jeudi 9 septembre 2010
Le mariage du ciel et de la terre
Choir, terre promise retournée vers le ciel,
Îlot miroitant le spectre d'un sauveur,
cent fois crié, maintes fois récrié.
Ô Choir, délivre-nous de ton atrocité!
L'opacité de ton brouillard, nous fouillons.
Les vertèbres de ta dépouille, nous autopsions.
Les ténèbres de ton cadavre, nous palpons.
Ô Illinuk, Père désastre prémonitoire,
toujours plus las, toujours plus bas,
cesse de nous enfoncer, de nous fourvoyer!
Au lieu d'étioler l'espoir de ton auditoire
accroupi devant toi, décrépissant,
tourne tes yeux depuis ton étoilé promontoire.
Pitié, ravive le culte de ton ascension,
afin qu'à notre tour, nous jouissions d'une élévation.
Ô Choir, conglomérat de plantes gisantes,
cohorte de sangsues, de punaises grouillantes,
troupeau hirsute de vers de terre,
raz-de-marée de purulences,
inexpugnable tumeur.
Univers enraciné dans la pourriture,
terre sans foi visitée, sans lois gouvernée,
envers d'un décor sans fond ni fin,
repoussant les bornes du désespoir.
Ô Choir, je t'en supplie,
anesthésie notre peine,
ou anéantie notre supplice!
Marche arrière que nous fassions
latéralement que nous bifurquions,
tête baissée que nous foncions,
à la suite de nos pas inlassablement,
vers quoi débouchons-nous?
Cul-de-sac, impasse, ou précipice.
Le cas échéant, plouf, un gouffre béant
qui nous submerge, marais ou cage,
dans un incessant torrent d'immondices.
Vices ailleurs évités à tout prix,
Vertus ici prisées plus que tout.
Souffrances conduisant à la délivrance,
Difformités suscitant l'admiration,
Flagellations menant à l'orgasme,
en son sein la fertilité de la jouissance,
ou inversement, la jouissance de la stérilité.
Joies et plaisirs dépareillés,
puisqu'ici comme nulle part ailleurs,
les extrémités semblent s'attirer,
ou plutôt, pour ainsi dire, s'épouser.
Ô Illinuk, polydactyle prodigieux,
petit ange amoncelant nos douleurs,
démon avalant nos douceurs,
perfore nos réactions épidermiques!
Puiser la vie dans les profondeurs,
pénétrer les arcanes de l'existence.
Susciter la soif de découverte,
Ressusciter la joie de l'aventure,
dénicher ce qui se terre à la surface
pour enfouir nos tourments loin de tout,
pour immiscer notre ennui dans les coulisses
d'une immortelle et insondable demeure.
Inverser le cours de notre déchéance,
trouver l'endroit en cherchant l'envers,
être en aval, en amont dans le même temps
Hop, hop, hop, je grimpe vers le toit
d'un abri n'apparaissant qu'en toi.
Gravir les degrés de l'échelle de riches terres,
de vain à neuf rejoindre la patrie célestueuse,
dans le sens inverse des aiguilles du monstre.
Se laisser dévorer par le récit tortueux
du prophète Yoakam qui engloutit
la peine de devoir espérer par soi-même.
Par la narration salvatrice, se laisser emporter.
Par la cérémonie incantatrice, se laisser bercer.
Par les remous de la mélopée, se laisser dériver.
S'envoler enfin avec la litanie du serf volant,
prosopopée arrimant le ciel et l'enfer,
faisant succomber le parterre conquis,
brassé par de vagues espoirs de renaissance,
de mariage entre croûte terrestre et voûte céleste.
Voilà à Choir, le sort qui nous est échu.
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1 commentaire:
Intéressant
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