien d'autre!<br />
<ul><li><i>Quelle est la parenté entre cette dernière et l'Oie de Cravan?</i></li>
</ul>On peut lire dans l'ours du Bathyscaphe que la revue est publiée<i> "par les éditions Seuls maîtres à bord en collaboration avec L'Oie de Cravan"</i>. Cela signifie surtout que je me charge de la mise en page du journal. Je suis l'éditeur de <i>L'Oie de Cravan</i> et membre fondateur du comité éditorial de Bathyscaphe. Il s'agit donc d'une grande proximité, mais la parenté s'arrête là. De fait, le Bathyscaphe constitue une entité financièrement et éditorialement indépendante de <i>L'Oie de Cravan</i>. Mais là, comme partout ailleurs, les frontières sont heureusement souvent floues.<br />
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<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgK6hAEL-1vhFN2Vhuw6U0xm3NYIlDxr1NDqiBUlzANAtaEKQCqeYsRTrB7gcUYIZ5v0Hp5O-gQ19qn7Pmu4jRUxV-MF3MFu6_ujtW9oImbWkAdFzaW2ISqnEF0gUBRf5lX1s8KYEJZe0l_/s1600/Bathyscaphe_Archimede.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="262" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgK6hAEL-1vhFN2Vhuw6U0xm3NYIlDxr1NDqiBUlzANAtaEKQCqeYsRTrB7gcUYIZ5v0Hp5O-gQ19qn7Pmu4jRUxV-MF3MFu6_ujtW9oImbWkAdFzaW2ISqnEF0gUBRf5lX1s8KYEJZe0l_/s400/Bathyscaphe_Archimede.jpg" width="400" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Bathyscaphe Archimède, timbre de 1963 dessiné et gravé par <b>Albert Decaris</b></td></tr>
</tbody></table><ul><li><i>En prenant justement en compte l'aspect financier de l'entreprise, comment peut-on de nos jours avoir l'audace de lancer une revue?</i></li>
</ul>Il faut sans doute une joyeuse inconscience. Le fait est que la quête de carburant pour faire tourner l'hélice est bien difficile. Fonctionnant volontairement sans subvention, ni publicité, il n'y a que les abonnements et les ventes directes pour nous faire avancer. Jusqu'à ce jour nous avons réussi à maintenir le prix de vente au numéro à 5 dollars pour l'Amérique et 5 euros pour l'Europe. Et l'abonnement à 20 dollars ou 25 euros. Ça suffit à peine à mettre le timbre sur l'enveloppe et il va falloir nous résoudre à monter quelque peu ces prix. Mais nous croyons en la valeur de ce luxe d'un submersible qui voyage sous enveloppe timbrée. Pour certains, dont nous sommes, la vie ne vaut que par les brèches qu'offre ce genre de luxe lent auquel appartient le sous-marin postal.<br />
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<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj7NbCyLi083cTMMY8W5XI1XEkFr7P9MVkA7zdkbKdPBXYGJXh3qOJkhOqBjO9C1hDuGX_thu_DQu_NinfwfVeCPbBkDJbvHYUrJGmiu9R5ZO0AGhVLE8F81Iudcas5wVQts87uxkg-uwmm/s1600/Bathyscaphe+6_couv.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj7NbCyLi083cTMMY8W5XI1XEkFr7P9MVkA7zdkbKdPBXYGJXh3qOJkhOqBjO9C1hDuGX_thu_DQu_NinfwfVeCPbBkDJbvHYUrJGmiu9R5ZO0AGhVLE8F81Iudcas5wVQts87uxkg-uwmm/s320/Bathyscaphe+6_couv.jpg" width="242" /></a></div><br />
<ul><li><a href="http://lebathyscaphe.blogspot.com/2010/09/arrivee-du-sixieme-bathyscaphe.html">A découvrir: Le Bathyscaphe, sixième du nom</a> de la revue qui met de l'eau dans son encre, en vente au prix modique de cinq piastres.</li>
<li><a href="http://shop.lepressier.com/collections/vendors?q=Bathyscaphe">Le pressier vous propose ses bons et loyaux services pour vous procurer l'un des exemplaires de la revue. </a></li>
</ul>edwoodhttp://www.blogger.com/profile/01713248479216797340noreply@blogger.com2tag:blogger.com,1999:blog-5936397440233615254.post-33823339631209473972011-01-02T12:43:00.002+01:002011-01-02T12:50:24.692+01:00Un tryptique érotique signé Léo Barthe<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh6OG8xrMds0ulajTv8JYDYY5mAwARF5yw1yI5v_ne0QBRGxXOUhUxPwVx4nBA7jwh7JRZJN4ZXUSx8gqRwIEfaZNixiUm2B7DG-27H7afQhDbpqVY5RMm3YatVBQ5O1q549fcNFYQsO9sS/s1600/L%25C3%25A9o+Barthe+%25C3%25A9rotique.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEh6OG8xrMds0ulajTv8JYDYY5mAwARF5yw1yI5v_ne0QBRGxXOUhUxPwVx4nBA7jwh7JRZJN4ZXUSx8gqRwIEfaZNixiUm2B7DG-27H7afQhDbpqVY5RMm3YatVBQ5O1q549fcNFYQsO9sS/s400/L%25C3%25A9o+Barthe+%25C3%25A9rotique.jpg" width="285" /></a></div><br />
Malgré mes recherches laborieuses effectuées sur le net, j'ai dû constater que <i>De la Vie d'une chienne</i>, triptyque édité chez Climats, fait suffisamment rare pour être signalé, n'a en toute vraisemblance, pas laissé la moindre trace d'une quelconque chronique. Pourtant, il s'agit assurément d'une oeuvre représentative de l'art érotique selon <b>Léo Barthe</b> qui nous invite à découvrir une série de récits narrés par l'aubergiste, suite à la rencontre ineffable que vient de faire un voyageur au sein d'un domaine situé à la lisière du rêve.<br />
Chaque scène, hormis la première, sera narrée de façon indirecte par l'intermédiaire d'un autre personnage, ajoutant ainsi à l'incertitude inhérente à certains détails que l'on pourrait croire inventer de toutes pièces afin de divertir l'auditeur et de renforcer son immersion. On comprend vite que les faits et gestes des différents protagonistes qui parsèment ces histoires obéissent à une force qui les dépasse, comme si ces derniers n'étaient pas tout à fait maître de leurs agissements, comme si les pêchés mis à nu devait être contrebalancés par une innocence fondamentale, symboliquement représentée par l'anonymat des figures féminines qui traversent la narration.<br />
En ayant recours à son nom de plume érotique, Jacques Abeille exprime le besoin de ses personnages à raconter ce qui ne peut être dit de face, de conserver une certaine distance vis-à-vis de situations particulièrement embarrassantes, de conserver leur intégrité essentielle. Qu'il s'agisse d'un voile, d'un masque, de l'obscurité, ou de la position des corps, un médiateur invisible s'efforce, semble-t-il, par son sens de la mise en scène, de dissimuler l'identité des femmes. Dans son indécence à se montrer dans les circonstances qui nécessiteraient une certaine discrétion, le corps acquiert une autonomie qui lui permet d'emprunter les caractéristiques du visage, et de s'emparer ainsi du potentiel expressif qui lui est habituellement réservé:<br />
<blockquote style="font-family: Times,"Times New Roman",serif;"><i>« Votre conduite toujours, le plaisir que vous éprouvez à votre nudité, les effluves, messages muets qui émanent avec constance de votre peau, portent vers le dehors votre désir qui allume celui de quiconque vous rencontre. Pourtant, jamais à ce point n'a explosé votre obscénité. Vos cuisses s'étirent de part et d'autre de votre buste qui tente de s'enrouler sur lui-même comme pour rapprocher vos bouches opposées. Dans ce mouvement que les liens maintiennent à son point de tension extrême, vos hanches se soulèvent et votre cul nargue le ciel. Vos fesses largement s'évasent et leur sommet est un creux ouvert que ponctue votre trou honteux. Vous l'exhibez avec une folle insolence. Je lui parle et le souffle de ma voix caresse ses sombres fronces. »</i> <i>( <u>Histoire de la Bonne</u></i><i>) </i></blockquote><br />
<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg-RiiF3c0dCUAZOSn47folM4gaoEU9PCjGCGOu-62WYF7zRsOQ7PjPzUJtFabWDqSqsaO9GYrwfBHv6fBqJQeeOu9Z-_ipAmlKLz7bMcSLVZ8NUkpJWD_opZlyWuwjc2jHnsRsGPpWeF5A/s1600/La+liseuse+de+roman+%25281853%2529+Antoine+Wiertz.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="315" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg-RiiF3c0dCUAZOSn47folM4gaoEU9PCjGCGOu-62WYF7zRsOQ7PjPzUJtFabWDqSqsaO9GYrwfBHv6fBqJQeeOu9Z-_ipAmlKLz7bMcSLVZ8NUkpJWD_opZlyWuwjc2jHnsRsGPpWeF5A/s400/La+liseuse+de+roman+%25281853%2529+Antoine+Wiertz.jpg" width="400" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;"><b>Antoine Wiertz</b>, La liseuse de roman (1853) </td></tr>
</tbody></table> <br />
L'impossibilité d'embrasser intégralement la femme soumise, loin d'amenuiser la violence du désir, démultiplie au contraire, afin de pallier à cette attente supplémentaire, le besoin de faire revivre à toute heure du jour et de la nuit les images obsédantes, de capturer à la dérobée l'objet des fantasmes. Derrière un buisson, à travers une porte entrouverte ou l'orifice caché derrière une peinture, le décor participe au processus cyclique du désir, qui prend naissance au moment de l'exhibition, incarnant la passivité de l'observateur tapi dans l'ombre. Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si la première narration, celle qui ouvre <i><u>Histoire</u></i><i><u> de la bergère</u></i>, est introduite suite au tableau indécent que vient d'épier le voyageur rendant visite au tenancier de l'auberge. Cette incapacité à être acteur génère une frustration qui ne peut être tout à fait réfrénée. Ainsi, la femme symbolise la tentation du moment ardemment souhaité où les rôles seront intervertis, durant lequel le spectateur deviendra finalement l'acteur assouvissant ses pulsions à l'insu de celle qui se jouait auparavant de lui. En perpétuelle mutation, les protagonistes trouvent une part prédominante de leur épanouissement à pouvoir se glisser tour à tour dans la peau de différents rôles, susceptibles de révéler de nouvelles perspectives à leurs divertissements. Dans <u><i>Histoire de la bonne</i></u>, il y a d'abord cette transformation en chienne, dictée par le patron de la maison. La première s'empare également du journal de l'étudiant pour vivre les événements passés de l'autre côté du miroir. Par la suite, elle souhaitera métamorphoser le jeune homme en esclave sexuel pour s'approprier le plaisir de dominer. Dans <u><i>Histoire de l'affranchie</i></u>, le maître des lieux organise des soirées où il laisse sa femme à la merci de ses invités afin de la découvrir sous un angle nouveau. En confiant son histoire au scribe, la bonne le rend complice des jeux interdits qu'elle s'ingénie à rendre passionnant pour faire revivre d'autant plus intensément sa vie secrète.<br />
<i>« Mon autorité est telle qu'elle se laisse faire avec une passivité qui m'exalte</i><i>. »</i>,<i> </i>déclare ainsi la bonne devenue affranchie en guidant le modèle du peintre qui s'est attaché ses services.<i></i><br />
<i><br />
</i><br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiahYl9bzTLG43DOE9AzwNkj7iuxrCVEtV8Pvc3slfEbJL3GIDDQzhhtbqMvqd7OhtS5qOalfjq0zGgRKrlXAs0r5cbsof0u20Q_YmwEG84NIHe83oGtwwSwb4175gquqmwVSJe1mgmpwKd/s1600/Couv_Histoire+de+la+berg%25C3%25A8re+poche.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="200" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiahYl9bzTLG43DOE9AzwNkj7iuxrCVEtV8Pvc3slfEbJL3GIDDQzhhtbqMvqd7OhtS5qOalfjq0zGgRKrlXAs0r5cbsof0u20Q_YmwEG84NIHe83oGtwwSwb4175gquqmwVSJe1mgmpwKd/s200/Couv_Histoire+de+la+berg%25C3%25A8re+poche.jpg" width="119" /></a></div>A plus forte raison, l'auteur anticipe la participation du lecteur qui devra lui aussi s'immiscer à la place de l'une ou l'autre de ses créations afin de jouir complètement des pages qui lui sont offertes.<br />
Les compositeurs de cette partition érotique tissent un concerto tumultueux qui n'est pas sans conséquences dans une dimension parallèle, mais dont on ignore cependant tous les tenants et les aboutissants. Dans <u><i>Histoire de la bonne</i></u>, les capacités de concentration de l'étudiant fluctuent en fonction de l'évolution de ses aventures nocturnes. Ce dernier s'exclame: <i style="font-family: Times,"Times New Roman",serif;">« Contre toute raison j'ai le sentiment obscur d'avoir lancé un maléfice avec la catastrophique légèreté d'un apprenti sorcier.</i><i style="font-family: Times,"Times New Roman",serif;">»</i><br />
Dans <u><i>Histoire de la bergère</i></u>, le paysan prend la décision finale de demander une rémunération pour les services qu'il rendait avant en échange d'une couche rudimentaire et de maigres provisions. Enfin dans <u><i>Histoire de l'affranchie</i></u>, la bonne puise dans sa libération sexuelle matière à créer le tissu novateur de son existence, lui permettant de devenir elle-même l'artisan de son bonheur.<br />
<br />
L'élégance de l'écriture se heurte régulièrement à la brutalité du langage utilisé pour rendre compte de toute l'ampleur des scènes évoquées, donnant lieu à des contrastes pour le moins éloquents.<br />
L'enjeu de ces récits se situe en grande partie en marge du caractère érotique des scènes, dans la mise en branle perpétuelle de l'imagination du lecteur qui devra, afin de profiter de la substantifique moelle de l'oeuvre, deviner la convergence des destins, les relations qui se tissent entre eux, et entrevoir les parts d'ombre de la narration qui se trament en coulisse du récit derrière les mises en abîme savamment élaborées.<br />
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<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEivj8S6Qa4Uf5tWBu22G5cKW9Jz4f_uo1hDKuis7aQyrIs43geL2sndsg7LyWNR0MWUXjgWBNLAhHvTm5roBrdRxKBDjMUOLJycT8n4XGrg3UnX23L4OIPTAN59FBTOU0b5lMoz4JRnvWE6/s1600/Couv_Histoire+de+la+bonne.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEivj8S6Qa4Uf5tWBu22G5cKW9Jz4f_uo1hDKuis7aQyrIs43geL2sndsg7LyWNR0MWUXjgWBNLAhHvTm5roBrdRxKBDjMUOLJycT8n4XGrg3UnX23L4OIPTAN59FBTOU0b5lMoz4JRnvWE6/s320/Couv_Histoire+de+la+bonne.jpg" width="227" /></a></div><ul><li>A découvrir: Chez Climats, dans la collection Climax, De la vie d'une chienne, trilogie érotique de Léo Barthe, comprenant Histoire de la bergère( 2002, paru aussi en poche), Histoire de la bonne( 2002) et Histoire de l'affranchie( 2003). </li>
</ul>edwoodhttp://www.blogger.com/profile/01713248479216797340noreply@blogger.com1tag:blogger.com,1999:blog-5936397440233615254.post-12936801694515362322010-12-26T01:24:00.001+01:002011-01-16T18:34:03.091+01:00Bartleby nous dévoile son univers<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjmRTpPWVx0rZxBIqkxuf2UJDmMgOkbkFxWIRfo-M_WDOaZIWxDJiu0pwreK5H2kirjCma0scXaG7Fr6y1_RlrGJr38oa_FtQwwDFmLLStyxYFa7IdnH7wMm7wOMfMO_dA3zc6Ma-l7vTnc/s1600/Bartlesyeuxouverts.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="245" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjmRTpPWVx0rZxBIqkxuf2UJDmMgOkbkFxWIRfo-M_WDOaZIWxDJiu0pwreK5H2kirjCma0scXaG7Fr6y1_RlrGJr38oa_FtQwwDFmLLStyxYFa7IdnH7wMm7wOMfMO_dA3zc6Ma-l7vTnc/s400/Bartlesyeuxouverts.jpg" width="400" /></a></div><br />
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<span style="font-family: "Courier New",Courier,monospace;">Eric Bonnargent a accepté en cette fin d'année de se confier à la taverne à propos de l'interruption de son blog </span><i style="font-family: "Courier New",Courier,monospace;"><a href="http://bartlebylesyeuxouverts.blogspot.com/">Bartleby Les yeux ouverts</a></i><span style="font-family: "Courier New",Courier,monospace;">, de ses nouveaux projets, et d'aborder également quelques questions gravitant autour de la littérature et la blogosphère.</span><br />
<span style="font-family: "Courier New",Courier,monospace;">Merci à lui de s'être prêté au jeu si spontanément.</span><br />
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<ul style="font-family: Times,"Times New Roman",serif;"><li><i>Qu'est-ce qui motive ta décision de mettre un terme à ton blog<a href="http://bartlebylesyeuxouverts.blogspot.com/"></a> à la fin de l'année, et de ne plus collaborer au <a href="http://fricfracclub.com/spip/">Fric Frac club</a> ? </i></li>
</ul>Pour le FFC, c’est un peu long et pas très intéressant. Disons que je n’avais de contact qu’avec deux ou trois membres et que je ne me suis donc jamais senti à ma place dans ce collectif. Ma personnalité ne s’accordait pas avec celle des autres, de certains en particulier. La scission est devenue irrémédiable après <a href="http://bartlebylesyeuxouverts.blogspot.com/2010/04/entretien-entre-asensio-bartleby-et.html">l’entretien</a> que <b>François Monti</b> et moi-même avons réalisé avec <b><a href="http://stalker.hautetfort.com/">Juan Asensio</a></b>, entretien que le FFC, pour des <a href="http://bartlebylesyeuxouverts.blogspot.com/2010/06/sympathy-for-devil.html">raisons obscures </a>sur lesquelles je me suis déjà expliqué, a refusé de publier (François Monti étant pourtant l’un des fondateurs du FFC). C’était la première fois qu’un veto était posé sur le texte de l’un d’entre nous. Quoi qu’il en soit, je suis toujours un lecteur du FFC qui est sans aucun doute l’un des meilleurs blogs littéraires disponibles sur le net. <br />
<div class="MsoNormal" style="margin-bottom: 0pt;">En ce qui concerne mon blog, il aura duré trois ans et demi. Il fermera le 09 janvier, les textes seront disponibles quelques jours puis il disparaîtra totalement. Je publie deux articles par semaine et cela devient trop contraignant. Les lecteurs ne s’en rendent pas compte, mais c’est beaucoup, beaucoup de travail et j’ai des envies d’autre chose. C’est pourtant un peu difficile de disparaître brutalement et c’est pourquoi, le 09 janvier au soir, débutera une <a href="http://anagnoste.blogspot.com/">nouvelle aventure </a>en collaboration avec<b><a href="http://villemain.canalblog.com/"> Marc Villemain</a></b>( dont le prochain roman sortira au printemps chez <a href="http://www.quidamediteur.com/">Quidam</a>). Nous voulons consacrer tous les deux moins de temps à nos blogs personnels, d’où l’idée d’en créer un ensemble. La plupart du temps, nous ne parlerons pas des mêmes livres et, lorsque nous le ferons, ce sera à partir de points de vue différents, mais complémentaires. Je crois qu’il s’agira d’une belle aventure car, contrairement à ce qui s’est passé avec le FFC, nous sommes réellement amis et savons qu’entre nous il n’y aura ni problèmes d’ego ni mesquineries d’aucune sorte. </div><div class="im"><div class="MsoNormal" style="margin-bottom: 0pt;"><span style="color: black; font-family: "Garamond","serif";"></span></div></div><ul><li><i>Peux-tu me parler de tes activités autour du livre dont, malgré notre intimité certaines d'entre elles me sont encore inconnues ? </i></li>
</ul>Ne t’inquiète pas, je ne dévoilerai rien à propos de notre intimité…<br />
Mon activité principale reste donc pour quelques semaines encore mon blog. Je collabore aussi au <a href="http://www.magazinedeslivres.com/%20">Magazine des Livres</a> pour lequel j’écris quelques chroniques et réalise des entretiens avec des écrivains français ou étrangers. Dans le dernier numéro, par exemple, je m’entretiens avec <b>Éric Pessan</b> à propos d’<a href="http://www.albin-michel.fr/rentree-litteraire/auteurs/eric-pessan/"><u>Incident de personne</u></a>, mais aussi avec <b>Horacio Castellanos Moya</b> au sujet d’<a href="http://www.lesallusifs.com/livres/livre.php?id=88"><u>Effondrement</u></a>. <br />
Mais ce qui, actuellement m’occupe le plus, est la finalisation de mon livre qui sortira au printemps prochain aux <a href="http://www.vampireactif.com/">Éditions du Vampire Actif</a>. Il s’agit d’un essai intitulé <a href="http://www.vampireactif.com/category/les-entretiens/">Petit traité de littérature décalée</a>. Ce livre est construit autour de chroniques pour la plupart déjà publiées sur mon blog (avec aussi des inédits), mais réécrites pour l’occasion. L’atopia, c’est-à-dire le décalage que certains personnages peuvent ressentir avec la réalité quotidienne, était le fil conducteur (pas toujours respecté) de mon blog. Ce décalage naît d’une prise de conscience aiguë de sa propre individualité et entraîne un mal-être pouvant se manifester sous différentes formes : notamment, la dépression, la marginalité, la perte de contrôle, la disparition, voire le suicide. Mon livre a pour objet de présenter cette notion et d’offrir un panorama sur la littérature mondiale en parlant, autrement, je l’espère, de textes assez connus et de livres qui, injustement, le sont beaucoup moins. <b>Styron</b>, <b>Moravia</b>, <b>McCarthy</b> ou <b>Borges</b> côtoient <b>Marechera</b>, <b>Mallard</b>, <b>Liscano</b> ou <b>Solstad</b>.<br />
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<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhqW9pg8NRHcOct-IGQf6R4M7WEJbESCpFmspq7H5PV74B3Wav-OGzEv4CRM_Cl8QnIXo5OamLbdPdWnC_D3a3q5qOvqTC7AlxHzDxBdzUEbbMo8xm2DAyxyNHFx2FtpIznZkOtyuRabc-h/s1600/Bartleby+Melville.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhqW9pg8NRHcOct-IGQf6R4M7WEJbESCpFmspq7H5PV74B3Wav-OGzEv4CRM_Cl8QnIXo5OamLbdPdWnC_D3a3q5qOvqTC7AlxHzDxBdzUEbbMo8xm2DAyxyNHFx2FtpIznZkOtyuRabc-h/s320/Bartleby+Melville.jpg" width="320" /></a></div><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"></div><br />
<ul><li><i>Est-ce que le décalage dont tu parles, cette notion d'atopia que tu t'efforces de mettre en valeur, ne s'oppose-t-elle pas au nom de ton blog, qui mettrait davantage en lumière une sorte de révélation? </i></li>
</ul>Non pas du tout, bien au contraire. L’un des chapitres de ce livre sera d’ailleurs consacré au syndrome <i>Bartleby</i> que <b>Vila-Matas</b> définit dans <u>Bartleby et Cie </u>comme une <i><span style="font-family: Times,"Times New Roman",serif;">« attirance envers le néant, qui fait que certains créateurs, en dépit (ou peut-être précisément à cause) d’un haut niveau d’exigence littéraire, ne parviennent jamais à écrire ; ou bien écrivent un ou deux livres avant de renoncer à l’écriture ; ou encore, après avoir mis sans difficulté une œuvre en chantier, se trouvent un jour littéralement paralysés à jamais ».</span></i> Le syndrome Bartleby est la manière dont certains écrivains ressentent cette atopia, ce sentiment d’étrangeté vis-à-vis de leur activité, l’écriture. Ma fascination pour le bartlebysme est l’un des points de départs de mon blog. Je n’ai jamais eu la moindre prétention messianique, j’avais simplement envie de parler de la difficulté à être, dans l’écriture et dans l’existence.<br />
<ul><li><i>Cette démarche de compilateur ne risque-t-elle pas dans le même temps de frustrer les fervents lecteurs de ton blog qui sont déjà familiers des articles qui y sont présentés, et laisser de marbre ceux qui ne sont pas lecteurs de ton blog?</i></li>
</ul>Je ne crois pas que ce livre puisse être frustrant et cela pour plusieurs raisons. Tout d’abord, une raison matérielle : lorsque le livre aura paru, le blog n’existera plus du tout et les articles qui y ont été publiés ne seront donc plus disponibles. Ne seront republiés sur le nouveau blog que les articles ne figurant pas dans le livre. Ensuite, quand bien même mes lecteurs connaîtraient par cœur mes articles, et je n’en doute pas !, ceux-ci ont été pour la plupart réécrits. De plus, certaines critiques sont inédites. Enfin, le Petit traité de littérature décalée n’est pas une simple compilation. Les critiques sont encadrées par deux textes dans lesquels j’explique en quoi consiste précisément cette notion d’atopia et de quelle façon elle se retrouve au centre de tous les grands chefs-d’œuvre de la littérature. <br />
<ul><li><i>Comment envisages-tu la prolifération de blogs traitant de littérature ? </i></li>
</ul>Tout dépend de quel type de blog on parle. Je distingue les blogs littéraires des blogs de lecture. Je précise que distinguer ne veut pas dire hiérarchiser ou mépriser. Les blogs de lecture, il est vrai, prolifèrent. Un blog de lecture est un blog qui propose le résumé d’un livre et en donne un avis subjectif. En gros, il s’agit pour le blogueur de dire s’il a aimé ou non tel ou tel livre. Il y en a de très bien faits, comme <a href="http://www.biblioblog.fr/">Biblioblog</a>, par exemple.<br />
Les blogs littéraires, eux, tentent d’analyser un livre de manière plus littéraire, en parlant du style, des thèmes, de la place de ce livre dans l’histoire de la littérature. Il y en a de très bons. Seule cette démarche m’intéresse et s’il m’arrive de jeter un coup d’œil sur quelques blogs de lecture, je ne lis régulièrement que les blogs littéraires. Ceux-ci, parce qu’ils sont plus exigeants, ne prolifèrent pas et, pour cela même, leur public est souvent plus restreint que celui des blogs de lecture. Les commentaires sont aussi plus rares parce que les blogs de lecture sont souvent des salons où l’on vient bavarder et donner son avis.<br />
<ul><li><i>A tes yeux, qu'est-ce qui définit une oeuvre convaincante ? </i></li>
</ul>Il est impossible de répondre à cette question en quelques lignes… La question est inépuisable, mais je dirais, pour faire simple, qu’une œuvre est convaincante lorsque son auteur a quelque chose à dire et a une manière singulière de le dire. Il y a trop de livres indigents, aussi bien au niveau du style que des idées. <b>Steiner </b>écrivait quelque part : <i>« L’artiste, le penseur exceptionnels donnent une nouvelle lecture de l’être. » </i>Un livre me convainc lorsqu’il offre une nouvelle lecture de l’être. <br />
<ul><li><i>Quel est le dernier livre que tu n'as pu finir ? </i></li>
</ul>Il faut que je réfléchisse… J’essaie toujours d’aller au bout d’un livre. Je me souviens, du coup, du premier livre que je n’ai pas fini, il s’agissait des <u>Mémoires d’une jeune fille rangée</u> de <b>Simone de Beauvoir</b>. En ce qui concerne le dernier, j’hésite entre <u>Le Sport et un passe-temps</u> de <b>Salter</b> et ce roman que tout le monde aime tant, <u>La Ville absente</u> de <b>Piglia</b>. Le premier m’a profondément ennuyé, le second profondément agacé. Il faut dire que j’ai du mal avec le postmodernisme. Ce toujours les mêmes recettes à l’œuvre et c’est pénible : un peu d’histoire, un peu de science, des personnages réels qui intègrent la fiction, des récits qui se multiplient, etc. Le contenu change à chaque fois, mais la forme est toujours la même. <br />
<ul><li><i>Quelles sont les opportunités offertes par les blogs que n'offrent pas d'autres médias ? </i></li>
</ul>Le blog offre la possibilité à n’importe qui de s’exprimer sur n’importe quel sujet. L’inconvénient, et le domaine littéraire n’échappe pas à la règle, est que c’est bien souvent pour dire n’importe quoi n’importe comment. L’avantage est que cela permet à de vrais lecteurs de parler de littérature et plus particulièrement d’une littérature dont les médias traditionnels ne parlent pas ou peu. Il y a quelques années, seuls les blogs parlaient de <a href="http://bartlebylesyeuxouverts.blogspot.com/search/label/Bola%C3%B1o"><b>Roberto Bolaño</b></a>, de <a href="http://bartlebylesyeuxouverts.blogspot.com/search/label/Vollmann"><b>William Vollmann</b></a>, etc. Ces lecteurs, souvent bien plus doués et cultivés que des journalistes professionnels, n’auraient jamais eu l’occasion de s’exprimer sans cette plate-forme qu’est le blog.<br />
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<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjC9dUO8MVUFSiTw4g4JdeogB7sNI90UPzxNydbiErBQlp2N-BQOC6Hda_TRQbtcU2mxUMMyeJHMGTKNBCYaybmkTLV6BHRs07m3ROVH1B5D1rmVeKJUACR0PiN-0y9gA8GeVEgCiYhKWAF/s1600/bartleby-2.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjC9dUO8MVUFSiTw4g4JdeogB7sNI90UPzxNydbiErBQlp2N-BQOC6Hda_TRQbtcU2mxUMMyeJHMGTKNBCYaybmkTLV6BHRs07m3ROVH1B5D1rmVeKJUACR0PiN-0y9gA8GeVEgCiYhKWAF/s320/bartleby-2.jpg" width="213" /></a></div><br />
<ul><li><i>Quelle est ta dernière lecture influencée par un blog ? </i></li>
</ul>Je ne m’en souviens pas, mais il m’arrive souvent d’acheter des livres en fonction de mes lectures sur la bouquinosphère. Sur ma table, il y a, par exemple, <b>Edgar Hilsenrath </b>et il y aura bientôt <b>Gabrielle Wittkop</b>.<br />
<ul><li><i>Sacrés voyages en perspective, très différents l'un de l'autre. Et par un magazine littéraire ? </i></li>
</ul>Je ne lis plus aucun magazine littéraire,… Il y est trop souvent question des mêmes livres, encensés de la même façon, démolis de la même façon et les articles, format oblige, ne sont généralement pas assez fouillés et ne disent, par conséquent, rien d’intéressant… <br />
<ul><li><i>Comment vois-tu l'arrivée du "livre virtuel" et la menace qu'il représente pour le livre sous sa forme "classique" ?</i></li>
</ul>Je ne la vois pas… Un livre virtuel n’a pour moi rien d’un livre. Il est possible que le phénomène prenne de l’ampleur, je ne sais pas, mais je n’y crois pas. Si, malgré tout, cela s’avérait être le cas, je serai terriblement malheureux. Tout d’abord, je ne supporte pas de lire sur un écran. Ensuite, j’aime l’objet-livre. J’aime les différents formats. J’aime le travail bien fait de certains éditeurs. Un livre a un poids, une odeur, une texture. Toucher du papier est une sensation très agréable. Au toucher, je suis capable de reconnaître certains éditeurs. Même le bruit que fait une page qui se tourne est agréable. J’aime le mince crissement que fait mon crayon sur le papier lorsque je souligne des passages ou écris des commentaires. Ma relation au livre est charnelle. Le livre numérique est désincarné, il n’est qu’une abstraction. La lecture numérique, c’est finalement un peu comme le cybersexe ; cela peut être pratique, mais il manque l’essentiel.edwoodhttp://www.blogger.com/profile/01713248479216797340noreply@blogger.com16tag:blogger.com,1999:blog-5936397440233615254.post-15047636946014908722010-12-22T01:00:00.012+01:002010-12-24T20:06:51.734+01:00Le parfum enivrant de la mort<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><br />
</div><table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiNf8n5te3Ha4BwlJL6Y7PSeBeMJiYnhCYb3PWy69eJ6oKKpbUUGxZJILNfRYTFa4LCNpqOzXTsVPAJsuqcUd3k191TxjAyJM_ctaT_EnNbfM3BciJxeNnG9QpC-p6J5OTtFPKJpd64geN9/s1600/Netsuke+2.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="300" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiNf8n5te3Ha4BwlJL6Y7PSeBeMJiYnhCYb3PWy69eJ6oKKpbUUGxZJILNfRYTFa4LCNpqOzXTsVPAJsuqcUd3k191TxjAyJM_ctaT_EnNbfM3BciJxeNnG9QpC-p6J5OTtFPKJpd64geN9/s400/Netsuke+2.jpg" width="400" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Netsuke en ivoire</td></tr>
</tbody></table><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"></div><br />
<span style="font-family: "Courier New",Courier,monospace;">En 1972, la sortie du <u>Nécrophile</u> chez Régine Deforges frappa les uns par l'immoralité du sujet abordé, les autres par l'élégance stylistique de la plume de l'auteur, signant ici le premier roman qui annonçait, par sa thématique, l'essentiel de sa bibliographie. Il faudra attendre près de trente années pour que le texte revoit le jour dans une édition digne de ce nom, enfin séparée du <u>Necropolis</u> de <b>Jean-Louis Degaudenzi</b>.</span><br />
<span style="font-family: "Courier New",Courier,monospace;">Point d'orgue de notre dossier consacré à Gabrielle Wittkop, qui nous quittait il y a tout juste huit ans, Anne-Françoise lui a consacré aujourd'hui même un très bel article qui lui rend un <a href="http://annefrancoisekavauvea.blogspot.com/2010/12/mort-et-amour-selon-wittkop-voyage-en.html">hommage</a> particulièrement touchant.</span><br />
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<blockquote><i><span style="font-family: Times,"Times New Roman",serif;">-Mais si, bien sûr, j'aime les garçons, mais aussi les femmes.</span></i><i><span style="font-family: Times,"Times New Roman",serif;"></span></i> </blockquote><blockquote><i><span style="font-family: Times,"Times New Roman",serif;">Ne pouvant vraiment pas lui dire: « J'aimerais beaucoup vos yeux révulsés, vos lèvres muettes, votre sexe glacial, si seulement vous étiez mort. Malheureusement, vous avez le très mauvais goût d'être en vie(...) ». </span></i></blockquote>Lucien N est antiquaire, activité qui le plonge du matin au soir dans l'ambiance délétère des objets façonnés par des artisans disparus. Amateur des netsuke japonais, ces statuettes mettant en scène l'érotisme sous l'œil complice de Thanatos, il y retrouve le plaisir immortel de ses ébats d'outre-tombe.<br />
Si la jouissance de l'accouplement avec le défunt est pour lui d'une incomparable acuité, à cause de la dégradation organique du trépassé, elle n'en demeure pas moins d'une frustrante précarité. A partir de la révélation de l'existence d'un amant potentiel, jusqu'à ce que l'état de ce dernier exige de s'en débarrasser dans la Seine, en passant par le périlleux parcours qui les emmène du cimetière jusqu'à leur refuge amoureux, le nécrophile est soumis à une urgence de tous les instants. Pour retrouver l'intimité favorable à l'épanouissement des amants, tandis qu'il s'ingénie à rendre le climat de la pièce abritant l'être cher aussi glacial que possible, Lucien oblige son entourage à ne le déranger sous aucun prétexte afin d'offrir à son couple l'intimité requise. L'imprévisibilité de certaines situations le pousse parfois à écourter les préparatifs lui offrant calme et volupté dans son monde calfeutré en le contraignant à se laisser aller à des étreintes improvisées au sein même du territoire de son partenaire érotique, ou à sa proche périphérie. Indistinctement attiré par les hommes et les femmes, les enfants et les personnes d'âge avancé, par les beautés et les êtres repoussants, l'enivrement de Lucien provient avant tout de l'odeur de bombyx se dégageant de leur peau car <i><span style="font-family: Times,"Times New Roman",serif;">« elle semble venir du cœur de la terre, de l'empire où les larves musquées cheminent entre les racines, où les lames de mica jettent leur lueur d'argent glacé, là où sourd le sang des futurs chrysanthèmes, parmi les tourbes pulvérulentes, les bourbes sulfureuses. L'odeur des morts est celle du retour au cosmos, celle de la sublime alchimie.» </span></i><br />
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<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgrlTf9dOnxa3bYK4TVpMe5Qfai7Yh0BWTTu0AMDe37NgEY88vYD0NodXWfROndxtT_lNOsxcF7lSjJDyTSjIK05ceCqSiuykLx2hIrV14pIWtLDob_rb1wKVZXiWatVGox_AboR8Y9e_I8/s1600/Netsuke+1.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="300" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgrlTf9dOnxa3bYK4TVpMe5Qfai7Yh0BWTTu0AMDe37NgEY88vYD0NodXWfROndxtT_lNOsxcF7lSjJDyTSjIK05ceCqSiuykLx2hIrV14pIWtLDob_rb1wKVZXiWatVGox_AboR8Y9e_I8/s400/Netsuke+1.jpg" width="400" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Netsuke en bois</td></tr>
</tbody></table><br />
L'accouplement qui fait ici l'objet d'une cérémonie fascinante est dépeint avec une ferveur transcendantale faisant penser au mariage ancestral du ciel et de la terre. De temps à autres, la mort révèle une découverte surprenante qui rehausse encore le charme discret du défunt, comme la fermeté des seins d'une femme âgée, ou la surprenante vigueur du sexe d'une vierge. Pour Lucien, la mort n'est pas une fin en soi, mais bien plutôt l'apothéose des qualités essentielles en germe. <br />
Son journal, réseau de récits, qui se répondent les uns les autres, donne à son aventure une trajectoire qui semble orientée par l'appel renouvelé des morts, ces derniers donnant l'impression de témoigner un désir réciproque pour l'amoureux transi. La fragmentation volontaire du parcours, rendue obligatoire par la forme utilisée, offre à la narration une intensité dont le point d'orgue se situe bien souvent dans les parts d'ombre, les révélations indicibles, les évocations suspendues. La précision chirurgicale de l'écriture, rendue possible par le discours à la première personne, créé les conditions propices au règne d'une suffocante atmosphère, et impossible toute éventualité de jugements de valeur. Étourdissante par sa dextérité à transgresser les règles morales,<b> Gabrielle Wittkop</b> ne se contente pas de susciter chez le lecteur des réactions épidermiques et une troublante empathie à l'égard de son personnage, elle provoque une réflexion ambivalente sur la relation ambiguë que Lucien, mais aussi certains de ses congénères, entretiennent, d'une façon ou d'une autre avec les morts. Le nécrophile sera ainsi plusieurs fois spectateur de cet amour interdit dont il est persuadé d'être l'exclusif détenteur vivant, tel un collectionneur qui aurait besoin d'avoir le privilège de se savoir l'unique propriétaire d'un pièce d'une rareté exemplaire. <br />
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<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiTuaOYvOMXse2YkLuvUshJVg-fljRDnxIul5a_n_y2L9nWGTOTWVAKLmeHEPJGO5iURjk16hB9RIMKz1wVddz-6qbyCscpxUt5EG42QqZbk9X2BGyFqH82KPExz1yEZcRKHRTZiXeZEX3g/s1600/Couv_Le+N%25C3%25A9crophile.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiTuaOYvOMXse2YkLuvUshJVg-fljRDnxIul5a_n_y2L9nWGTOTWVAKLmeHEPJGO5iURjk16hB9RIMKz1wVddz-6qbyCscpxUt5EG42QqZbk9X2BGyFqH82KPExz1yEZcRKHRTZiXeZEX3g/s320/Couv_Le+N%25C3%25A9crophile.jpg" width="217" /></a></div><br />
<ul><li>A redécouvrir: <a href="http://www.editions-verticales.com/fiche_ouvrage.php?id=20">Le Nécrophile de Gabrielle Wittkop chez Verticales dans une édition accompagnée de six collages de l'auteur</a></li>
<li><a href="http://www.fondationlaposte.org/article.php3?id_article=543">Gabrielle Wittkop, La passion de la mort</a>, par Nikola Delescluse, le légataire de son oeuvre qui lui a également consacré un <a href="http://blog.gabrielle-wittkop.fr/">blog</a>.</li>
<li><a href="http://vampirereactif.canalblog.com/archives/2008/12/22/11810043.html#comments">Gabrielle Wittkop ou le sublime de l'indicible, Un hommage signé Irma Vep, voilà deux ans de cela, à l'occasion de la commémoration de la mort de la Grande Dame. </a></li>
<li><a href="http://www.feliciedubois.com/img/articles/GabrielleWittkop.pdf">Entretien réalisé il y a près de dix ans à Paris par Félicie Dubois</a></li>
</ul>edwoodhttp://www.blogger.com/profile/01713248479216797340noreply@blogger.com3tag:blogger.com,1999:blog-5936397440233615254.post-65838229673167991152010-12-11T11:42:00.002+01:002010-12-11T15:46:19.333+01:00Trois destins placés sous l'oeil du corbeau<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj5XQNfcfSOHOiRRQ6tR-5A6S9lh-7BYel6NVdR8NM7a0EzVauhCUW5hqnFMv5HSwRlXDNrN1p0m-VMniXy45QZNo179_NzBjkE6Z73u5f2aX3ZwOk7rCRfF6bSq0JNv_BtNr0xwKl9K79I/s1600/Gravure+de+Gustave+Dor%25C3%25A9+bis+pour+illustrer+le+po%25C3%25A8me+Le+Corbeau+d%2527Edgar+Allan+Poe.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEj5XQNfcfSOHOiRRQ6tR-5A6S9lh-7BYel6NVdR8NM7a0EzVauhCUW5hqnFMv5HSwRlXDNrN1p0m-VMniXy45QZNo179_NzBjkE6Z73u5f2aX3ZwOk7rCRfF6bSq0JNv_BtNr0xwKl9K79I/s400/Gravure+de+Gustave+Dor%25C3%25A9+bis+pour+illustrer+le+po%25C3%25A8me+Le+Corbeau+d%2527Edgar+Allan+Poe.jpg" width="295" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Gravure de <b>Gustave Doré</b> pour illustrer le poème <u>Le Corbeau</u> d'<b>Edgar Allan Poe</b></td></tr>
</tbody></table><br />
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<span style="font-family: "Courier New",Courier,monospace;">En marge de ses oeuvres marquantes- mais quelle oeuvre de Gabrielle Wittkop ne l'est pas?-recueil de trois nouvelles mettant en scène un personnage dont on devine la mort imminente, </span><u style="font-family: "Courier New",Courier,monospace;">Les départs exemplaires</u><span style="font-family: "Courier New",Courier,monospace;"> démontre une nouvelle fois le charme envoûtant que possède la plume de cette artiste fascinante à plus d'un titre.</span><br />
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Comportant pas moins de trois fois le mot fétiche de Gabrielle Wittkop( « réticule ») et réutilisant- de façon moins systématique toutefois- le procédé anaphorique, caractéristique du fameux roman<a href="http://annefrancoisekavauvea.blogspot.com/2010/12/chronique-dune-mort-recommencee.html"> La mort de C.</a>, la première nouvelle nous immisce au XIXème siècle dans l'esprit d'Idalia, dessinatrice de 17 ans qui rêve d'une escapade ascensionnelle à bord d'un ballon. Quoi de plus naturelle dès lors de voir la jeune écossaise prendre le chemin qui la conduit au pied de la tour d'un donjon, surplombant le Rhin dans la région de Coblence, modèle inespéré d'artistiques esquisses, rêvassant de l'Highlander Bonnie Dundee, fidèle au roi James, jadis trahi par un valet félon. Suspendu le temps, animées les pensées primesautières par des rêveries au long cours qui font oublier l'heure des collations à partager en famille et le chemin du retour. En empruntant les escaliers qui la mènent au sommet des lieux, elle se retrouve coincée sur la plate-forme du <i>burg</i> à cause d'une bottine dont elle est persuadée qu'elle incarne la perfidie originelle subie par l'illustre Highlander. Affaiblie par les conditions climatiques et les contingences de sa situation, plus légère que les corbeaux qui la survolent, elle embarque, en esprit tout du moins sur la nacelle d'un vaisseau en partance vers des destinations plus proches du ciel que de la terre. D'appel en appel, de cris désespérés en cris de détresse, la jeune fille rivalise d'invention pour renouer contact avec la civilisation, allant jusqu'à propulser au loin des pigeons voyageurs qui pourraient se poser au pied d'un promeneur solitaire. Pourtant, malgré les signes qui interpellent la population locale, aucun de ses membres ne fait le rapprochement salutaire entre les différents indices, visions, réminiscences et échos de ses gémissements emportés par le vent, et la mystérieuse disparition, rendue désormais publique. <br />
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<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"></div><table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgKB6TRyg3ZsH33MTx6ffND26HG5MZ-fqVYky7OWn_N7x86k9SAFhy8Ead8bRsl624Zfc1UHOQNkgAwJNdCV-2oxUkTTAWvjf0hBBD-_EMJiQXyj0KQtorBc6XQd0zCCe7tYJAYKfSw0j-q/s1600/Paul_Gustave_Dore_Raven24.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEgKB6TRyg3ZsH33MTx6ffND26HG5MZ-fqVYky7OWn_N7x86k9SAFhy8Ead8bRsl624Zfc1UHOQNkgAwJNdCV-2oxUkTTAWvjf0hBBD-_EMJiQXyj0KQtorBc6XQd0zCCe7tYJAYKfSw0j-q/s400/Paul_Gustave_Dore_Raven24.jpg" width="300" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Gravure de <b>Gustave Doré</b> pour illustrer le poème <u>Le Corbeau</u> d'<b>Edgar Allan Poe</b></td></tr>
</tbody></table><br />
A l'inverse du premier, le texte qui clôt le recueil, <i>Une descente</i>, nous précipite quant à lui dans l'enfer des sous-sols new-yorkais où vivote une population de <i>hobos</i>, dont la recension varie allègrement selon les estimations des uns et des autres.<br />
Délaissé depuis peu par sa petite amie qui exploitait illégalement son travail dans le commerce de chaussures qu'elle tient, Seymour se retrouve du jour au lendemain dans la précarité de la ville tentaculaire. Symbole de la défection progressive de son sort, son ventre légèrement proéminent au niveau de l'abdomen, est traîné comme une épave provoquant le naufrage insensible de son propriétaire, qui se voit confronté aux rebuts de la société au sein d'un dédale où croupit une horde de sans-abris subsistant péniblement grâce aux maigres denrées en voie de putréfaction renvoyées par la métropole, et qui se servent du papier recyclé des journaux de la bourse pour confectionner un matelas au ras du sol.<br />
Dévoré par la vermine, le malheureux vagabond qui aura passé ses derniers jours dans les souterrains, connaîtra paradoxalement une fin similaire à la jeune Idalia.<br />
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<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiaH79pAzACqf9-MuUVer9IXha9oZ7LfRGjMxoU0eJ-xNE5IcedM3X6xHsIaWazF9q4Ld9AjITQOe2xu9EazrthRwhQS76Ab7AkU1xwbXMzExFpTGvntpoyzJeA1eQ5WOvIc3-2xGAzdL2r/s1600/Gravure+de+Gustave+Dor%25C3%25A9+pour+illustrer+le+po%25C3%25A8me+Le+Corbeau+d%2527Edgar+Allan+Poe.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiaH79pAzACqf9-MuUVer9IXha9oZ7LfRGjMxoU0eJ-xNE5IcedM3X6xHsIaWazF9q4Ld9AjITQOe2xu9EazrthRwhQS76Ab7AkU1xwbXMzExFpTGvntpoyzJeA1eQ5WOvIc3-2xGAzdL2r/s400/Gravure+de+Gustave+Dor%25C3%25A9+pour+illustrer+le+po%25C3%25A8me+Le+Corbeau+d%2527Edgar+Allan+Poe.jpg" width="270" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Gravure de <b>Gustave Doré</b> pour illustrer le poème <u>Le Corbeau</u> d'<b>Edgar Allan Poe</b></td></tr>
</tbody></table><br />
Le texte central du recueil, <i>Les nuits de Baltimore</i>, met en scène les derniers jours d'<b>Egar Allan Poe</b> dont la mort a suscité les théories les plus diverses: tuberculose, épilepsie, diabète, rage, alcoolisme aiguë parmi tant d'autres.<br />
Gabrielle Wittkop, elle, semble suggérer la prédominance de l'hypothèse de la corruption et de la violence qui sévissait de manière dissimulée durant les élections.<br />
L'échange de tenues effectué dans cet hôtel miteux de Baltimore avec un homme au visage d'ombre, puis la déchéance de l'homme en noir dans la taverne <i>« Gunner's Hall » </i>transformée provisoirement en bureau de vote, nous invitent à penser que celui-ci aie été contraint par ses tortionnaires de renoncer à son droit de vote élémentaire.<br />
Le récit grouille de références à l'histoire de l'auteur. Ainsi, les deux hommes mentionnés de prime abord lors de l'arrivée du personnage dans la cité qui a salué son talent de façon prématurée, sont Thomas W. White, le directeur de la revue <i>Southern Literary Messenger</i> qui l'enrôla en 1835 , et John P. Kennedy , qui était membre du jury du <i>Baltimor Saturday Visiter </i>au moment où l'auteur natif de Boston, et futur ami de Kennedy, reçoit en 1833 le premier prix pour le <i>Manuscrit trouvé dans une bouteille</i>.<br />
Perry, quant à lui, le seul compère à qui l'homme décide de rendre visite est l'autre nom d'Edgar Poe. <br />
De plus, William Gowans, libraire qui a partagé le premier étage de la demeure new-yorkaise du couple a véritablement décrit Virginia, sa femme telle que le fait Gabrielle Wittkop <i style="font-family: Times,"Times New Roman",serif;">« avec les yeux d'une hourri et un profil qui eût tenté Canova. » </i><br />
La précieuse valise que transporte sans cesse le personnage, dans un souci qui touche à l'obsession, contient très certainement les feuillets d'une oeuvre en gestation dont, cependant, on ignore la nature précise.<br />
Bien que séduisant, le rapprochement entre la célèbre exclamation proférée par <b>Albert Einstein</b>, lors de sa découverte permettant de formuler la relativité, soudainement prononcée par le personnage, et <a href="http://www.lekti-ecriture.com/editeurs/Eureka,2550.html">Eureka</a>, titre de l'essai de Poe, semble cependant conduire à une impasse, dans la mesure où l'oeuvre était déjà publiée au moment où se déroule le récit.<br />
<i>« Oh Susannah » </i>est le début d'un couplet plusieurs fois inséré dans la nouvelle, et il s'agit au même titre de la chanson de <b>Stephen Foster</b> de 1848, associée à la ruée vers l'or en Californie, dont on retrouve dans le texte présent la trace par l'intermédiaire de rescapés noyant leur désillusion dans l'alcool d'une taverne. <br />
La missive du compagnon d'infortune de l'homme en noir, adressée au Docteur Snodgrass dans le but de le sauver, nous est restituée avec une quasi-exactitude, hormis l'identité du comateux éthylique qui est ici omise. Par ailleurs, le cabaret où gît la victime est appelé dans le texte de Wittkop <i>« The Raven »</i>, allusion explicite au poème légendaire de Poe duquel provient l'épitaphe gravée sur sa tombe:<br />
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<blockquote><div style="font-family: Times,"Times New Roman",serif;"><i>« Quoth the Raven,</i><i> </i></div><div style="font-family: Times,"Times New Roman",serif;"><i>"Nevermore." » </i></div></blockquote><br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjij7iaJXJ3BmI0M2c7aztd0CjIA8enb0f908egJ3K5rTT2fm1xOoeIIzJJkeMyM31v6OGRrOv4nI8zLATrAtbTFFMymnEzfn4QsA5KU2lMc3vhgLPw4UOd27VjMOKU7YFcE93jtKiyAWPc/s1600/Couv_Les+d%25C3%25A9parts+exemplaires.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjij7iaJXJ3BmI0M2c7aztd0CjIA8enb0f908egJ3K5rTT2fm1xOoeIIzJJkeMyM31v6OGRrOv4nI8zLATrAtbTFFMymnEzfn4QsA5KU2lMc3vhgLPw4UOd27VjMOKU7YFcE93jtKiyAWPc/s320/Couv_Les+d%25C3%25A9parts+exemplaires.jpg" width="214" /></a></div><br />
<ul><li>A revivre: Les départs exemplaires, recueil de trois nouvelles de Gabrielle Wittkop aux éditions de Paris/ Max Chaleil( 1996)</li>
<li><a href="http://www.lmda.net/din/tit_lmda.php?Id=4088">Un remarquable entretien de Gabrielle Wittkop accordé à Eric Dussert, dans le cadre du numéro de décembre 96-janvier 97 du Matricule des anges, suite à la sortie des Départs exemplaires</a></li>
</ul>edwoodhttp://www.blogger.com/profile/01713248479216797340noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-5936397440233615254.post-55301643374334355442010-12-06T09:31:00.003+01:002010-12-07T22:18:20.959+01:00Gabrielle Wittkop perpétue le mythe des harpies<table align="center" cellpadding="0" cellspacing="0" class="tr-caption-container" style="margin-left: auto; margin-right: auto; text-align: center;"><tbody>
<tr><td style="text-align: center;"><br />
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<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhRVPfomLQU0yIxUuCisxFr_u8_SfQe9TqSRy60O2rf2tJKP2KVRaJA42E_vZS8SZ30oD0ffIT_rn4Vsp9vy50chmXK7uhGbfLdlxArTM9KOfWYcg4Bi2sEeT0h7dx3BtSUB4YB_QA-aZap/s1600/harpie.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: auto; margin-right: auto;"><img border="0" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhRVPfomLQU0yIxUuCisxFr_u8_SfQe9TqSRy60O2rf2tJKP2KVRaJA42E_vZS8SZ30oD0ffIT_rn4Vsp9vy50chmXK7uhGbfLdlxArTM9KOfWYcg4Bi2sEeT0h7dx3BtSUB4YB_QA-aZap/s400/harpie.jpg" width="300" /></a></td></tr>
<tr><td class="tr-caption" style="text-align: center;">Harpie nichée sur la façade du palais du Rhin à Strasbourg</td></tr>
</tbody></table><br />
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Oeuvre atypique de <b>Gabrielle Wittkop</b>, <u>L'Almanach perpétuel des harpies</u>, sous-titrée "avec explication de leurs origines, moeurs, coutumes, métamorphoses et destinées", présente une série de variations étranges autour de la figure de la harpie. Composé de poèmes, dessins, courts extraits encyclopédiques, d'allusions mythologiques, de correspondances imaginaires, faits divers fictifs, de témoignages inventés de toutes pièces, d'une fausse ballade, de plusieurs contes cruels, mais aussi de quelques énigmes et de limericks, il s'agit avant tout d'un puzzle ludique dont les différents morceaux se répondent les uns les autres dans un esprit malicieux et truculent du plus bel effet. Si le ton passe d'un registre à l'autre avec une aisance déconcertante, l'image de la harpie reste bien présente à l'esprit du lecteur tout au long de l'ouvrage grâce à un fil rouge, dont les textes restent attaché, tout en acquérant progressivement une autonomie vis-à-vis de la figure ancrée dans la mythologie grecque. Tour à tour cylindre denté donnant lieu à un échange cocasse entre le directeur d'une usine de pâtes et le fabricant des machines utilisées en son sein, lieu de débauche nocturne, papillon fascinant, la harpie se métamorphose au gré de la fantaisie wittkopienne qui avertit très vite son lecteur de la sorte:<br />
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<blockquote><i><span style="font-family: Times,"Times New Roman",serif;">"Mais qui peut connaître les métamorphoses des Harpies?</span></i><br />
<i><span style="font-family: Times,"Times New Roman",serif;">Changeant sans cesse au cours des siècles, elles adoptèrent des visages toujours recommencés, toujours renouvelés, s'épanchant les uns dans les autres en un mouvement perpétuel comme celui de la mer où elles sont nées."</span></i></blockquote><br />
Gabrielle Wittkop s'ingénie à démontrer sa présence insoupçonnée dans le chaos moderne, à traquer ses apparitions invisibles au commun des mortels en portant un regard cryptologique, tout en assumant un degré d'auto-dérision non-négligeable.<br />
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Loin d'être innocent, le choix de la harpie peut être considéré comme une parabole de l'auteur elle-même, dont l'oeuvre a souvent dérouté l'opinion publique et a été victime d'une interprétation pour le moins étriquée et répondant à des préjugés associés aux thèmes abordés et aux titres choisis, dégageant une vague odeur de souffre.<br />
Le dessin noir et blanc de son plumage semble inscrire le destin contrasté d'une artiste qui a été jugée hérétique par la censure, avant d'être réhabilitée et reconsidérée par ses pairs comme une auteur vénérable, dotée d'une plume légendaire, capable d'enserrer son lecteur comme une proie vulnérable.<br />
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<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiQlriqG0BlnB-AmQFTtn3ezmDo7c7VntfzIdqXW0XYPjjkIOhc6axlE0ZFQEnojiFNBKqFIMVIGh8OKrsIoAuWUieJe5lhZN26BQFdp_wR3B8gT6OV_KN-R-sR2_AFEsCVQeMwO_Yy80m-/s1600/Couv_Almanach+perp%25C3%25A9tuel+des+harpies.jpg" imageanchor="1" style="clear: left; float: left; margin-bottom: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="320" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEiQlriqG0BlnB-AmQFTtn3ezmDo7c7VntfzIdqXW0XYPjjkIOhc6axlE0ZFQEnojiFNBKqFIMVIGh8OKrsIoAuWUieJe5lhZN26BQFdp_wR3B8gT6OV_KN-R-sR2_AFEsCVQeMwO_Yy80m-/s320/Couv_Almanach+perp%25C3%25A9tuel+des+harpies.jpg" width="204" /></a></div><br />
<ul><li>A dévouvrir: L'Almanach perpétuel des harpies de Gabrielle Wittkop chez Patrice Thierry Editeur, collection de L'Ether Vague( 1995)</li>
</ul><div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"></div><span id="goog_431663728"></span><span id="goog_431663729"></span>edwoodhttp://www.blogger.com/profile/01713248479216797340noreply@blogger.com2